Jean-Paul II de A à Z

Malade

 

1979


5 juin 1979 – Angelus depuis le sanctuaire de Czestochowa
     Je ne peux manquer au cours de mon pèlerinage en Pologne, d’adresser la parole aux malades, qui sont si proches de mon c½ur. Je le sais, chers amis, souvent dans les lettres que vous m’envoyez, vous écrivez que vous offrez à mes intentions cette grande croix de la maladie et de la souffrance, que vous l’offrez pour ma mission papale. Que le Seigneur vous le rende !
      Pendant l’Angelus du matin, du midi et du soir — chaque fois que je récite, je sens, très chers compatriotes, que vous m’êtes spécialement proches. Je m’unis spirituellement a vous tous. D’une façon particulière, je renouvelle cette union spirituelle qui me lie à tout homme qui souffre, à tout malade, à tout homme cloué sur un lit d’hôpital, à tout infirme contraint d’utiliser une petite voiture, à tout homme qui, de quelque façon rencontre la croix.
     Très chers frères et s½urs ! Tout contact avec vous, en quelque lieu que ce soit, dans le passé ou aujourd’hui, est pour moi la source d’une profonde émotion. J’ai toujours senti l’insuffisance des paroles que j’aurais pu vous dire et qui m’auraient servi à exprimer ma compassion humaine. Et aujourd’hui encore, j’ai la même impression. Je l’éprouve toujours. Reste toutefois cette unique dimension, cette unique réalité qui permet à la souffrance humaine de se transformer essentiellement. Cette dimension, cette réalité, c’est la croix du Christ. Sur la croix, le Fils de Dieu a accompli la rédemption du monde. Et à travers le mystère que chaque croix met sur les épaules de l’homme, elle acquiert une dignité humainement impossible à concevoir, elle devient le signe de salut pour celui qui la porte et aussi pour les autres. « Je complète en ma chair ce qui manque aux épreuves du Christ » (Col 1, 24), a écrit saint Paul.
     Et c’est pourquoi, en m’unissant a vous tous qui souffrez sur toute la terre de Pologne — dans vos maisons, dans les hôpitaux, dans les cliniques, dans les centres de soins et de cure… ou que vous soyez — je vous en prie, utilisez pour le salut cette croix qui est devenue partie intégrante de chacun de vous. Je demande pour vous la grâce de la lumière et de la force spirituelle dans la souffrance, afin que vous ne perdiez pas courage, mais que vous découvriez par vous-mêmes le sens de la souffrance et que vous puissiez, avec la prière et le sacrifice, soulager les autres. Ne m’oubliez pas, n’oubliez pas non plus toute l’Église, ni la cause de l’Évangile et de la paix, que je sers par la volonté du Christ.
     Alors que vous êtes faibles et humainement frappés d’une certaine incapacité, soyez une source de force pour votre frère et père qui est proche de vous par la prière et par le c½ur.
     « Me voici, je suis la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon ta parole » (Lc 1, 38).
     Ces paroles que Marie prononce à travers tant de lèvres humaines, qu’elles deviennent pour vous tous lumière sur votre chemin !
     Que Dieu vous le rende, très chers frères et s½urs ! Et qu’il récompense tous ceux qui ont soin de vous. A travers toute manifestation de cet empressement à vous servir, le Verbe se fait chair (cf. Jn 1, 14). Le Christ a dit en effet : « Dans la mesure où vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est a moi que vous l’avez fait » (Mt 25, 40).
     Que l’Angélus continue donc en terre polonaise en union avec le pape. Et qu’il porte des fruits dans toute la vie des Polonais, non seulement les jours de fête, mais chaque jour de leur vie !

 

 


1980

 

 

11 février 1980 – Homélie de Jean Paul II, lors de la Messe avec les malades, au jour de ND de Lourdes – Basilique Saint Pierre
Vénérés frères et fils très chers,

     1.C’est avec une vive émotion et avec une joie profonde que j’adresse, ce soir, ma cordiale salutation avant tout à Monsieur le Cardinal vicaire et aux autres cardinaux présents, aux vénérables frères dans l’Épiscopat, aux prêtres du clergé séculier et régulier et, en particulier à ceux qui concélèbrent avec moi cette Eucharistie qui nous voit rassemblés autour de l’autel du Christ pour faire mémoire des merveilles de grâce opérées en celle que nous invoquons avec confiance comme avocate puissante et mère très douce.
     Ma salutation s’adresse ensuite aux religieuses présentes aussi en cette circonstance en nombre considérable. Il s’adresse encore aux personnes qui font partie, à des titres divers, des différentes associations mariales comme aussi à ceux qui ont été attirés à cette célébration par la dévotion qu’ils nourrissent pour la Vierge très Sainte.
     Je désire réserver une parole particulière de salutation aux malades qui sont les hôtes d’honneur de cette rencontre. Au prix de lourds sacrifices, ils ont voulu être présents ce soir pour témoigner en personne de l’amour qui les lie à la Mère céleste et beaucoup d’entre eux se sont rendus certainement en pèlerinage, à son sanctuaire, à Lourdes : qu’ils soient les bienvenus parmi nous en même temps que tous ceux qui se dépensent pour leur prêter assistance.
     Ma salutation s’étend donc à tous ceux qui sont réunis dans cette basilique patriarcale Saint-Pierre qui reçoit aujourd’hui une visite si exceptionnelle. Je désire exprimer à tous ma reconnaissance. Fils très chers, je me sens débiteur envers vous tous. En effet, c’est grâce à vous que se trouve transférée, aujourd’hui, dans cette basilique cette réalité particulière qui porte le nom de Lourdes. Réalité de la foi, de l’espérance et de la charité. Réalité de la souffrance sanctifiée et sanctifiante. Réalité de la présence de la Mère de Dieu dans le mystère du Christ et de son Église sur la terre : une présence particulièrement vive dans cette partie choisie de l’Église qui est constituée par les malades et par les souffrants.
     2. Pourquoi est-ce précisément les malades qui font le pèlerinage de Lourdes ? Pourquoi — nous demandons-nous — ce lieu est-il devenu pour eux presque un « Cana de Galilée » où ils se sentent appelés de manière particulière ? Qu’est-ce qui les attire à Lourdes avec tant de force.
     Il faut chercher la réponse dans la parole de Dieu que nous offre la liturgie dans la sainte messe que nous sommes en train de célébrer. À Cana, il y avait une fête nuptiale, fête de la joie parce que fête de l’amour. Nous pouvons imaginer facilement le « climat » qui régnait dans la salle du banquet. Cependant cette joie était, comme toute autre réalité humaine, une joie menacée. Les époux l’ignoraient mais leur fête risquait de se transformer en un petit drame parce que le vin commençait à manquer. Et si l’on y réfléchit, ce n’était autre que le signe de tous les autres risques auxquels serait exposé par la suite leur amour commençant.
     Par bonheur pour eux « la Mère de Jésus y était » et par conséquent « Jésus lui aussi était invité aux noces » (cf Jn 2, 1-2) ; et, sur l’invitation de sa Mère, Jésus changea miraculeusement l’eau en vin : le banquet put se poursuivre dans l’allégresse, et l’époux fut complimenté par le maître du repas (cf v. 9-10), émerveillé par la qualité du dernier vin servi.
     Voici, chers frères et s½urs, que le banquet de Cana nous parle d’un autre banquet : celui de la vie et nous désirons tous nous asseoir à sa table pour goûter un peu de joie. Le c½ur humain est fait pour la joie et il n’y a nullement à s’étonner si chacun tend vers ce but. Malheureusement la réalité soumet parfois tant de personnes à l’épreuve, souvent martyrisante, de la douleur : maladies, deuils, malheurs, tares héréditaires, solitude, tortures physiques, angoisses morales, un éventail de « cas humains » concrets dont chacun a un nom, un visage, une histoire.
     Ces personnes, si elles sont animées par la foi, se rendent à Lourdes. Pourquoi ? Parce qu’elles savent que là, comme à Cana « il y a la Mère de Jésus ». Et là où elle se trouve, il y a aussi Jésus qui ne saurait manquer. C’est cette certitude-là qui anime les foules qui, chaque année envahissent Lourdes à la recherche d’un soulagement, d’un réconfort, d’une espérance. Des malades de tout genre vont en pèlerinage à Lourdes soutenus par l’espérance que, par Marie, se manifestera en eux la puissance salvifique du Christ. Et, de fait, cette puissance se révèle toujours par le don d’une sérénité et d’une résignation immenses et parfois par une amélioration des conditions générales de la santé ou même par la grâce de la guérison complète comme l’attestent les nombreux « cas » qui ont été constatés durant plus d’un siècle.
      3.Toutefois, la guérison miraculeuse reste malgré tout un événement exceptionnel. La puissance salvifique du Christ invoquée par la propitiation de sa Mère se révèle à Lourdes principalement sur le plan spirituel. C’est au c½ur des malades que Marie fait entendre la voix miraculeuse de son Fils : voix qui détend prodigieusement les endurcissements de l’aigreur et de la révolte, et rend à l’âme des yeux pour voir sous une lumière nouvelle le monde, les autres et son propre destin.
     À Lourdes, les malades découvrent la valeur inestimable de leur propre souffrance. Ils parviennent sous l’éclairage de la foi, à saisir la signification fondamentale que la douleur peut avoir non seulement dans leur vie, intérieurement renouvelée par cette flamme qui consume et transforme, mais aussi dans la vie de l’Église, Corps mystique du Christ. La Très Sainte Vierge, qui est restée courageusement debout sur le Calvaire, à côté de la croix de son Fils (cf. Jn 19, 25), participant personnellement à sa Passion, sait toujours convaincre de nouvelles âmes à unir leurs propres souffrances au sacrifice du Christ en un « offertoire » choral qui franchissant le temps et l’espace, embrasse l’humanité tout entière et la sauve.
     Conscients de ceci, nous voulons, en ce jour où la liturgie commémore les apparitions de Lourdes, remercier toutes les âmes pleines de bonne volonté qui, en souffrant et priant, collaborent de manière si efficace au salut du monde.
     Que la Vierge se tienne à leurs côtés comme elle le fut près des jeunes mariés de Cana et qu’elle veille à ce que ne vienne jamais à manquer dans leur c½ur le vin généreux de l’amour. L’amour, en effet, peut accomplir le prodige de faire fleurir sur le tronc plein d’épines de la souffrance la rose éclatante de la joie…
     4.Mais je ne veux pas oublier les serviteurs de Cana qui prirent une si grande part à l’accomplissement du miracle de Jésus en exécutant docilement ses ordres. En effet, Lourdes est également un prodige de générosité, d’altruisme, de service : à commencer par Bernadette qui fut l’instrument choisi pour transmettre au monde le message évangélique de la Vierge, pour découvrir la source d’eau miraculeuse, pour demander la construction de la « chapelle », et, par-dessus tout, elle sut prier et s’immoler, se retirant dans le silence d’une vie totalement consacrée à Dieu. Et alors, comment pourrait-on oublier la foule immense des personnes qui, inspirées par l’humble bergère, se sont dévouées et se dévouent toujours avec un amour extraordinaire au service du sanctuaire, au fonctionnement des services, et spécialement à l’assistance des malades ? Aussi, pensons-nous tous, vous et moi, avec estime et reconnaissance à tous ceux qui se prodiguent à vos côtés, très chers malades, et vous entourent de leurs soins attentifs : les médecins, le personnel paramédical, tous ceux qui collaborent aux services nécessaires tant durant les pèlerinages que dans les lieux habituels où se trouvent les malades, puis, et surtout, à qui incombe principalement la mission de vous assister.
     Comme les serviteurs de Cana qui — contrairement au maître de la table — « étaient au courant » du prodige accompli par Jésus (cf. Jn 2, 9), puissent ceux qui vous assistent être toujours conscients du prodige de grâce qui s’accomplit dans votre vie et vous aider à être à la hauteur de la tâche que Dieu vous a confiée.
     5.Très chers frères et s½urs, nous continuons maintenant, recueillis autour de l’autel, la célébration de l’Eucharistie. Le Christ est avec nous : que cette certitude inonde nos c½urs d’une paix immense et d’une joie profonde. Nous savons que nous pouvons compter sur lui qui est partout, maintenant et toujours. Il est l’ami qui nous comprend et nous soutient dans les moments d’obscurité, car il est « l’homme des douleurs, familier de la maladie » (cf. Is 53, 3). Il est le compagnon de route qui rend la chaleur à notre c½ur, l’éclairant sur les trésors de sagesse que contiennent les Écritures (cf. Lc 24 32). Il est le pain vivant descendu du ciel qui peut allumer dans votre chair mortelle l’étincelle de la vie qui ne meurt pas (cf. Jn 6, 51).
    Reprenons donc la route avec un nouveau souffle. La Sainte Vierge nous montre le chemin. Comme une étoile lumineuse du matin, elle brille aux yeux de notre foi « comme un signe d’espérance et de consolation jusqu’à ce que vienne le jour du Seigneur » (Lumen gentium, n. 69). Pèlerins dans cette « vallée de larmes » nous soupirons vers elle : « Après cet exil, montre-nous Jésus, le fruit béni de ton sein, ô clémente, ô pieuse, ô douce Vierge Marie ! »

