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Pélerinage des pères de famille à Cotignac

Publiée le 03-07-2017

1er juillet 21017

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    Où est ta femme ?
     C’est la question que le Seigneur pose à Abraham au cœur de cet épisode du chêne de Mambré.

     Revenons à cette rencontre étonnante dans laquelle nous ne savons jamais si les visiteurs sont 3 ou s’il n’y en a qu’un seul. C’est la deuxième fois, dans la Genèse, qu’à propos de Dieu, le pluriel surgit de façon surprenante, à un moment où seule l’unité, l’unicité même devrait être mise en avant. La première fois, c’est, bien sûr au chapitre 2, lorsqu’au sixième jour de création, il dit : « Faisons l’homme à notre image ! » Il ne s’agit pas d’un pluriel de majesté, puisqu’en Hébreu la majesté se dit par, ce qu’on appelle, le passif divin. Que vient donc faire ce pluriel presque blasphématoire concernant Dieu ? Depuis la formidable révélation trinitaire de l’évangile et en particulier depuis cet épisode du baptême du Seigneur où le Fils entend la voix du Père tandis que l’Esprit Saint, sous la forme d’une colombe le couvre de son ombre, nous y voyons une trace de la Trinité.

     La Trinité, c’est le Père qui aime le Fils d’un amour parfait et qui se donne totalement à Lui, c’est le Fils qui aime le Père d’un amour parfait, et qui se reçoit totalement de Lui, et qui se donne à lui, et leur amour est si fort qu’il est fécond, qu’il fait jaillir un troisième, l’Esprit Saint, égal en dignité au deux premiers, donc Dieu lui-même.

     Quand je regarde des époux, je vois un homme qui essaye d’aimer sa femme du mieux qu’il peut et qui se donne à elle, je vois une femme qui essaye d’aimer son mari du mieux qu’elle peut, qui reçoit cet amour donné et qui se donne à lui et leur amour est si fort qu’il est fécond, qu’il fait naître un troisième, l’enfant, égal en dignité aux deux premiers, donc homme lui-même.

    La famille est l’icône de la Trinité, la plus belle image, dans notre monde créé, de l’amour de Dieu. Alors lorsque Dieu lui-même, parfaitement un, parfaitement unifié par l’amour, qui se donne dans un étonnant échange dynamique, rencontre Abraham, celui avec lequel il a fait alliance et qu’il s’aperçoit qu’il est seul, il lui pose la question « Où est Sarah ta femme ? » Cette question signifie : « tu es replié sur toi, tu n’as pas compris que ta femme t’a été donnée pour être la chair de ta chair, ton alter ego le plus précieux ». Dieu apprend à Abraham à se donner dans cet étonnant dialogue. Il lui dit : donne-toi tout entier, sans rien garder pour toi, comme le Père vis-à-vis du Fils. Livre-toi à elle, alors tu découvriras la beauté de l’amour et sa fécondité. Alors je reviendrai vers toi l’an prochain et tu auras un fils et tu pourras enfin entrer en dialogue vrai et profond avec moi, alors tu seras heureux du même bonheur que celui que je vis au cœur de la Trinité et auquel je te fais participer.

     Mes amis, aimer, ce n’est pas concéder, ce n’est pas donner quelque chose, ce n’est pas respecter, c’est se donner tout entier au point de vivre dans le cœur de l’autre. Lorsque vous allez retrouver vos épouses demain soir, ne vivez pas cette rencontre sans l’avoir préparée, sans vous être posé la question : « Qu’est-ce qu’elle a fait ce week-end, qu’est-ce qu’elle a vécu ». Ressentez ses joies et ses souffrances, et ses attentes. L’amour c’est sortir de soi, de ses perspectives mesquines, de ses envies égoïstes, pour entrer dans la vie et le cœur de l’autre, pour aller sur la colline de l’autre. Alors l’amour sera d’une fécondité divine, y compris pour ceux qui n’ont pas le bonheur d’avoir des enfants, parce que l’amour est à lui-même sa propre fécondité lorsqu’il est vrai, c’est-à-dire divin. Alors la relation de vos corps sera une relation tournée vers l’autre, vers son plaisir et son bonheur, et non plus vécu de façon personnelle donc égoïste. La vie conjugale, si elle ressemble à la vie en Dieu, n’est pas un compromis, ni un équilibre instable, elle est un mouvement de tout l’être vers l’autre. Alors l’autre viendra vers vous de tout son être et répondra à vos attentes, à vos désirs, alors l’autre viendra sur votre colline et vous serez comblé. Je me souviens d’un article dans un journal dont le titre était : « après 10 ans de mariage, je m’aperçois que le mariage n’est pas fait pour moi ». En lisant le titre, j’ai pensé : « il est gonflé celui-là ; il aurait pu y penser plus tôt ! » Mais au fur et à mesure de l’article j’ai été saisi par la profondeur du propos jusqu’à la conclusion qui disait : : « après 10 ans de mariage, je m’aperçois que le mariage n’est pas fait pour moi…mais pour elle ! »

