5 octobre 2025 – Homélie du Pape Léon XIV lors de la Messe du jubilé du monde missionnaire et des migrants
L'Esprit nous envoie poursuivre l'œuvre du Christ dans les périphéries du monde, parfois marquées par la guerre, l'injustice et la souffrance. Face à ces scénarios sombres, resurgit le cri qui s'est souvent élevé vers Dieu au cours de l'histoire : pourquoi, Seigneur, n'interviens-tu pas ? Pourquoi sembles-tu absent ? Ce cri de souffrance est une forme de prière qui traverse toute l'Écriture et, ce matin, nous l'avons entendu chez le prophète Habacuc : « Combien de temps, Seigneur, vais-je appeler, sans que tu entendes ? [...] Pourquoi me fais-tu voir le mal et regarder la misère ? » (Ha 1, 1.3).
Le Pape Benoît XVI, qui avait recueilli ces questions lors de sa visite historique à Auschwitz, est revenu sur ce thème dans une catéchèse, affirmant : « Dieu se tait, et ce silence déchire l’âme de l’orant, qui appelle sans cesse, mais sans trouver de réponse. […] Dieu semble si distant, si distrait, si absent » (Catéchèse, 14 septembre 2011).
La réponse du Seigneur, cependant, nous ouvre à une espérance. Si le prophète dénonce la force inéluctable du mal qui semble prévaloir, le Seigneur, quant à lui, annonce que tout cela aura une fin, une échéance, car le salut viendra et ne tardera pas : « Celui qui est insolent n’a pas l’âme droite, mais le juste vivra par sa fidélité » (Ha 2, 4).
Il y a donc une vie, une nouvelle possibilité de vie et de salut qui vient de la foi, car elle nous aide non seulement à résister au mal en persévérant dans le bien, mais elle transforme notre existence au point d'en faire un instrument du salut que Dieu veut encore aujourd'hui opérer dans le monde. Et, comme Jésus le dit dans l'Évangile, il s'agit d'une force douce : la foi ne s'impose pas par la puissance et de manière extraordinaire ; il suffit d'un grain de sénevé pour faire des choses impensables (cf. Lc 17, 6), car il porte en lui la force de l'amour de Dieu qui ouvre les voies du salut.
C'est un salut qui se réalise lorsque nous nous engageons personnellement et que nous prenons soin, avec la compassion de l'Évangile, de la souffrance du prochain ; c'est un salut qui se fraye un chemin, silencieux et apparemment inefficace, dans les gestes et les paroles quotidiennes, qui deviennent comme la petite graine dont nous parle Jésus ; c'est un salut qui grandit lentement lorsque nous nous faisons des “serviteurs inutiles”, c'est-à-dire lorsque nous nous mettons au service de l'Évangile et de nos frères sans rechercher nos propres intérêts, mais uniquement pour apporter l'amour du Seigneur dans le monde.
Avec cette confiance, nous sommes appelés à renouveler en nous le feu de la vocation missionnaire. Comme l'affirmait saint Paul VI, « il nous appartient de proclamer l'Évangile en ce moment extraordinaire de l'histoire humaine, une époque vraiment sans précédent, où des sommets du progrès jamais atteints auparavant s'associent à des abîmes de perplexité et de désespoir, eux aussi sans précédent » (Message pour la Journée missionnaire mondial, 25 juin 1971).
Je voudrais ensuite rappeler la beauté et l'importance des vocations missionnaires. Je m'adresse en particulier à l'Église européenne : aujourd'hui, nous avons besoin d'un nouvel élan missionnaire, de laïcs, de religieux et de prêtres qui offrent leur service dans les terres de mission, de nouvelles propositions et expériences vocationnelles capables de susciter ce désir, en particulier chez les jeunes