 

 

 

 


1986


24 octobre 1986 – Discours de Jean Paul II lors d’une conférence internationale sur les médicaments
     1. C’EST AVEC JOIE que je vous salue, vous tous, participants à cette Conférence internationale qui témoigne une fois de plus de l’importance que l’Eglise accorde au service des malades, de ceux qui souffrent, et à tous ceux qui ½uvrent dans le vaste domaine – délicat et complexe – de la santé et de l’hygiène. C’est un champ d’apostolat qui fait partie intégrante de la mission de l’Eglise.
     Cette Conférence est bien représentative de l’activité de la Commission pontificale pour la pastorale des services de la santé, et remercier son président, le Cardinal Eduardo Pironio, son Pro-Président, Monseigneur Fiorenzo Angelini, et leurs collaborateurs. Dans un monde où la conception même des services sociaux-sanitaires évolue considérablement, et où l’on s’aperçoit qu’ils ont des implications toujours plus complexes, il était devenu indispensable de coordonner et de promouvoir la présence de l’Eglise. Cette Conférence en est la preuve, comme aussi les autres initiatives qui ont été prises ou sont en cours de réalisation, parmi lesquelles je veux mentionner le vaste recensement de toutes les structures sanitaires de l’Eglise ; nous prenons ainsi mieux conscience de l’extension et des ramifications capillaires de cette présence et de ce service en faveur de la personne humaine soumise à l’épreuve particulière de la maladie psychophysique.
     2. Le choix du thème central de cette Conférence me semble lui aussi très approprié. Les médicaments sont en effet le moyen par lequel le médecin peut non seulement soigner mais aussi prévenir certaines maladies. Un grand nombre de celles-ci qui, dans le passé, décimaient les populations, ont aujourd’hui en grande partie disparu. D’autres peuvent être soignées beaucoup plus efficacement. Les enfants sont plus rarement marqués par les terribles déformations de la poliomyélite et du rachitisme. La chirurgie, grâce à un apport pharmacologique toujours mieux adapté, a pu connaître des progrès extraordinaires. La durée moyenne de la vie est notablement accrue. Tout cela, nous le devons surtout aux sérums, aux vaccins et à tant d’autres médicaments, aujourd’hui à notre disposition. Du moins cela vaut-il pour les pays développés.
     3. Cependant, s’il est vrai que les médicaments ont apporté d’immenses bienfaits à l’humanité, ils ont par ailleurs soulevé de graves problèmes, en partie non résolus, au sujet de leur élaboration, de leur diffusion, de leur usage et de leur accessibilité pour tous les malades quels que soient le milieu social ou le pays auquel ils appartiennent. La mise au point et la fabrication des médicaments est toujours plus complexe et plus coûteuse, et cela a des conséquences économiques et sociales évidentes. Les médicaments peuvent stimuler, ou au contraire réprimer, les fonctions de divers organes ou tissus, ou encore l’activité mentale. Ces caractéristiques les rendent utiles pour accroître la résistance à certaines maladies ou pour freiner le développement de certaines autres. Il est vrai que l’on peut s’interroger parfois sur l’opportunité, pour l’équilibre de l’organisme humain, d’une surconsommation de ces produits artificiels, en certains pays et selon la tendance de certains praticiens. Mais surtout des médicaments peuvent aussi être employés dans un but non plus thérapeutique mais pour altérer les lois de la nature au détriment de la dignité de la personne humaine. Il est donc clair que l’élaboration, la distribution et l’usage des médicaments doivent être soumis à un code de morale particulièrement rigoureux. Le respecter est le seul moyen d’éviter que les exigences liées à la production et au coût des médicaments, en soi légitimes et importantes pour leur diffusion, ne les détournent de leur sens et de leur fin.
     4. Vous vous penchez aussi, au cours de ce Congrès, sur le problème de l’expérimentation des médicaments. Dans l’état actuel des connaissances scientifiques, il n’est pas possible de prévoir avec une précision suffisante les propriétés et les caractéristiques des nouveaux médicaments. Avant donc d’être utilisés en thérapie, ils doivent être testés sur des animaux de laboratoire.   M’adressant aux participants à la Semaine d’Etudes sur l’expérimentation biologique, qui s’est déroulée en 1982 auprès de l’Académie pontificale des Sciences, j’avais déjà souligné que cette expérimentation est délicate et qu’elle doit s’effectuer dans le respect de l’animal, sans lui infliger d’inutiles souffrances. Dans un deuxième stade, avant de pouvoir être utilisés normalement, il faut encore que les médicaments soient testés sur l’homme, sur le malade et quelquefois aussi sur la personne en bonne santé. L’expérimentation clinique est désormais soumise à des lois et des normes sévères qui la réglementent et veulent offrir toutes les garanties possibles. Un jour viendra où, grâce au progrès des connaissances scientifiques, les risques et les inconnues en matière d’expérimentation des médicaments, seront notablement réduits, on peut du moins l’espérer. Mais, de toute façon, une grande prudence s’avère nécessaire pour ne jamais faire de l’homme un objet d’expérimentation, pour éviter à tout prix de mettre en danger sa vie, son équilibre, sa santé, ou aggraver son mal.
     5. Il est urgent, en même temps, de promouvoir une réelle collaboration internationale, non seulement sur le plan normatif, mais aussi dans le but de réduire et d’éliminer les différences qui existent d’un pays à l’autre.
     Parmi les problèmes restés, aujourd’hui encore, sans solution, je voudrais mentionner ceux qui concernent la situation de certains pays en voie de développement. Alors que l’accès à l’assistance sanitaire est reconnu comme un droit fondamental de l’homme, de larges portions de l’humanité sont encore privées des soins médicaux même les plus élémentaires. C’est un problème d’une telle envergure que les efforts individuels – tout aussi précieux et irremplaçables qu’ils soient – apparaissent comme insuffisants. A l’heure actuelle, il faut absolument chercher à travailler ensemble, à coordonner, au niveau international, la politique d’intervention et donc les initiatives concrètes. Nous savons combien l’Organisation Mondiale de la Santé s’y emploie et beaucoup d’autres associations et initiatives qui manifestent une solidarité sans frontières.
     Les pays développés ont le devoir de mettre à la disposition de ceux qui le sont moins, leur expérience, leur technologie et une part de leurs richesses économiques. Mais cela ne peut se faire que dans le respect de la dignité humaine des autres, sans jamais vouloir s’imposer. La protection de la santé est étroitement liée aux différents aspects de la vie : qu’il s’agisse des aspects sociaux ou économiques, de ceux qui ont trait à l’environnement ou à la culture. Elle requiert par là même une approche prudente et responsable, dans une collaboration ouverte et réciproque. Car il arrive fréquemment que les traditions locales offrent des points d’appui précieux qu’il est bon de prendre en compte et de mettre en valeur. Les chrétiens comprennent qu’il y a là un terrain capital d’entraide fraternelle, de service humble et respectueux.
     6. Dans ce contexte, nous ne pouvons oublier qu’il existe encore des médicaments qui, pour des raisons presque uniquement commerciales, ne sont pas sérieusement pris en charge et ne bénéficient pas des recherches et progrès scientifiques. Or ils sont nécessaires non seulement pour le traitement de certaines maladies rares, mais aussi pour celles qui, surtout dans les zones tropicales et pauvres, frappent des millions de personnes. A cet égard, il faut en premier lieu discerner les objectifs et leur ordre de priorité, puis voir comment les barrières économiques et politiques qui entravent la recherche, l’élaboration et la production de tels médicaments pourraient être surmontées.
     7. A tous ceux qui ½uvrent dans les services de la santé et qui doivent affronter ces problèmes difficiles et complexes, je voudrais redire ici l’encouragement de l’Eglise. La doctrine chrétienne apporte en effet en ces domaines – c’est notre conviction – une contribution très importante. Elle offre des principes sûrs pour orienter vers des solutions qui garantissent la dignité de la personne, soutiennent son progrès moral et social, développent la solidarité et, en ce sens, elle apporte une lumière et une espérance à ceux qui éprouvent des doutes, des questions angoissantes ou le découragement au regard de la pénible situation des malades et des infirmes.
     D’une part, l’Eglise partage avec les malades leur désir de guérison, de soulagement et leur espérance d’une plénitude de Vie. Elle respecte aussi le mystère de leur souffrance et les invite, surtout s’ils ont la foi, à situer leur épreuve dans le plan de Dieu, dans le plan de la Rédemption, en union avec le Christ Sauveur, qui offre une occasion d’élévation spirituelle et d’offrande dans l’amour, pour le salut du monde. C’est un mystère dont peuvent bénéficier aussi ceux qui les soignent. J’ai souvent l’occasion d’en parler aux malades.
     D’autre part, ce monde immense de la maladie est en même temps un défi offert à vos capacités de médecins, de pharmaciens, d’hommes de science, pour que vous sachiez trouver une solution scientifique et humaine au problème de la santé, sous tous les angles sous lesquels il se pose. En visitant récemment les malades et ceux qui leur prodiguent les soins dans l’église primatiale Saint-Jean, à Lyon (5 octobre 1986), j’ai encouragé en ce sens la recherche scientifique et j’ai félicité tous ceux qui sont les coopérateurs de Dieu pour la défense de la vie de leurs frères et s½urs, comme le bon Samaritain de l’Evangile. Oui, non seulement l’Eglise a constamment stimulé, dans l’esprit de l’enseignement de Jésus, la création d’½uvres de miséricorde pour les malades, mais elle tient à favoriser le progrès technique, l’amplification des connaissances, leur sage emploi ou service de l’homme. Loin de se fermer aux légitimes attentes du monde contemporain, le christianisme les met en valeur, et contribue à leur donner une réponse.
     Que cette certitude vous accompagne toujours et renforce votre engagement, quel que soit le niveau de votre activité dans les services de la santé ! C’est Dieu qui nous a donné l’intelligence et le c½ur pour mieux découvrir et mettre en ½uvre ce qui soutient et développe la vie de l’organisme humain, expression de la personne : qu’il vous affermisse dans votre recherche, dans votre service professionnel, et qu’il comble de ses Bénédictions vos personnes, vos familles et ceux qui vous sont chers !

