Chers Frères dans l’épiscopat,
Je vous souhaite la bienvenue. Je suis très heureux de vous rencontrer à l’occasion de votre visite ad limina ! Je remercie Monseigneur Samuel Kleda, Président de votre Conférence épiscopale, pour les paroles qu’il vient de m’adresser en votre nom. Je vous demande de transmettre mes chaleureuses salutations à tous vos diocésains, en particulier aux prêtres, aux religieux et religieuses, aux laïcs engagés dans le service pastoral ainsi qu’à tous les habitants du Cameroun. J’adresse également un salut fraternel au cardinal Christian Tumi. Que votre prière sur les tombeaux des Apôtres Pierre et Paul vous conforte dans la foi et la persévérance pour l’exercice de votre charge pastorale, au service du peuple qui vous a été confié. Ils sont pour nous les modèles que nous devons suivre dans le don total qu’ils ont fait d’eux mêmes – jusqu’au prix de leur sang – au Christ et à son Évangile.
Votre visite me donne l’occasion de vous renouveler mes encouragements et ma confiance, et de souligner l’esprit de communion que vous avez à cœur d’entretenir avec le Siège apostolique. Pour que l’Évangile touche et convertisse les cœurs en profondeur, nous devons en effet nous rappeler que c’est seulement en étant unis dans l’amour que nous pouvons rendre témoignage de manière authentique et efficace. Unité et diversité sont pour vous des réalités à maintenir fermement liées pour faire droit à la richesse humaine et spirituelle de vos diocèses qui s’exprime de multiples façons. Par ailleurs, je souhaite que la bonne collaboration entre l’Église, l’État et la société camerounaise dans son ensemble, qui s’est manifestée récemment par la signature d’un Accord-cadre entre le Saint-Siège et la République du Cameroun, porte des fruits abondants. Je vous invite à mettre cet Accord en œuvre concrètement, car la reconnaissance juridique de nombreuses institutions ecclésiales leur donnera un plus grand rayonnement, au bénéfice non seulement de l’Église, mais de toute la société camerounaise.
À ce propos, je tiens à saluer l’engagement considérable de vos Églises locales dans un grand nombre d’œuvres sociales. Cet engagement dans les domaines éducatif, sanitaire, caritatif est reconnu et apprécié par les Autorités civiles ; il doit être le lieu d’une féconde collaboration entre l’État et l’Église, dans le respect de la pleine liberté de celle-ci. L’engagement dans les œuvres sociales fait partie intégrante de l’évangélisation, car il existe une connexion intime entre évangélisation et promotion humaine. Celle-ci doit s’exprimer et se développer dans toute l’action évangélisatrice (cf. Evangelii gaudium, n. 178). Je vous encourage donc à persévérer dans l’attention que vous portez aux plus faibles, en soutenant, matériellement et spirituellement, tous ceux qui s’y consacrent, en particulier les membres des Instituts religieux et les laïcs associés ; je les remercie tous de grand cœur pour leur dévouement et pour le témoignage authentique qu’ils rendent à l’amour du Christ pour tous les hommes.
Votre action évangélisatrice sera rendue d’autant plus efficace que l’Évangile sera réellement vécu par ceux qui l’ont reçu et le professent. Là se trouve le moyen d’attirer au Christ ceux qui ne le connaissent pas encore, en leur montrant la puissance de son amour capable de transformer et d’illuminer la vie des hommes. C’est ainsi, seulement, que nous pouvons faire face, dans la vigilance mais avec sérénité, au développement de multiples propositions nouvelles qui séduisent les esprits sans renouveler profondément les cœurs. Par ailleurs, la présence importante de Musulmans dans certains de vos diocèses, est une invitation pressante à témoigner courageusement et joyeusement de la foi au Christ ressuscité. Développer le dialogue de la vie avec les musulmans, dans un esprit de confiance mutuelle, est aujourd’hui indispensable pour maintenir un climat de cohabitation pacifique, et décourager le développement de la violence dont les chrétiens sont les victimes dans certaines régions du continent.