     Pour nous apprendre à aimer, et puisque vous vous attendez à ce qu’ici je parle d’un homme, d’un époux et d’un père, c’est-à-dire de Saint Joseph, et bien je vais vous parler d’une femme, d’une épouse et d’une mère, la Vierge Marie, discrètement présente dans la liturgie de ce jour grâce au chant du Magnificat

     Contemplons Marie dans sa vie quotidienne. Il lui arrive fréquemment de sortir de chez elle. D’ailleurs l’Eglise en sortie dont parle le pape François a, bien sûr, Marie pour modèle. Elle va à la rencontre des autres femmes du village. Elle leur parle avec bonté ; elle est bienveillante. Pas une critique ne sort de sa bouche. Elle dit du bien, elle encourage ; parfois elle console. Sa douceur est sa force. Son humilité n’a rien à voir avec notre fausse humilité par laquelle nous nous excusons d’exister ou nous esquivons les situations difficiles prétextant que nous sommes trop pauvres pour les affronter. Non l’humilité de Marie est courageuse, mais elle consiste aussi en une présence aimante et souriante. La joie et l’humilité sont deux sœurs jumelles qui se nourrissent l’une l’autre. Don Bosco a dit : « Rappelez-vous : le diable a peur des gens heureux ». Souvenez-vous souvent de cette phrase : «  le diable a peur des gens heureux ! »

     Si vous voulez ressembler à Marie, soyez heureux. Ne vous morfondez pas dans ces fausses souffrances que vous entretenez pour mieux vous valoriser, et qui produisent immanquablement l’effet inverse. L’humilité et la joie se puisent dans la foi qui nous rappelle combien Dieu nous aime, et combien il nous veut heureux et équilibré. D’ailleurs, la Vierge Marie était profondément équilibrée. N’imaginez pas que l’équilibre humain, on l’a ou on ne l’a pas ! Il faut aller le chercher, cet équilibre qui est source de joie. Il faut aller le chercher cet équilibre, avec courage, parce que, au départ, nous en sommes tous dépourvus. Cela s’appelle le péché originel ! Le péché originel, entretenu par notre péché actuel, crée en nous un profond déséquilibre qui introduit le soupçon, la peur dans nos relations avec Dieu, avec les autres et avec nous-mêmes. Ce déséquilibre se manifeste aussi dans nos relations avec la création. L’impureté y trouve son lit. Marie a été conçue sans le péché originel, sans ce déséquilibre ! Et ce cadeau de Dieu, n’est pas uniquement pour elle ou pour Jésus, mais aussi pour nous. Elle veut nous partager ce cadeau, en nous apprenant à nous réconcilier avec la création, avec nous-mêmes, avec les autres et avec Dieu. C’est la paix, qui figure parmi les fruits de l’Esprit. Marie avait le sens de la paix, de l’harmonie aussi. C’est pour cela qu’elle était une cuisinière exceptionnelle. La cuisine, finalement, c’est l’art de la composition, c’est l’art d’unir les saveurs et les odeurs, et les couleurs mêmes. Son lien avec la création n’ayant jamais été blessé, elle possédait cet art comme aucune autre créature. Marie était donc, et c’est une vérité théologique, la meilleure cuisinière que la terre ait portée. Elle avait surtout l’art de la relation entre les personnes. Cet art, elle l’exerçait avec cette patience qui s’unit si bien à la douceur. Quand vous êtes en conflit, appelez Marie, et demandez-lui conseil. Elle vous apprendra la maitrise de soi qui ressemble tellement à l’art culinaire. Se maitriser, c’est ordonner, c’est composer avec ce que nous avons reçu, avec nos dons, nos expériences heureuses ou malheureuses…une vie qui plaise à Dieu ; c’est être fougueux et déterminé quand il le faut, mais aussi doux et humble de cœur à d’autres moments, c’est être exigeant vis-vis de soi-même, patient et bon vis-à-vis des autres. Et lorsque vous aurez tout au long de la journée recherché la présence de Marie, lorsque vous aurez vécu sous son regard en essayant de lui ressembler, vous pourrez dire à Dieu avec joie et une pointe d’humour : « Seigneur j’ai fait ce que j’ai pu, fais le reste ! » Le secret de la sainteté, qui est compatible avec une vie équilibrée et heureuse, même si la souffrance est présente, ce secret, c’est la vie mariale ! « Voici ce que produit l’Esprit : Amour, joie paix patience, bonté, bienveillance, humilité, foi et maitrise de soi. » Ga, 5, 22

     Oui de même que Joseph est perdu sans son épouse, que l’Eglise est stérile sans sa mère, nous ne sommes rien sans la femme. Sans l’Eglise, mon épouse je ne suis pas père, sans vos épouses, vous non plus. Alors écoutez Dieu vous dire, comme à Abraham : « où est ta femme ?  »

 

 

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