 

1993


Message pour la Journée Mondiale du Malade 11 février 1993
Un appel à venir en aide à ceux qui souffrent
Chers Frères et S½urs,
1. La communauté chrétienne a toujours manifesté une attention particulière aux malades et au monde de la souffrance dans ses nombreuses manifestations. En fidélité à cette longue tradition, l'Eglise universelle se prépare à célébrer, dans un esprit de service renouvelé, la première Journée mondiale du Malade, occasion toute particulière pour susciter en nous une attitude d'écoute, de réflexion et d'engagement effectif, face au mystère profond de la douleur et de la maladie. Cette Journée, qui se célébrera chaque année, à partir de février prochain, en la fête de Notre-Dame de Lourdes, se propose d'être pour tous les croyants "un temps fort de prière, de partage, d'offrande de la souffrance pour le bien de l'Eglise, et une invitation à tous, à reconnaître dans le visage du frère souffrant le Visage du Christ qui par sa souffrance, sa mort et sa résurrection a opéré le salut de l'humanité" (Lettre institutionnelle de la Journée mondiale du Malade, 13 mai 1992, n. 3).
Cette Journée, par ailleurs, entend faire appel à tout homme de bonne volonté. Les demandes fondamentales posées par la réalité de la souffrance, en effet, et l'appel à procurer, sur le plan physique et spirituel, un soulagement à celui qui souffre, ne concernent pas exclusivement les croyants, mais interpellent l'humanité tout entière, concernée par les limites de la condition mortelle.
2. Nous nous préparons, malheureusement, à célébrer cette première Journée en des circonstances vraiment dramatiques pour certains: les événements de ces derniers mois, tandis qu'ils soulignent l'urgence de la prière pour implorer le secours d'En Haut, nous rappellent l'exigence de mettre en place de nouvelles et urgentes initiatives afin de venir en aide à ceux qui souffrent et qui ne peuvent attendre.
Nous avons tous sous les yeux ces images bien tristes d'individus et de peuples entiers qui, déchirés par la guerre et les conflits, succombent sous le poids de calamités qui pourraient être évitées. Comment détacher le regard de ces visages implorants de tant d'êtres humains, et surtout d'enfants, réduits à l'état de spectres en raison des adversités de tout genre où ils sont impliqués, contre leur gré, à cause de l'égoïsme et de la violence? Et comment oublier tous ceux qui dans les lieux d'hospitalisation et de soins - hôpitaux, cliniques, léproseries, centres pour handicapés, foyers de personnes âgées, ou dans leurs propres foyers - connaissent le calvaire de tourments souvent ignorés, soulagés de manière peu adaptée parfois, et même dont l'état va s'aggravant par carence d'aide adéquate?
3. La maladie, perçue au long d'une expérience quotidienne comme une frustration de la force vitale naturelle, devient pour les croyants un appel à "lire" cette situation nouvelle et douloureuse dans une optique qui est propre à la foi. En dehors de cette optique, du reste, comment découvrir au temps de l'épreuve l'apport constructif de la douleur? Comment donner un sens et un prix à l'angoisse, à l'inquiétude, aux maux physiques et psychiques qui accompagnent notre condition mortelle? Quelle justification donner au déclin de la vieillesse, et à l'instant décisif de la mort, qui, en dépit de tout progrès scientifique et technologique, persistent inexorablement?
Ce n'est que dans le Christ, Verbe incarné, Rédempteur de l'homme et vainqueur de la mort, qu'il est possible de trouver la réponse satisfaisante à des questions aussi fondamentales.
A la lumière de la mort et de la résurrection du Christ, la maladie n'apparaît plus comme un événement purement négatif, elle est envisagée comme une "visite de Dieu", comme une occasion "de libération de l'amour, en vue de donner le jour à des ½uvres d'amour en faveur du prochain, pour transformer la civilisation humaine en civilisation de l'amour" (Lettre apostolique Salvifici doloris, 30).
L'histoire de l'Eglise et de la spiritualité chrétienne nous en donne un témoignage éclatant. Au long des siècles, que de pages splendides écrites, témoignent d'un héroïsme fait de souffrances acceptées et offertes en union avec le Christ! Et que de pages, non moins admirables, tout imprégnées d'humble service des pauvres et des malades, dont la chair souffrante révèle la présence du Christ pauvre et crucifié.
4. La célébration de la Journée mondiale du Malade - dans sa préparation, son déroulement et ses objectifs - n'entend pas se contenter simplement d'une manifestation extérieure centrée sur de louables initiatives, mais elle prétend rejoindre les êtres en profondeur afin de leur faire prendre conscience de l'importance de la contribution apportée par le service humain et chrétien du souffrant pour une meilleure intelligence entre les hommes et par là même, pour l'édification de la paix véritable.
Cette célébration suppose au préalable que les pouvoirs publics accordent une attention particulière aux malades, ainsi que les Organisations internationales et toutes les personnes de bonne volonté. Ceci concerne surtout les pays en voie de développement - de l'Amérique latine à l'Afrique et à l'Asie - en proie à de graves carences sanitaires. Par la célébration de la Journée mondiale du Malade, l'Eglise veut promouvoir un engagement renouvelé envers ces populations, en vue d'éliminer l'injustice qui sévit à notre époque, et ceci par l'attribution de ressources humaines, spirituelles et matérielles plus considérables susceptibles de répondre à leurs besoins.
C'est pourquoi j'adresse un appel très particulier aux autorités civiles, aux hommes de science et à tous ceux qui ½uvrent auprès des malades. Qu'ils se gardent d'exercer leur service d'une manière purement bureaucratique ou quelconque! Qu'il soit bien clair, à leurs yeux, que la gestion des deniers publics impose le devoir grave d'en éviter le gaspillage et l'usage inconsidéré, afin que que les ressources disponibles, administrées en toute sagesse et équité assurent la prévention des maladies et l'assistance en cas de maladie à ceux qui en ont réellement besoin.
L'attente très vive, à notre époque, d'une humanisation de la médecine et de l'assistance de santé, exige une réponse plus catégorique. Or, pour une assistance sanitaire plus humaine et plus adaptée, il est fondamental de s'en référer à une vision transcendante de l'homme, qui sache mettre en lumière chez le malade, image de Dieu et fils de Dieu, le prix de la vie et son caractère sacré. La maladie et la douleur concernant tous les humains, l'amour envers les souffrants devient alors signe et mesure du degré de civilisation et de progrès d'un peuple.
5. A vous tous, chers malades, de toutes les parties du monde, protagonistes de cette Journée mondiale, que cette occasion soit pour nous une annonce de la présence vivante et réconfortante du Seigneur. Vos souffrances, accueillies dans la foi et confortées par cette même foi inébranlable, unies à celles du Christ représentent une valeur incommensurable pour la vie de l'Eglise et pour le bien de l'humanité.
Quant à vous tous, personnels de santé, appelés à donner un témoignage méritoire et exemplaire de justice et d'amour, que cette Journée soit une invitation pressante à poursuivre votre délicat service dans une ouverture généreuse aux valeurs profondes de la personne, dans le respect de la dignité humaine et dans la défense de la vie depuis son premier instant jusqu'à son terme naturel!
Aux pasteurs du peuple chrétien, à toutes les différentes composantes de la communauté ecclésiale, aux bénévoles et en particulier à ceux qui sont engagés dans la pastorale de la santé, que cette première Journée mondiale du Malade soit un stimulant et un encouragement à poursuivre avec un engagement renouvelé la voie du service envers l'homme éprouvé et souffrant!
6. En la fête de Notre-Dame de Lourdes, dont le sanctuaire au pied des Pyrénées semble un temple de la souffrance humaine, avec la Vierge Marie - comme Elle, sur le Calvaire où se dressait la croix de son Fils - nous nous tenons près des croix faites de la douleur et de la solitude de tant de frères et de s½urs que nous voulons réconforter, dont nous voulons partager la souffrance pour la présenter au Seigneur de la Vie, en communion spirituelle avec l'Eglise tout entière.
Que Marie, "Santé des Infirmes" et "Mère des vivants", soit notre soutien et notre espérance, et que par la célébration de la Journée du Malade, elle fasse grandir notre sensibilité et notre dévouement envers ceux qui sont dans l'épreuve, ainsi que l'attente fidèle du jour lumineux de notre salut, quand toute larme sera essuyée de nos yeux à jamais (cf. Is 25, 8). Dès ce jour qu'il nous soit permis de jouir des prémisses de cette joie surabondante, même au sein des tribulations (cf. 2 Co 7, 4), joie promise par le Christ et que personne ne pourra nous enlever (cf. Jn 16, 22).
A tous, ma Bénédiction apostolique!
Du Vatican, 21 octobre 1992.

 

 

 


1994

 