Il me semble donc essentiel, comme une priorité, de poursuivre votre action visant à renforcer et à enraciner la foi dans le cœur des fidèles. La formation est un élément essentiel du développement du peuple de Dieu, particulièrement en cette période où le relativisme et la sécularisation commencent à prendre racine en Afrique. De très nombreux laïcs sont impliqués dans leurs paroisses et dans les mouvements, et ils sont vraiment essentiels à la transmission de la foi. Leur formation doit être solide et continue. Je vous prie de transmettre à ces fidèles laïcs et à toutes les personnes impliquées dans ce travail de formation ma gratitude et mes vifs encouragements.
Les familles, aussi, doivent continuer à être l'objet de votre attention particulière, surtout aujourd'hui alors qu'elles font l'expérience de graves difficultés – que ce soit la pauvreté, le déplacement des populations, le manque de sécurité, la tentation de revenir à des pratiques ancestrales incompatibles avec la foi chrétienne, ou même de nouveaux modes de vie proposés par un monde sécularisé. Je vous invite à profiter pleinement de la dixième Assemblée plénière de l'Association des Conférences épiscopales de l'Afrique centrale qui s'est tenue au Congo, à laquelle vous avez participé, et qui – je n'en doute pas – va porter des fruits abondants.
Par ailleurs, il est essentiel que le clergé rende le témoignage d’une vie habitée par le Seigneur, cohérente avec les exigences et les principes de l’Évangile. Je tiens à exprimer à tous les prêtres mes remerciements pour le zèle apostolique dont ils font preuve, souvent dans des conditions difficiles et la précarité, et je les assure de ma proximité et de ma prière. Il convient néanmoins de rester vigilant dans le discernement et l’accompagnement des vocations sacerdotales – grâce à Dieu nombreuses au Cameroun – et aussi de soutenir la formation permanente et la vie spirituelle des prêtres pour lesquels vous êtes des pères attentifs, alors que les tentations du monde sont nombreuses, en particulier celles du pouvoir, des honneurs et de l’argent. Sur ce dernier point particulier, le contre témoignage qui pourrait être donné par une mauvaise gestion des biens, l’enrichissement personnel ou le gaspillage serait particulièrement scandaleux en une région ou beaucoup de personnes manquent du nécessaire.
D’autre part, l’unité du clergé est un élément indispensable du témoignage rendu au Christ ressuscité : « Qu’ils soient un, afin que le monde croie » (Jn 17,21); qu’il s’agisse de l’unité des Évêques, confrontés souvent aux mêmes défis et appelés à apporter des solutions communes et concertées, ou bien de l’unité du presbyterium que le Seigneur appelle à construire chaque jour en dépassant les préjugés, notamment ethniques.
Enfin, la vie consacrée demande à être aussi accompagnée afin que, enracinée dans le Christ au service du Royaume, elle reste toujours un témoignage prophétique et un modèle en matière de réconciliation, de justice et de paix (Cf. Evangelii gaudium, n. 117). Je vous invite à apporter votre soutien aux Instituts religieux dans leurs efforts de formation humaine et spirituelle, et à accueillir et accompagner, avec un prudent discernement, les initiatives nouvelles.
Chers frères, les efforts courageux d’évangélisation que vous déployez dans votre ministère pastoral portent de nombreux fruits de conversion. Je vous invite à en rendre grâce sans cesse et à renouveler le don de vous-même au Christ et au peuple qui vous est confié. Sans craindre les difficultés, vous irez courageusement de l’avant, avec un esprit missionnaire renouvelé, afin de porter la Bonne Nouvelle à tous ceux qui l’attendent encore ou qui en ont le plus besoin. Je vous confie tous, ainsi que vos diocèses à l’intercession de saint Jean-Paul II qui, par deux fois, visita votre pays, et à la protection maternelle de la Vierge Marie. Que Dieu vous bénisse !
Pape François - 6 septembre 2014