Je vous souhaite la bienvenue et je remercie le cardinal Turkson de ses aimables paroles. J’ai apprécié que lors de votre rencontre, vous ayez voulu accomplir un acte spécial de consécration au Cœur Sacré de Jésus, et je vous assure de ma prière afin qu’elle soit féconde pour chacun de vous. Je voudrais partager quelques pensées simples avec vous.
Les premières communautés chrétiennes ont souvent présenté le Seigneur Jésus comme un « médecin », soulignant ainsi l’attention constante et pleine de compassion qu’il portait à ceux qui souffraient de toutes sortes de maladies. Sa mission consistait avant tout à se faire proche des malades ou des personnes porteuses de handicap, en particulier de celles qui étaient méprisées et marginalisées à cause de cela. De cette manière, Jésus rompt le jugement de condamnation qui qualifiait souvent le malade de pécheur; avec cette proximité compatissante, il manifeste l’amour infini de Dieu le Père pour ses enfants les plus nécessiteux.
Le soin des personnes malades apparaît donc comme l’une des dimensions constitutives de la mission du Christ; et pour cette raison, il en est resté ainsi dans celle de l’Église. Dans les évangiles, le lien étroit entre la prédication du Christ et les gestes de guérison qu’il accomplit pour ceux qui sont « tourmentés par diverses maladies et douleurs, possédés par des démons, épileptiques et paralytiques » – est donc évident, dit Matthieu (4, 24).
La manière dont Jésus prend soin des malades et des souffrants est également importante. Il touche souvent ces personnes et il se laisse toucher, même dans les cas où cela serait interdit. Il fait ainsi par exemple avec la femme qui avait souffert d’hémorragies pendant des années: il sent qu’on le touche, il perçoit la force de guérison qui sort de lui, et quand cette personne lui avoue à genoux ce qu’elle a fait, il lui dit: « Fille, ta foi t’a sauvée. Va en paix! « (Lc 8, 48).
Pour Jésus, guérir signifie se faire proche de la personne, même si certains voudraient l’en empêcher, comme dans le cas de l’aveugle Bartimée, à Jéricho. Jésus le fait appeler et lui demande: « Que veux-tu que je fasse pour toi? » (Mc 10, 51). Il peut être surprenant que le « médecin » demande à la personne qui souffre ce qu’elle attend de lui. Mais cela souligne la valeur de la parole et du dialogue dans la relation de soins. Pour Jésus, guérir signifie entrer dans un dialogue pour faire émerger le désir de l’être humain et le doux pouvoir de l’Amour de Dieu, agissant dans son Fils.
Parce que guérir signifie commencer un chemin: un chemin de soulagement, de consolation, de réconciliation et de guérison. Lorsqu’un certain traitement est donné avec un amour sincère pour l’autre, l’horizon de la personne soignée est élargi, car l’être humain est un: c’est l’unité de l’esprit, de l’âme et du corps. Et cela se voit clairement dans le ministère de Jésus: Il ne guérit jamais une partie, mais toute la personne, de manière intégrale. Parfois, à partir du corps, parfois du cœur – c’est-à-dire, en pardonnant ses péchés (cf. Mc 2, 5) – mais toujours pour guérir l’ensemble.
Enfin, le soin de Jésus coïncide avec relever la personne et envoyer celui ou celle dont Il s’est fait proche et qu’Il a guéri(e). Nombreux sont les malades qui, après avoir été guéris par le Christ, deviennent ses disciples et l’on suivi.
Par conséquent, Jésus s’approche, prends soin, guérit, réconcilie, appelle et envoie: comme on le voit, sa relation aux personnes opprimées par des maladies et les infirmités est pour Lui une relation personnelle, riche, pas mécanique, pas à distance.
Et c’est à cette école de Jésus médecin et frère des souffrants que vous êtes appelés, vous, les médecins qui croyez en Lui, membres de son Église, à vous faire proches de ceux qui subissent d’épreuve en raison de la maladie.
Vous êtes appelé à soigner avec délicatesse et respect de la dignité et de l’intégrité physique et psychique des personnes.
Vous êtes appelé à écouter attentivement, à répondre avec des paroles adéquates, qui accompagnent les gestes de soins en les rendant plus humains et donc aussi plus efficaces.
Vous êtes appelé à encourager, à consoler, à relever, à donner de l’espérance. On ne peut guérir et être guéri sans espérance; en cela, nous sommes tous dans le besoin et reconnaissants envers Dieu, qui nous donne de l’espoir. Mais aussi reconnaissants envers ceux qui travaillent dans la recherche médicale.
Au cours des cent dernières années, les progrès ont été très grands. De nouvelles thérapies et de nombreux traitements sont expérimentés. Tous ces soins étaient impensables pour les générations passées. Nous pouvons et nous devons soulager les souffrances et éduquer chacun à devenir plus responsable de sa santé et de celle de leurs proches et leurs familles. Nous devons également nous rappeler que soigner veut dire respecter le don de la vie du début à la fin. Nous ne sommes pas les propriétaires: la vie nous est confiée et les médecins en sont les serviteurs.
Votre mission est à la fois un témoignage d’humanité, une façon privilégiée de faire voir, de nous faire sentir que Dieu, notre Père, prend soin de chaque personne, sans distinction. Pour cela, il souhaite également utiliser nos connaissances, nos mains et notre cœur pour soigner et guérir chaque être humain, car il souhaite donner vie et amour à tous.
Cela exige de vous compétence, patience, force spirituelle et solidarité fraternelle. Le style d’un médecin catholique allie professionnalisme, capacité de collaboration et rigueur éthique. Et tout cela profite à la fois aux malades et au milieu dans lequel vous agissez. Comme on le sait très souvent, la qualité d’un service dépend non seulement de la richesse des instruments dont il es doté, mais du niveau de professionnalisme et d’humanité du chef de service et de l’équipe des médecins. Cela, nous voyons tous les jours, de nombreuses personnes simples qui vont à l’hôpital: «Je voudrais aller chez cet homme, cette femme médecin – Pourquoi? – Parce qu’ils sentent la proximité, ils sentent le dévouement ».
En vous renouvelant continuellement, en puisant aux sources de la Parole de Dieu et des sacrements, vous pourrez accomplir bien votre mission et l’Esprit vous donnera le don du discernement pour faire face à des situations délicates et complexes, et pour dire des paroles justes de façon juste et en silence juste, de façon juste.
Chers frères et soeurs, je sais que vous le faites déjà, mais je vous exhorte à prier pour ceux que vous soignez et pour les collègues qui travaillent avec vous. Et n’oubliez pas de prier pour moi aussi. Merci!
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22.6.2019 Pape François