Message pour le IIème Journée Mondiale du Malade, 11 février 1984 - La souffrance, instrument de rédemption
A vous, chers frères et s½urs, qui portez dans votre corps et dans votre âme les signes de la souffrance humaine, j'adresse mes pensées les plus affectueuses, en cette occasion toute particulière de la IIe Journée mondiale du Malade.
Je vous salue tout particulièrement, vous les malades, qui avez la grâce de la foi en Jésus-Christ, Fils du Dieu vivant, fait homme dans le sein de la Vierge Marie. En lui, crucifié et ressuscité pour le salut des hommes, vous trouvez la force de vivre votre souffrance comme une "douleur salvifique".
Je voudrais pouvoir rencontrer chacun de vous, en tout lieu de la terre, pour vous bénir au nom du Seigneur qui est passé "faisant le bien et guérissant" les malades (Ac 10, 38). Je voudrais être là, près de vous, pour vous consoler dans vos peines, pour soutenir votre courage, nourrir votre espérance afin que chacun fasse de sa vie un don d'amour au Christ pour le bien de l'Eglise et du monde.
Comme la Vierge Marie au pied de la Croix (cf. Jn 19, 25), je voudrais m'arrêter auprès du calvaire de tant de frères et de s½urs qui en ce moment sont déchirés par des guerres fratricides, souffrent dans les hôpitaux et portent le deuil des leurs, victimes de la violence. La Journée mondiale du Malade trouve cette année son point culminant dans sa célébration solennelle au Sanctuaire marial de Czestochowa, pour implorer par la maternelle intercession de la Bienheureuse Vierge Marie, le don de la paix ainsi que le réconfort spirituel et corporel des malades et des souffrants qui offrent en silence leurs sacrifices à la Reine de la paix.
2. A l'occasion de la Journée mondiale du Malade, je voudrais attirer l'attention des malades, des agents du monde de la santé, des chrétiens et de tous les hommes de bonne volonté, sur le thème de la "douleur salvifique", c'est-à-dire sur le sens chrétien de la souffrance, sur lequel je me suis arrêté dans la Lettre apostolique Salvifici doloris publiée il y a dix ans, le 11 février.
Comment peut-on parler de douleur salvifique? La souffrance n'est-elle pas un obstacle au bonheur et une raison d'éloignement de Dieu? Sans doute, il existe des souffrances qui, sur le plan humain, apparaissent dépourvues de sens.
En réalité, si le Seigneur Jésus, Verbe incarné, a proclamé "Heureux les affligés" (Mt 5, 5), c'est parce qu'il existe un point de vue plus élevé, celui de Dieu, qui nous appelle tous à la vie, même à travers la douleur et la mort, à son Règne éternel d'amour et de paix.
Heureux celui qui parvient à faire resplendir la lumière de Dieu dans les ténèbres d'une vie marquée par la souffrance ou l'infirmité!
3. Pour obtenir cette lumière sur la douleur, nous devons tout d'abord écouter la Parole de Dieu, contenue dans la Sainte Ecriture, et qui peut se définir ainsi: "un grand livre sur la souffrance" (Salvifici doloris, 6). En elle, en effet, nous trouvons "une grande liste de situations douloureuses pour l'homme" (ibid., 7), l'expérience du mal multiforme qui suscite inévitablement le "pourquoi"? (ibid., 9).
Cette demande a trouvé dans le livre de Job son expression la plus dramatique ainsi qu'une première réponse partielle. La condition de cet homme juste, éprouvé de tant de manières en dépit de son innocence, manifeste "qu'il n'est pas vrai que toute souffrance soit la conséquence d'une faute et ait un caractère de châtiment" (ibid., 11). La réponse pleine et définitive à Job, c'est le Christ. "Ce n'est que dans le Mystère du Verbe incarné que se trouve la vraie lumière sur l'homme" (Gaudium et spes, 22), ainsi en est-il de la solution complète et définitive des problèmes humains comme celui de la douleur. Dans le Christ, la douleur elle-même est assumée dans le mystère de la charité infinie, qui est irradiée par le Dieu Trinité, et qui devient l'expression d'amour et l'instrument de rédemption, c'est-à-dire douleur salvifique.
C'est le Père, en effet, qui choisit le don total du Fils comme moyen de restauration de l'alliance avec les hommes rendue inefficace par le péché: "Dieu a tant aimé le monde qu'il lui a donné son Fils unique, afin que celui qui croit en lui ne meure pas mais ait la vie éternelle" (Jn 3, 16).
C'est le Fils qui "s'achemine vers sa propre souffrance, conscient de sa force salvifique, en obéissance au Père, mais avant tout, uni au Père en cet amour même dont le Père a aimé le monde et l'homme dans le monde" (Salvifici doloris, 16).
C'est l'Esprit Saint qui par la bouche des Prophètes, annonça les souffrances embrassées volontairement par le Messie en faveur des hommes et en quelque sorte à leur place: "Or ce sont nos souffrances qu'il portait et nos douleurs dont il était chargé... Yahvé a fait retomber sur lui nos fautes à tous" (Is 53, 4-6).
4. Admirons, frères et s½urs, le dessein d'amour de la Sagesse divine! "Le Christ s'est fait proche de la souffrance humaine surtout en prenant sur lui-même cette souffrance" (Salvifici doloris, 16): il s'est fait en tout semblable à nous, excepté le péché (Cf. He 4, 15; 1 P 2, 22), il a assumé la condition humaine avec ses limites, y compris la mort (Cf. Ph 2, 7-8), et même, il a offert sa vie pour nous (Cf. Jn 10, 17; 1 Jn 3, 16; 2, 23) afin que nous vivions de la vie nouvelle dans l'Esprit (Cf. Rm 6, 4; 8, 9-11).
Il arrive parfois que sous le poids d'une douleur aiguë et insupportable, on adresse à Dieu un reproche en l'accusant d'injustice; mais la plainte meurt sur les lèvres de celui qui contemple le Crucifié qui souffre "volontairement bien qu'innocent" (ibid, 17-18). On ne peut adresser de reproche à un Dieu solidaire des souffrances humaines.
5. La révélation parfaite de la valeur salvifique de la souffrance, c'est la Passion du Seigneur: "Dans la croix du Christ non seulement s'accomplit la rédemption par la souffrance, mais la souffrance elle-même est rachetée" (ibid., 19). En souffrant, Jésus "a ouvert sa souffrance à l'homme" et l'homme recouvre dans le Christ ses propres souffrances "enrichies d'un nouveau contenu et d'un sens nouveau" (ibid., 20).
Toutes les peines de la vie peuvent être signes et prémices de la gloire future "dans la mesure où vous participez aux souffrances du Christ - nous exhorte la première Lettre de Pierre - réjouissez-vous, afin que lors de la révélation de sa gloire, vous soyez aussi dans la joie et l'allégresse" (1 P 4, 13).
6. Vous savez, par expérience, chers malades, que dans votre situation vous avez besoin davantage d'exemples que de paroles. Oui, nous avons tous besoin de modèles qui nous entraînent sur la voie de la sanctification de la souffrance.
En cette Fête de Notre-Dame de Lourdes, regardons vers Marie, Icône vivante de l'Evangile de la souffrance.
Reparcourez en esprit tous les événements de sa vie. Vous trouverez Marie dans la pauvreté de la maison de Nazareth, dans l'humiliation de la crèche de Bethléem, dans la fuite en terre d'Egypte, au service d'un travail humble et béni avec Jésus et Joseph.
C'est surtout, après la prophétie de Siméon qui lui prédit la participation de la Mère aux souffrances de son Fils (Lc 2, 34), que Marie expérimente dans la profondeur de son c½ur un mystérieux présage de douleur.
La Mère de Jésus fut préservée du péché, mais non pas de la souffrance. C'est pourquoi, le peuple chrétien s'identifie à la Vierge des Douleurs, découvrant dans ses souffrances, sa propre souffrance. En la contemplant, chaque fidèle est introduit plus intimement dans le mystère du Christ et de sa souffrance salvifique.
Essayons d'entrer en communion avec le C½ur Immaculé de la Mère de Jésus, en lequel a trouvé écho, d'une manière unique et incomparable, la douleur de son Fils pour le salut du monde. Accueillons Marie, constituée mère spirituelle de ses disciples par le Christ mourant, et confions-nous à elle pour demeurer fidèles à Dieu dans notre itinéraire du baptême à la gloire.
7. Je m'adresse maintenant à vous, agents du monde de la santé, médecins, infirmiers et infirmières, aumôniers et religieuses, membres du personnel technique et administratif, assistants sociaux et amis du bénévolat.
Comme le Bon Samaritain, soyez aux côtés et au service de ceux qui souffrent en découvrant en eux la présence de Jésus et son visage souffrant. Gardez-vous de l'indifférence qui pourrait venir de l'accoutumance; renouvelez chaque jour l'engagement de vous montrer le frère de tous sans discrimination aucune; mettez du "c½ur" dans votre contribution irremplaçable de professionnalisme et dans l'adéquation des structures, c'est le seul moyen de les humaniser (cf. Salvifici doloris, 29).
8. Enfin, je m'adresse à vous, responsables des nations, afin que vous considériez la santé comme un problème prioritaire sur le plan mondial.
Et parmi les finalités de la Journée mondiale du malade, il y a celle qui consiste à mener une ½uvre de vaste sensibilisation envers les inéluctables et graves problèmes concernant la santé et les structures de santé. Les deux-tiers de l'humanité manquent encore de l'assistance indispensable en matière de santé et les ressources employées dans ce secteur sont encore par trop insuffisantes. Que le programme de l'Organisation mondiale de la Santé ("Santé pour tous en l'an 2000"), qui pourrait sembler un mirage, soit au contraire une incitation à une compétition de solidarité effective. Les extraordinaires progrès de la science et de la technique, le développement des moyens de communication de masse ont créé des conditions de prise de conscience et de coopération susceptibles de rendre cette espérance toujours plus consistante.
9. Très chers malades, soutenus par votre foi, affrontez le mal sous toutes ses formes sans jamais vous décourager et sans vous abandonner au pessimisme. Accueillez la possibilité offerte par le Christ du transformer cet état de maladie et de souffrance en action de grâce et d'amour. Alors, votre souffrance deviendra salvifique et complètera mystérieusement les souffrances du Christ en faveur de son corps qui est l'Eglise (cf. Co 1, 24).
A vous tous, agents du monde de la santé, à ceux qui se dévouent au service de ceux qui souffrent, mes souhaits de grâce et de paix, de santé et de salut, de force vitale, d'engagement assidu et d'espérance indéfectible! Avec la maternelle assistance de la Vierge Sainte, Salus Infirmorum, que vous accompagne et vous réconforte sans cesse mon affectueuse Bénédiction!
Du Vatican, le 8 décembre 1993.

 

 

 

 

1995

 

 


Message du Pape Jean Paul II pour la IIIème Journée Mondiale du Malade, 11 février 1995
1. Les gestes de salut de Jésus à l'égard de « tous ceux qui étaient prisonniers du mal » (Missel romain, Préf. com. VII) ont toujours trouvé un prolongement significatif dans la sollicitude de l'Église à l'égard des malades. À tous ceux qui souffrent, elle manifeste de multiples manières son attention : ainsi, dans le contexte actuel, l'institution de la Journée mondiale des malades revêt une grande importance. Cette initiative, qui a rencontré un large accueil auprès de ceux qui ont à coeur la condition de ceux qui souffrent, vise à donner un élan nouveau à l'action pastorale et caritative de la communauté chrétienne, pour assurer une présence de celle-ci toujours plus efficace et plus nette dans la société.
C'est là une exigence particulièrement ressentie à notre époque, qui voit des populations entières éprouvées par d'immenses souffrances, conséquences de cruels conflits dont souvent ceux qui sont les plus faibles ont dû payer le prix le plus élevé. Comment ne pas reconnaître que notre civilisation « devrait se rendre compte qu'elle est, à divers points de vue, une civilisation malade, qui provoque de profondes altérations chez l'homme? » (Lettre aux familles, 20).
Elle est malade à cause de l'égoïsme qui sévit, de l'utilitarisme individualiste souvent proposé comme modèle de vie, de la négation ou de l'indifférence que, souvent, on manifeste en ce qui concerne le destin transcendant de l'homme, de la crise des valeurs spirituelles et morales, qui préoccupe tellement l'humanité. La « pathologie » de l'esprit n'est pas moins dangereuse que la « pathologie » physique, et elles exercent une influence l'une sur l'autre.
2. Dans mon Message pour la Journée mondiale des malades en février dernier, j'ai voulu rappeler le dixième anniversaire de la publication de ma Lettre apostolique Salvifici doloris, qui traite de la signification chrétienne de la souffrance humaine. Dans les circonstances actuelles, je voudrais attirer l'attention sur le dixième anniversaire, tout proche, d'un autre événement ecclésial, particulièrement important pour la pastorale des malades. En effet, par le « motu proprio » Dolentium hominum, du 11 février 1985, j'ai institué la Commission pontificale, devenue par la suite le Conseil pontifical, pour la Pastorale des Services de la Santé qui, par de multiples initiatives, « manifeste la sollicitude de l'Église pour les malades, en apportant son aide à ceux qui assurent le service des malades et à ceux qui souffrent, afin que l'apostolat de la miséricorde auquel ils se livrent réponde toujours mieux aux nouvelles exigences » (Const. apost. Pastor Bonus, art. 152).
Le rendez-vous le plus important de la prochaine Journée mondiale des malades, que nous célébrerons le 11 février 1995, aura lieu en terre africaine, près du sanctuaire de Marie Reine de la Paix, à Yamoussoukro, en Côte-d'Ivoire. Ce sera une rencontre ecclésiale liée spirituellement à l'Assemblée spéciale pour l'Afrique du Synode des évêques; ce sera en même temps l'occasion de participer à la joie de l'Église ivoirienne, qui célèbre le centenaire de l'arrivée des premiers missionnaires.
Se retrouver pour un anniversaire si important sur le continent africain, et en particulier au sanctuaire marial de Yamoussoukro, incite à réfléchir au rapport entre souffrance et paix. Il s'agit d'un rapport très profond : quand la paix n'existe pas, la souffrance déferle et la mort élargit son pouvoir sur les hommes. Dans la communauté sociale, comme dans la communauté familiale, l'absence d'entente pacifique se traduit par la prolifération des attentats contre la vie, alors que le service de la vie, sa promotion et sa défense, y compris au prix du sacrifice personnel, constituent la prémisse indispensable d'une authentique construction de la paix individuelle et sociale.
3. Au seuil du troisième millénaire, la paix est, malheureusement, encore lointaine, et nombreux sont les symptômes d'un possible éloignement de cette paix à l'avenir. L'identification des causes et la recherche des remèdes semblent souvent difficiles. Il arrive que de sanglantes luttes fratricides se déroulent même entre chrétiens. Mais tous ceux qui se mettent à l'écoute de l'Évangile avec un coeur ouvert ne peuvent pas ne pas se souvenir et rappeler aux autres l'invitation au pardon et à la réconciliation. Sur l'autel de la prière quotidienne et implorante, ils sont appelés, avec les malades de toutes les parties du monde, à présenter l'offrande de la souffrance que le Christ a acceptée comme moyen de racheter l'humanité et la sauver.
La Croix du Christ, par laquelle nous avons tous été sauvés, est source de paix. Appelé à l'union avec le Christ (cf. Col 1, 24) et à souffrir comme le Christ (cf. Lc 9, 23; 21, 12-19; Jn 15, 18-21), le chrétien, par l'acceptation et l'offrande de la souffrance, annonce la force constructrice de la Croix. En effet, si la guerre et la division sont le fruit de la violence et du péché, la paix est le fruit de la justice et de l'amour, qui ont leur sommet dans l'offrande généreuse de la souffrance que l'on éprouve, poussée – si nécessaire – jusqu'au don de sa vie en union avec le Christ. « Plus l'homme est menacé par le péché, plus sont lourdes les structures de péché que le monde actuel porte en lui-même, et plus est éloquente la souffrance humaine en elle-même. Et plus aussi l'Église éprouve le besoin de recourir à la valeur des souffrances humaines pour le salut du monde » (Salvifici doloris, 27).
4. La valorisation de la souffrance et son offrande pour le salut du monde sont déjà en soi une action et une mission de paix, car du témoignage courageux des faibles, des malades et de ceux qui souffrent peut naître la plus haute contribution qui soit à la paix. En effet, la souffrance appelle une communion spirituelle plus profonde en favorisant, d'une part, le retour à une meilleure qualité de vie, et en promouvant, d'autre part, un engagement convaincu pour établir la paix entre les hommes.
Le croyant sait que, en s'associant aux souffrances du Christ, il devient un authentique artisan de paix. C'est là un mystère insondable, mais dont on peut constater les fruits évidents tout au long de l'histoire de l'Église et, plus particulièrement, dans la vie des saints. S'il existe une souffrance qui provoque la mort, il y a aussi, selon le plan de Dieu, une souffrance qui mène à la conversion et à la transformation du c½ur de l'homme (cf. 2 Co 7, 10) : c'est la souffrance qui, en tant que complément dans sa propre chair à « ce qui manque » à la Passion du Christ (cf. Col 1, 24), devient cause et source de joie, parce qu'elle est génératrice de vie et de paix.
5. Bien chers frères et s½urs qui souffrez dans votre corps et votre esprit, je vous souhaite à tous de savoir reconnaître et accueillir l'appel de Dieu à être des artisans de paix par l'of frande de votre souffrance. Il n'est pas facile de répondre à un appel aussi exigeant. Regardez toujours avec confiance vers Jésus « Serviteur souffrant », en lui demandant la force de transformer en don l'épreuve qui vous afflige. Écoutez avec foi sa voix qui redit à chacun d'entre vous : « Venez à moi, vous tous qui peinez et ployez sous le fardeau, et moi je vous soulagerai » (Mt 11, 28).
Que la Vierge Marie, Mère, Notre-Dame des Douleurs et Reine de la Paix, obtienne pour tout croyant le don d'une foi solide, dont le monde a un extrême besoin. Grâce à elle, en effet, les forces du mal, de la haine et de la discorde seront désarmées par le sacrifice des faibles et des malades, unis au mystère pascal du Christ rédempteur.
6. Je m'adresse maintenant à vous, médecins, infirmier(e)s, membres d'associations et de groupes de volontariat, qui êtes au service des malades. Votre travail sera un authentique témoignage et une action concrète de paix si vous êtes disponibles pour donner un véritable amour à ceux avec qui vous êtes en contact et si, comme croyants, vous savez honorer en eux la présence du Christ lui-même. Cette invitation s'adresse d'une manière toute spéciale aux prêtres, aux religieux et aux religieuses qui, à cause du charisme de leur Institut ou par une forme particulière d'apostolat, sont directement engagés dans la pastorale de la santé.
En vous disant combien j'apprécie tout ce que vous faites avec abnégation et un don généreux de vous-mêmes, je souhaite que tous ceux qui exercent les professions médicales et paramédicales le fassent avec enthousiasme et une généreuse disponibilité, et je prie le Maître de la moisson qu'il envoie de nombreux et saints ouvriers travailler dans le vaste champ de la santé, si important pour l'annonce et le témoignage de l'Évangile.
Que Marie, Mère de ceux qui souffrent, soit aux côtés de tous ceux qui sont dans l'épreuve et qu'elle soutienne l'effort de ceux qui consacrent leur existence au service des malades.
Avec ces sentiments, je vous accorde de tout coeur, très chers malades, ainsi qu'à tous ceux qui sont à vos côtés d'une manière ou d'une autre dans vos multiples besoins matériels et spirituels, une spéciale bénédiction apostolique.
Du Vatican, le 21 novembre 1994, en la dix-septième année de mon Pontificat.

 

 

 


1996

 

Message pour le Journée Mondiale du Malade, 11 février 1996 - L'amour de Marie qui soulage
1. "Ne t'inquiète ni de cette maladie ni d'aucune autre disgrâce! Ne suis-je pas là, moi, ta Mère? N'es-tu pas à l'abri à mon ombre? Ne suis-je pas pour toi la santé?". Ce sont là les paroles que recueillit, des lèvres de la Très Sainte Vierge, l'humble indigène Juan Diego de Cuautilan, en décembre 1531, au pied de la colline de Tepeyac, aujourd'hui de Guadalupe, alors qu'il implorait la guérison de l'un des siens.
Tandis que l'Eglise, en cette bien-aimée nation mexicaine, rappelle le premier centenaire du couronnement de la vénérable image de Notre-Dame de Guadalupe (1895-1995), le choix de ce célèbre sanctuaire de Mexico, comme lieu de célébration la plus solennelle de la prochaine Journée mondiale du Malade, le 11 février 1996, revêt une signification particulière.
Cette Journée se situe au c½ur de la période de préparation (1994-1996) du Troisième millénaire chrétien dont l'objectif est de "raviver chez le peuple chrétien la valeur et le sens que doit revêtir le Jubilé de l'an 2000 dans l'histoire des hommes" (Tertio millenio adveniente, n. 31). L'Eglise tourne son regard avec confiance vers les événements de notre temps et parmi "les signes d'espérance de cette fin de siècle" elle reconnaît le chemin parcouru "par la science et la technique, et surtout par la médecine au service de la vie humaine" (ibid., n. 46). C'est sous le signe de l'espérance, illuminée par la présence de la Vierge Marie, Santé des malades, qu'en vue de la préparation de la IV Journée mondiale du Malade, je m'adresse à tous ceux qui sont marqués dans leur âme et dans leur corps des signes de la souffrance humaine, ainsi qu'à tous ceux qui sont à leur service en esprit fraternel, entendant ainsi être parfaitement à la suite du Rédempteur. En effet: "Comme le Christ [...] a été envoyé par le Père pour porter la bonne nouvelle aux pauvres, pour guérir ceux qui ont le c½ur brisé" (cf. Lc 4, 18), "chercher et sauver ce qui était perdu" (cf. Lc 19, 10), "de même l'Eglise entoure de sa sollicitude tous ceux qu'afflige l'infirmité humaine; bien plus, elle reconnaît dans les pauvres et en ceux qui souffrent l'image de son Fondateur pauvre et souffrant, elle s'emploie à soulager leur détresse" (Lumen gentium, n. 8).
2. Bien chers frères et s½urs, vous qui êtes éprouvés de manière particulière par la souffrance, vous êtes appelés à une mission particulière au sein de la nouvelle évangélisation, sous l'inspiration de Marie, Mère de l'amour et de la douleur humaine. Que les professionnels de la santé vous soutiennent en ce témoignage si délicat, ainsi que les membres de votre famille, les bénévoles qui vous accompagnent au long de votre cheminement quotidien dans la voie de l'épreuve. Ainsi que je l'ai rappelé dans la Lettre apostolique Tertio millennio adveniente, "la Très Sainte Vierge sera présente en filigrane, pourrait-on dire, tout au long de la phase préparatoire" du Grand Jubilé de l'an 2000 "comme modèle parfait de l'amour, envers Dieu et envers le prochain", elle nous mettra à l'écoute de sa voix maternelle qui nous redit: "Faites tout ce que le Christ vous dira" (cf. Tertio millennio adveniente, n. 43.54).
En accueillant cette invitation du c½ur de Marie, Santé des Malades, il vous sera possible d'imprimer à la nouvelle évangélisation un caractère particulier d'annonce de l'Evangile de la vie, sur un mode mystérieux par le témoignage de l'Evangile de la souffrance (cf. Evangelium vitae, 1; Salvifici doloris, 3). "Une pastorale de la santé, parfaitement organisée relève de l'évangélisation" (Discours à la IV Assemblée plénière de la Commission pontificale pour l'Amérique latine, 8; 23 juin 1995).
3. La Mère de Jésus est notre guide et notre modèle dans cette annonce efficace, car "elle se place entre son Fils et les hommes dans les situations de privations, d'indigence et de souffrance. Elle se situe au c½ur, en médiatrice, en sa qualité de mère, bien consciente, qu'en tant que telle, elle peut - et même, elle a le droit - de présenter à son Fils les besoins des hommes. Sa médiation a donc un caractère d'intercession: Marie intercède pour les hommes. Non seulement, mais en tant que Mère elle désire aussi que se manifeste la puissance messianique de son Fils, c'est-à-dire, cette puissance salvifique destinée à venir en aide à l'infortune humaine, à libérer l'homme du mal qui sous toutes ses formes pèse sur sa vie" (Redemptoris mater, 21).
Cette mission rend perpétuellement présente dans la vie de l'Eglise, la Santé des Malades, qui est encore, de nos jours, comme à la naissance de l'Eglise, (Ac 1, 14) "le modèle de cet amour maternel, dont doivent être animés tous ceux qui, associés à la mission apostolique de l'Eglise, coopèrent à la régénération des hommes" (Lumen gentium, 65).
La célébration du moment le plus solennel de la Journée mondiale du Malade au sanctuaire de Notre-Dame de Guadalupe, relie de manière idéale la première évangélisation du Nouveau Monde à la nouvelle évangélisation. L'Evangile a été annoncé aux populations de l'Amérique latine, en effet, "en présentant la Vierge comme sa réalisation la plus élevée... Le visage métis de la Vierge Marie de Guadalupe, qui se dresse à l'aube de l'évangélisation, est le symbole lumineux de cette identité (Document de Puebla, 1979, 282. 446). C'est pourquoi, depuis cinq siècles, dans le Nouveau Monde, la Très Sainte Vierge est vénérée comme "première évangélisatrice de l'Amérique latine", comme "étoile de l'évangélisation" (Lettre aux religieux de l'Amérique latine pour le V centenaire de l'évangélisation du Nouveau Monde, 31).
4. Dans l'accomplissement de sa tâche missionnaire, l'Eglise, soutenue et confortée par l'intercession de la Très Sainte Vierge Marie, a écrit des pages toutes de sollicitude à l'adresse des malades et des personnes souffrantes de l'Amérique latine. Aujourd'hui, encore, la pastorale de la santé occupe une place importante dans l'½uvre apostolique de l'Eglise: elle a de nombreux centres de service d'urgence et de soins et elle s'active auprès des plus déshérités avec une sollicitude très appréciée dans le domaine sanitaire, grâce à l'engagement généreux de tant de nos frères dans l'épiscopat, de prêtres, de religieux et religieux et de nombreux fidèles du laïcat, lesquels ont développé une sensibilité remarquable envers les personnes marquées par la douleur.
Lorsque le regard s'étend de l'Amérique jusqu'aux confins du monde, il mesure les innombrables preuves de l'attention maternelle de l'Eglise envers les malades. Aujourd'hui encore, et surtout aujourd'hui, il est hors de doute que s'élève de l'humanité le gémissement des foules éprouvées par la souffrance. Des populations entières sont déchirées par la cruauté de la guerre. Les victimes du conflit qui sévit actuellement, sont surtout les plus faibles: les mères, les enfants, les vieillards. Combien d'êtres humains, épuisés par la faim et la maladie, ne peuvent prétendre aux formes d'assistance les plus élémentaires. Et là, où elles sont assurées, combien d'entre eux, tenaillés par la peur et le désespoir, se trouvent dans l'incapacité de donner un sens positif à leur propre souffrance à la lumière de la foi.
Les efforts louables et parfois héroïques de tant de professionnels de la santé et l'apport croissant de personnes bénévoles ne suffisent pas pour couvrir les nécessités de fait. Je demande au Seigneur de vouloir bien susciter davantage encore de personnes généreuses, susceptibles de procurer à qui est en proie à la souffrance, le réconfort non seulement d'une assistance corporelle, mais aussi celui d'une aide spirituelle, en mesure de lui ouvrir les perspectives consolantes de la foi.
5. Bien chers malades, et vous tous, parents et personnels de santé qui en partagez le douloureux cheminement, ayez conscience d'être les protagonistes du renouveau évangélique dans l'itinéraire spirituel vers le Grand Jubilé de l'an 2000. Au sein de cet ensemble de formes anciennes et nouvelles d'agression à la vie qui caractérisent l'histoire de notre époque, vous êtes comme la foule qui cherchait à toucher le Seigneur "parce qu'une force sortait de lui et les guérissait tous" (Lc 6, 19). Et c'est précisément devant cette multitude que Jésus prononça le Discours sur la Montagne, proclamant bienheureux ceux qui pleuraient (cf. Lc 6, 21). Souffrir et se tenir aux côtés de celui qui souffre: quiconque vit dans la foi ces deux situations, entre en contact intime avec les souffrances du Christ et est appelé à partager "une petite partie très particulière du trésor infini de la rédemption du monde" (Salvifici doloris, n. 27).
6. Bien chers frères et s½urs qui êtes éprouvés, offrez généreusement votre souffrance en communion avec le Christ souffrant et la Vierge Marie sa très tendre Mère! Quant à vous, qui vous dévouez chaque jour auprès des personnes qui souffrent, faites de votre service une précieuse contribution à l'évangélisation! Sentez-vous partie prenante de l'Eglise, car c'est en vous que la communauté chrétienne est appelée à se confronter avec la croix du Christ, afin de rendre au monde raison de son espérance évangélique (cf. 1 P 3, 15)! "Et nous vous demandons, à vous tous qui souffrez, de nous aider. A vous précisément qui êtes faibles, nous demandons de devenir une source de force pour l'Eglise et pour l'humanité. Dans le terrible combat entre les forces du bien et du mal dont le monde contemporain nous offre le spectacle, que votre souffrance unie à la Croix du Christ soit victorieuse!" (Salvifici doloris, 31).
7. Mon appel s'adresse également à vous, Pasteurs des communautés ecclésiales, et à vous aussi, responsables de la pastorale de la santé, afin que grâce à une formation adéquate, vous vous apprêtiez à célébrer la prochaine Journée mondiale du Malade par des activités aptes à sensibiliser le peuple de Dieu et la société civile elle-même, aux problèmes immenses et complexes de la santé et des structures de santé.
Quant à vous, les professionnels de la santé - médecins, pharmaciens, infirmiers, infirmières, aumôniers, religieux et religiuses, administrateurs et bénévoles - et particulièrement vous, les femmes, pionnières du service sanitaire et spirituel en faveur des malades, soyez tous des promoteurs de communion entre les malades eux-mêmes, et entre leurs familles et la communauté ecclésiale.
Soyez aux côtés des malades et de leurs familles, afin que ceux qui traversent l'épreuve ne se sentent jamais marginalisés. L'expérience de la souffrance deviendra ainsi pour tous l'école du don de soi dans la générosité.
8. J'étends volontiers mon appel aux responsables civils, à tous les niveaux, afin qu'ils trouvent, dans la sollicitude de l'Eglise et dans son engagement dans le monde de la souffrance, une occasion de dialogue, de rencontre et de collaboration en vue de l'édification d'une civilisation qui, à partir de l'attention à la personne souffrante, s'achemine toujours davantage sur la voie de la justice, de la liberté, de l'amour et de la paix. Sans la justice, le monde ne connaîtra jamais la paix; sans la paix, la souffrance ne peut que s'étendre à l'infini.
Sur tous ceux qui souffrent, et sur tous ceux qui se prodiguent auprès d'eux, j'invoque l'aide maternelle de la Vierge Marie. Que la Mère de Jésus, vénérée depuis des siècles, dans le célèbre sanctuaire de Notre-Dame de Guadalupe, écoute le cri de tant de souffrances, essuie les larmes de qui est dans la douleur, et soit auprès de tous les malades du monde! Bien chers malades, que la Vierge très Sainte présente à son Fils l'offrande de vos peines, où se reflète le Visage du Christ en croix!
J'accompagne ce souhait de l'assurance de ma fervente prière, tandis que de tout c½ur je donne à tous la Bénédiction apostolique.
IOANNES PAULUS PP. II

 

 


- le 6 septembre 1996, en Hongrie. ORLF 17.9.1996
     La condition de la maladie est ambivalente : d’une part, en limitant la personne de différentes façons, elle la conduit à faire l’expérience de ses propres limites et de sa fragilité; de l’autre, en la mettant en contact plus direct avec la Croix du Christ, elle l’enrichit de nouvelles possibilités. En offrant au Christ ses propres souffrances, le malade peut apporter une contribution personnelle, à son oeuvre rédemptrice et participer activement à l’édification de l’Église.

 

 

 


1997

 

 

Message de Jean Paul II, pour la Journée Mondiale du Malade, 11 février 1997
1. La prochaine Journée Mondiale du Malade sera célébrée le 11 février 1997 auprès du Sanctuaire de Notre Dame de Fatima, au c½ur de la noble Nation portugaise. Le lieu choisi revêt pour moi une signification particulière. C'est là, en effet, que j'ai voulu me rendre en l'anniversaire de l'attentat à ma personne en la Place Saint Pierre pour remercier la divine Providence, dont le dessein insondable avait fait coïncider cet évènement dramatique avec l'anniversaire de la première apparition de la Mère de Jésus, le 13 mai 1917, à la Cova da Iria.
Je suis heureux, qu'à Fatima se déroule la célébration officielle de la Journée du Malade qui me tient particulièrement à c½ur. Cette journée offrira à chacun l'occasion de se mettre de nouveau à l'écoute du message de la Vierge, dont l'élément fondamental est "l'appel à la conversion et à la pénitence, comme dans l'Évangile. Cet appel a été formulé au début du vingtième siècle, il s'adresse donc à notre siècle très particulièrement. Il semble que la Dame du message ait su lire, avec une perspicacité particulière, les signes des temps, les signes de notre temps" (Allocution à Fatima, 13 mai 1982, in Insegnamenti, V/2 [1982], p. 1580).
En écoutant la très Sainte Vierge, il nous sera donné de redécouvrir de manière authentique et vivante sa mission dans le mystère du Christ et de l'Église : mission qui se trouve déjà indiquée dans l'Évangile, lorsque Marie sollicite de Jésus le premier de ses miracles, en disant aux serviteurs au cours du repas nuptial à Cana en Galilée " Tout ce qu'il vous dira, faites-le" (Jn 2, 5).À Fatima, Elle s'est fait l'écho d'une parole précise, prononcée par son Fils au début de sa mission publique : " Le temps est accompli...; repentez-vous et croyez à l'Évangile" (Mc 1, 15). L'invitation insistante de la très Sainte Vierge Marie à la pénitence n'est que la manifestation de sa sollicitude maternelle envers la condition de la famille humaine, en demande de conversion et de pardon.
2. À Fatima, Marie se fait également la messagère d'autres paroles de Jésus. À la Cova da Iria, particulièrement, revient en écho l'invitation du Christ : "Venez à moi, vous tous qui peinez et ployez sous le fardeau, et moi je vous soulagerai" (Mt 11, 28). Les foules de pèlerins qui, de toutes les parties du monde, accourent en cette terre bénie ne sont-ils pas un témoignage éloquent du besoin de soulagement et de réconfort éprouvé par tant de personnes dans leur propre vie ?
Les personnes souffrantes, surtout, sont attirées par la perspective du "soulagement" que le Médecin divin est en mesure d'offrir à qui s'adresse à Lui avec confiance. À Fatima, elles trouvent ce soulagement : parfois le soulagement physique, quand, dans sa providence, Dieu accorde la guérison de la maladie; mais plus souvent le réconfort spirituel, quand l'âme inondée par la lumière intérieure de la grâce, trouve la force d'accepter le poids douloureux de la maladie en la transformant, par sa communion au Christ, serviteur souffrant, en instrument de rédemption et de salut pour elle-même et pour ses frères.
La voie à suivre, en ce chemin douloureux, nous est indiquée par la voix maternelle de Marie qui, depuis toujours, au cours de l'histoire et de la vie de l'Église, mais tout particulièrement à notre époque, continue à redire ces paroles : "Tout ce qu'il vous dira, faites-le".
3. La Journée Mondiale du Malade est donc une précieuse occasion pour écouter de nouveau et accueillir l'exhortation de la Mère de Jésus à qui, au pied de la Croix, fut confiée l'humanité (cf Jn 19, 25-27). Cette Journée se situe au cours de la première année du triduum préparatoire au Grand Jubilé de l'An 2000 : année complètement consacrée à la réflexion sur le Christ. Et précisément cette réflexion sur le caractère central du Christ " ne peut être séparée de la reconnaissance du rôle joué par sa très Sainte Mère... Marie, en effet, montre constamment son divin Fils et se propose à tous les croyants comme modèle de la foi vécue" (Lett. Ap. Tertio millenio adveniente, n.43).
L'exemplarité de Marie trouve son expression la plus élevée dans l'invitation à porter son regard sur le Crucifix pour apprendre de Lui, qui a assumé totalement la condition humaine et s'est chargé librement de nos souffrances en s'offrant au Père comme victime innocente pour nous les hommes et pour notre salut " avec une violente clameur et des larmes" (He 5, 7). Il a ainsi racheté la souffrance, en la transformant en un don d'amour salvifique.
4. Très chers Frères et S½urs, qui souffrez dans votre esprit et dans votre corps, ne cédez pas à la tentation de considérer la douleur comme une expérience purement négative, au point de douter de la bonté de Dieu. Dans le Christ souffrant, tout malade trouve le sens de ses propres suffrances. La souffrance et la maladie sont propres à la condition de l'homme, créature fragile et limitée, marquée depuis sa naissance par le péché originel. Dans le Christ, mort et ressuscité, l'humanité découvre une nouvelle dimension de sa souffrance : au lieu d'être un échec, elle se révèle comme l'occasion d'offrir un témoignage de foi et d'amour.
Bien chers Malades, sachez découvrir dans l'amour " le sens salvifique de votre douleur et les réponses valables à toutes vos interrogations" (Lett. Ap. Salvifici doloris, n. 31). Votre mission est une mission de très grand prix pour l'Église et pour la société. " Vous qui portez le poids de la souffrance vous êtes au premier rang, parmi ceux que Dieu aime. Comme à tous ceux qu'Il rencontrait sur les routes de Palestine, Jésus vous a accordé un regard plein de tendresse; son amour ne nous abandonnera jamais" (Discours aux blessés de la vie, Tours, 21 septembre 1996, 2, in L'Osservatore Romano 23/24 septembre 1996, p. 4). De cet amour privilégié, sachez être des témoins généreux par le don de votre souffrance, qui a tant de pouvoir pour le salut du genre humain.
Dans une société comme la nôtre, qui veut construire l'avenir à partir du bien-être et des biens de consommation, qui évalue tout en fonction de l'efficience et du profit, comme la maladie et la souffrance ne peuvent être niées, ou bien on les éloigne ou bien on les vide de sens, dans l'illusion d'en triompher avec les seuls moyens offerts par le progrès de la science et de la technique.
La maladie et la souffrance demeurent une limite et une épreuve pour l'esprit humain, ceci est hors de doute. À la lumière de la Croix du Christ, toutefois, elles apparaissent comme un temps privilégié pour croître dans la foi et un moyen précieux pour contribuer à la réalisation du projet divin de salut, en union au Christ Rédempteur,
5. Dans la page évangélique relative au jugement dernier, quand " le Fils de l'Homme viendra dans sa gloire avec tous ses anges" (Mt 25, 31) sont indiqués les critères à partir desquels sera prononcée la sentence. C'est notoire, ils sont résumés dans la solennelle affirmation qui conclut : " En vérité, je vous le dis : dans la mesure où vous l'avez fait à l'un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait" (Mt 25, 40). Parmi ces " plus petits de mes frères" il y a les malades (cf Mt 25, 36), souvent seuls et en marge de la société. Sensibiliser l'opinion publique à leur encontre est une des fins principales de la célébration de la Journée Mondiale du Malade : être proche de celui qui souffre pour qu'il sache mettre à profit sa propre souffrance, grâce à l'aide des personnes qui sont à ses côtés pour lui procurer leurs soins et l'assister, voilà l'objectif que rappelle cette Journée.
À la suite de Jésus, nous devons approcher l'homme qui souffre comme de "bons samaritains". Nous devons apprendre à "servir dans les hommes le Fils de l'Homme" selon les paroles du Bienheureux Luigi Orione (cf Écrits 57, 104). Nous devons savoir regarder avec compassion les souffrances de nos propres frères, sans "passer outre", nous faisant leur "prochain", nous arrêtant auprès d'eux, nous mettant avec amour au service de la santé intégrale de leur personne. Une société se qualifie par le regard qu'elle porte sur les personnes souffrantes et sa manière de se comporter à leur égard.
Trop d'humains, dans le monde où nous vivons, sont exclus de l'amour de la communauté familiale et sociale. En apparaissant à Fatima à trois pauvres pastoureaux pour en faire les annonciateurs du message évangélique, la très Sainte Vierge a renouvelé son Magnificat de libération, en se faisant la voix "de ceux qui n'acceptent pas passivement les circonstances contraires de la vie personnelle et sociale et qui ne sont pas victimes d'"aliénation" comme on dit aujourd'hui, mais qui proclament avec Elle que Dieu est le défenseur des humbles, et s'il le faut, qui dépose les potentats de leurs trônes" (Homélie au Sanctuaire de Zapopan, 30 janvier 1979, 4m in Insegnamenti, II/1 [1979], P. 295).
6. En cette circonstance, je tiens à renouveler mon appel aux responsables de la chose publique, aux organisations sanitaires internationales et nationales, aux personnels de la santé, aux associations de bénévolat et à tous les hommes de bonne volonté, afin qu'ils s'engagent aux côtés de l'Église qui en adhérant au Christ entend annoncer l'Évangile à travers le témoignage de leur service aux personnes souffrantes.
Que la Vierge très Sainte, qui a essuyé tant de larmes à Fatima, nous aide tous à transformer cette Journée Mondiale du Malade en un moment percutant de "nouvelle évangélisation" !
Avec ces souhaits, alors que j'invoque la maternelle protection de Marie, Mère du Seigneur et notre Mère, sur les initiatives mises en ½uvre à l'occasion de cette Journée, je vous accorde volontiers à vous tous, chers malades, à vos familles, aux personnels soignants, aux bénévoles et à tous ceux qui vous accompagnent dans votre souffrance dans un esprit de solidarité mon affectueuse Bénédiction.
Du Vatican, le 18 octobre 1996

 

 


- le 9 juin 1997, à Cracovie. ORLF 8.7.97
     J’essaie chaque jour d’être proche de vos souffrances. Je peux le dire car je connais bien l’expérience des lits d’hôpital. C’est précisément pour cela que j’invoque Dieu pour vous avec plus d’insistance dans ma prière quotidienne, en demandant force et santé; je prie afin que dans la souffrance et la maladie, vous ne perdiez pas l’espérance ; je prie afin que vous soyez capables de déposer votre douleur aux pieds de la Croix du Christ. D’un point de vue humain, la situation d’un homme malade est difficile, douloureuse, parfois même humiliante. Mais c’est précisément pour cela que vous êtes particulièrement proches du Christ, que vous participez dans un certain sens physiquement à son sacrifice. Essayez de vous en rappeler. La Passion et la Résurrection de notre Sauveur vous aideront à éclaircir le mystère de votre souffrance.
     C’est grâce à vous, grâce à votre communion avec le Crucifié, que le trésor spirituel de l’Église est empli de richesses inestimables. Grâce à vous, les autres peuvent y puiser. Rien n’enrichit les autres comme le don gratuit de la souffrance. C’est pourquoi vous devez toujours vous rappeler, en particulier lorsque vous vous sentez abandonnés, que l’Église, le monde, notre Patrie ont tant besoin de vous. Rappelez-vous que le Pape aussi a besoin de vous.

 


1998

 


Message du Pape Jean Paul II pour la Journée Mondiale du Malade 1998 –
1. La célébration de la prochaine Journée Mondiale du Malade, le 11 février 1998, se tiendra auprès du Sanctuaire de Lorette. Le lieu retenu, rappelle le moment où le Verbe s'est fait chair dans le sein de la Vierge Marie par l'opération du Saint Esprit, et nous invite à fixer le regard sur le mystère de l'Incarnation.
Lors de mes pèlerinages répétés à ce "premier Sanctuaire de portée internationale consacré à la Vierge, et durant des siècles, véritable c½ur marial de la chrétienté" ( Lettre à Mgr Pascal Macchi, Délégué Pontifical du Sanctuaire de Lorette, 15 août 1993), j'ai toujours été éprouvé une proximité particulière des malades, qui accourent ici, nombreux et confiants. " Où pourraient-ils, du reste, être mieux accueillis, que dans la maison de Celle, que les « litanie lauretane » nous font invoquer comme « santé des infirmes » et « consolatrice des affligés » ?" (Ib.).
Le choix de Lorette est donc en harmonie avec la longue tradition de l'attention affectueuse de l'Église envers tous ceux qui souffrent dans leur corps et dans leur âme. Ce qui ne manquera pas de raviver la prière que les fidèles, confiants dans l'intercession de la Vierge Marie, font monter vers le Seigneur en faveur des malades. Cet important rendez-vous offre aussi à la Communauté ecclésiale l'occasion de s'arrêter dans le recueillement devant la "Sainte Maison", icône de l'événement et du mystère fondamental de l'Incarnation du Verbe, pour s'ouvrir à la lumière et à la force de l'Esprit qui transforme le c½ur de l'homme en une demeure d'espérance.
2. "Et le Verbe s'est fait chair " (Jn 1, 14). Au Sanctuaire de Lorette, plus que partout ailleurs, s'intériorise le sens profond de ces paroles de l'évangéliste Jean. Dans les murs de la Sainte Maison, très fortement, Jésus-Christ, " Dieu avec nous" nous parle de l'amour du Père (cf. Jn 3, 16), qui a trouvé sa plus haute manifestation dans l'Incarnation rédemptrice. Dieu, à la recherche de l'homme s'est fait homme Lui-même, jetant un pont entre la transcendance divine et la condition humaine. " Lui, de condition divine, ne retint pas jalousement le rang qui l'égalait à Dieu. Mais, il s'anéantit lui-même.... . obéissant jusqu'à la mort et la mort de la croix" (Ph 2, 6-8). Le Christ n'est pas venu pour nous ôter nos peines mais pour les partager et les assumer, en leur conférant une valeur salvifique : en partageant notre condition humaine, avec ses limites et ses souffrances, Il l'a rachetée. Le salut accompli par Lui, préfiguré dans la guérison des malades, ouvre des horizons d'espérance à ceux qui traversent la dure étape de la souffrance.
3. "Par l'½uvre du Saint Esprit ". Le mystère de l'Incarnation fut l'½uvre de l'Esprit, qui dans la Trinité est la "Personne-amour, le Don incréé, source éternelle de tout don qui provient de Dieu dans l'ordre de la création, le principe direct, et, en un sens, le sujet de la communication que Dieu fait de Lui-même dans l'ordre de la grâce" (Lettre Enc. Dominum et vivificantem, 50). C'est à Lui qu'est consacrée l'année 1998, deuxième de la préparation immédiate au Jubilé de l'An deux mille.
Répandu dans nos c½urs, l'Esprit Saint nous fait percevoir de manière ineffable le "Dieu proche", révélé par Jésus-Christ: " Et la preuve que vous êtes des fils, c'est que Dieu a envoyé dans nos c½urs l'Esprit de son Fils qui crie : Abba, Père !" (Gal 4, 6). C'est Lui le véritable gardien de l'espérance de tous les êtres humains et, spécialement, de ceux qui "possèdent les prémices de l'Esprit" "dans l'attente de la rédemption de leur corps" ( cf. Rm 8, 23). Dans le c½ur de l'homme l'Esprit Saint devient - comme le proclame la Séquence liturgique de la Solennité de la Pentecôte - le véritable "père des pauvres, distributeur des dons, lumière des c½urs"; il est "doux hôte de l'âme", "repos" dans la fatigue, " abri " contre la "chaleur" du jour, "réconfort" dans l'inquiétude, dans les luttes et les danger de toute époque.
C'est l'Esprit qui donne au c½ur humain la force d'affronter les situations difficiles et de les dépasser.
4. "Dans le sein de la Vierge Marie". En contemplant les murs de la Sainte Maison, il nous semble encore entendre résonner les paroles de la Mère du Seigneur, donnant son consentement et sa coopération au projet salvifique de Dieu : ecce, l'abandon généreux; fiat, la soumission confiante. Devenue pure capacité de Dieu, Marie a fait de sa vie une constante coopération à l'½uvre salvifique de son Fils Jésus.
En cette seconde année de préparation au Jubilé, contemplons Marie et imitons-la, "surtout comme la femme docile à la voix de l'Esprit, femme du silence et de l'écoute, femme d'espérance, qui sut accueillir comme Abraham la volonté de Dieu «en espérant contre toute espérance » (Rm 4, 18) " (Exhort. apost. Tertio millennio adveniente, 48). En se déclarant servante du Seigneur, Marie sait qu'elle se met au service de son amour pour les hommes. Par son exemple, Elle nous permet de comprendre que l'acceptation inconditionnée de la souveraineté de Dieu situe l'homme dans une attitude d'entière disponibilité. De cette façon, la Vierge Marie devient l'icône de l'attention vigilante et de la compassion envers celui qui souffre, Significativement, après avoir écouté avec générosité le message de l'Ange, Elle se rend en hâte pour se mettre au service d'Elisabeth. Plus tard, lors de la situation délicate des noces de Cana, elle recueillera l'appel à venir en aide, devenant ainsi le reflet éloquent de l'amour providentiel de Dieu. Le service de la Sainte Vierge trouvera sa manifestation la plus élevée dans la participation aux souffrances et à la mort du Christ, quand, au pied de la Croix, elle acceptera la mission de Mère de l'Église.
En se tournant vers Elle, Santé des Infirmes, bien des chrétiens, au cours des siècles, ont appris à revêtir de tendresse maternelle leur service d'assistance aux malades.
5. La contemplation du mystère de l'Incarnation, évoqué avec tant de proximité en la Sainte Maison de Lorette, ravive la foi en l'½uvre salvifique de Dieu, qui, en Christ, a libéré l'homme du péché et de la mort et lui a ouvert le c½ur à l'espérance de "nouveaux cieux et d'une terre nouvelle" (cf.2 P 3, 13). En un monde déchiré par la souffrance, les contradictions, les égoïsmes et la violence, le croyant vit, parfaitement conscient que " toute la création, jusqu'à ce jour, gémit en travail d'enfantement" (Rm 8, 22), et assume la responsabilité de témoin du Christ ressuscité, par sa parole et par sa vie.
C'est la raison pour laquelle, dans l'Exhortation Apostolique Tertio millennio adveniente, j'ai invité les croyants à mettre en valeur "les signes d'espérance présents en cette fin du siècle, malgré les ombres qui les dissimulent souvent à nos yeux", et à réserver une particulière attention aux "progrès réalisés par la technique et surtout par la médecine au service de la vie humaine" (n. 46). Toutefois, les succès obtenus dans l'éradication des maladies et dans le soulagement des souffrances ne peuvent faire oublier tant de situations où sont méconnues et piétinées la focalisation et la dignité de la personne humaine, comme cela arrive quand la Santé est considérée en termes de lucre et non de service solidaire, quand la famille est laissée seule devant les problèmes de santé ou quand les catégories les plus faibles de la société sont contraintes à supporter les conséquences d'inattentions injustes et de discriminations.
À l'occasion de cette Journée Mondiale du Malade, j'exhorte la Communauté ecclésiale à renouveler l'engagement destiné à transformer la société humaine en une "maison d'espérance", en collaboration avec tous les croyants et les hommes de bonne volonté.
6. Cet engagement requiert que la Communauté ecclésiale vive en communion : que hommes et femmes, là où ils sont à l'écoute de la Parole, en prière et dans la célébration des sacrements, soient "un seul c½ur et une seule âme", que s'instaurent parmi eux la solidarité fraternelle et le partage des biens et que se réalise ce que rappelle Saint Paul aux chrétiens de Corinthe : "Un membre souffre-t-il ? Que tous les autres membres souffrent avec lui !" (1 Cor 12, 26).
Alors que se prépare le Grand Jubilé de l'An 2000, l'Église est appelée à intensifier ses efforts pour traduire en projets concrets la communion suggérée par les paroles de l'Apôtre. Les diocèses, les paroisses et toutes les Communautés ecclésiales doivent s'engager à présenter les thèmes de la santé et de la maladie à la lumière de l'Évangile; encourager la promotion et la défense de la vie et de la dignité de la personne humaine, dès l'instant de la conception jusqu'à son terme naturel; concrétiser et rendre visible l'option préférentielle pour les pauvres et les marginaux; parmi ceux-ci, entourer d'attention affectueuse les victimes des nouvelles maladies sociales, les handicapés, les malades chroniques, les mourants, et ceux qui en raison de désordres politiques et sociaux sont contraints à laisser leur terre et à vivre dans des conditions précaires et mêmes inhumaines.
Les communautés qui savent vivre une diaconie authentiquement évangélique, et voir dans le pauvre et le malade "leur Seigneur et Maître", représentent une annonce courageuse de la résurrection et contribuent à renouveler efficacement l'espérance "dans la venue définitive du Royaume de Dieu".
7. Chers malades, dans la Communauté ecclésiale vous est réservée une place spéciale. Votre condition de souffrance et votre désir de recouvrer la santé vous rendent particulièrement sensibles à la valeur de l'espérance. Je confie à l'intercession de la Vierge Marie votre aspiration au bien-être du corps et de l'âme, et je vous encourage à l'éclairer et à l'élever jusqu'à la vertu théologale d'espérance, don du Christ.
C'est l'espérance qui vous aidera à donner un sens nouveau à votre souffrance, en la transformant en une voie de salut, en occasion d'évangélisation et de rédemption. En effet, "la souffrance peut revêtir un sens positif pour l'homme et pour la société elle-même, appelée comme elle est, à devenir une forme de participation à la souffrance salvifique du Christ et à sa joie de Ressuscité, et donc, une force de sanctification et d'édification de l'Église" (Christifideles laici, 54; Lettre Enc. Salvifici doloris, 23). Modelée sur l'expérience du Christ et habitée par l'Esprit, votre expérience de la souffrance proclamera la force victorieuse de la Résurrection.
8. La contemplation de la Sainte Maison nous amène naturellement à nous arrêter sur la Famille de Nazareth, où ne manquèrent pas les épreuves : en une hymne liturgique elle est décrite comme "experte dans l'art de souffrir" (Bréviaire Romain, Office des Lectures en la solennité de la Sainte Famille). Toutefois, cette "sainte et douce demeure" (Ib.) jouissait de la joie la plus limpide.
Je souhaite que de ce foyer arrive à chaque famille humaine, blessée par la souffrance, le don de la sérénité et de la confiance. Tandis que j'invite la Communauté ecclésiale et civile à prendre en charge les situations difficiles dans lesquelles se trouvent de nombreuses familles sur lesquelles pèsent la maladie d'un conjoint, je rappelle que le commandement du Seigneur invitant à visiter les malades est adressé particulièrement aux familles. Accomplie en esprit affectueux de don de soi et soutenu par la foi, la prière et les sacrements, l'assistance des conjoints malades est capable de se transformer en un moyen thérapeutique irremplaçable pour le malade et devenir pour tous une occasion de découverte de précieuses valeurs humaines et spirituelles.
9. J'adresse en ce contexte, une pensée particulière aux personnels de la santé et aux agents de pastorale, professionnels de santé et bénévoles, qui vivent continuellement aux côtés des malades. Je les exhorte à maintenir toujours une haute conception de la tâche qui leur est confiée, sans jamais se laisser intimider par les difficultés et les incompréhensions. S'engager dans le monde de la santé ne signifie pas seulement combattre le mal, mais surtout promouvoir la qualité de la vie humaine. Le chrétien, conscient que la "gloire de Dieu est l'homme vivant", honore Dieu dans le corps humain, sous l'aspect exaltant de la force, de la vitalité et de la beauté, comme sous l'aspect de la fragilité et de la désagrégation. Il proclame toujours la valeur transcendante de la personne humaine, dont la dignité reste intacte même dans l'expérience de la souffrance, de la maladie et du vieillissement. Grâce à la foi en la victoire du Christ sur la mort, il attend avec confiance le moment où le Seigneur "transfigurera notre corps mortel pour le conformer à son corps glorieux, en vertu du pouvoir qu'il a de soumettre à soi toutes les choses" (Ph 3, 21).
À la différence de ceux qui "n'ont pas d'espérance" (cf. I Th 4, 13), le croyant sait que le temps de la souffrance représente une occasion de vie nouvelle, de grâce et de résurrection. Il exprime cette certitude par son engagement thérapeutique, par sa capacité d'accueil et d'accompagnement, par sa participation à la vie du Christ communiquée dans la prière et les sacrements. Prendre soin du malade et du mourant, aider l'homme extérieur qui va se désagrégeant, alors que l'homme intérieur se renouvelle de jour en jour (cf 2 Cor 4, 16), n'est-ce pas cooérer à ce processus de résurrection que le Seigneur a inséré dans l'histoire des hommes par le mystère pascal et qui trouvera son plein accomplissement à la fin des temps ? N'est-ce pas rendre raison de l'espérance (cf 1 P 3, 15) qui nous a été donnée ? En toute larme essuyée, c'est déjà l'annonce des derniers temps, une anticipation de la plénitude finale (cf Ap 21, 4; et Is 25, 8).
Consciente de tout ceci, la Communauté chrétienne s'engage dans l'assistance des malades et dans la promotion de la qualité de la vie, en collaborant avec tous les hommes de bonne volonté. Elle réalise sa délicate mission au service de l'homme dans une confrontation respectueuse et ferme des forces qui expriment des visions morales différentes, et par une contribution effective aux législations concernant l'environnement, le soutien à la distribution équitable des ressources sanitaaires, la promotion d'une plus grande solidarité entre les peuples riches et pauvres (cf Tertio millennio adveniente ,46).
10. À Marie, Consolatrice des affligés, je confie tous ceux qui souffrent dans leur corps et dans leur âme, ainsi que les personnels de santé et toutes les personnes qui se dévouent généreusement au service des malades.
Vers Toi, Vierge de Lorette, en toute confiance nous tournons notre regard.
À Toi, "notre vie, notre douceur, notre espérance" nous demandons la grâce d'être dans l'attente de l'aube du troisième millénaire avec les sentiments qui faisaient vibrer ton c½ur, alors que tu attendais la naissance de ton Fils Jésus.
Que ta protection nous libère du pessimisme, et nous fasse entrevoir, au milieu des ombres de notre temps, les traces lumineuses de la présence du Seigneur.
À ta tendresse de Mère, nous confions les larmes, les craintes et les espérances des malades. Que descende sur leurs blessures le baume bienfaisant de la consolation et de l'espérance ! Que leur souffrance, unie à celle de Jésus, se transforme en instrument de rédemption !
Que ton exemple nous guide et fasse de notre existence une louange continuelle à l'amour de Dieu ! Rends-nous attentifs aux besoins des autres, prévenants pour venir en aide au frère souffrant, capables d'accompagner celui qui est seul, constructeurs d'espérance là où se consomment les drames de l'homme.
En toute étape joyeuse ou triste de notre route, avec l'affection d'une mère, montre-nous "ton Fils Jésus, ô clémente, ô pieuse, ô douce Vierge Marie".
Amen
Du Vatican, le 29 juin 1997, en la solennité des Saints Apôtres Pierre et Paul.

 

 

 

1999

 

 


Message de Jean Paul II pour la Journée Mondiale du Malade 1999 
1. Selon une tradition désormais bien établie, la prochaine Journée mondiale du Malade, le 11 février 1999, sera célébrée de la façon la plus solennelle dans un important sanc-tuaire marial.
Le choix du Sanctuaire de Notre-Dame de Harissa, sur la colline qui domine Beyrouth prend, en raison des circonstances de temps et de lieu, des significations multiples et profondes. La terre qui abrite ce sanctuaire est le Liban qui, comme j'ai déjà eu l'occasion de le remarquer, «représente davantage qu'un pays; il est un message et un modèle pour l'Orient et l'Occident» (Rome, 7 septembre 1989. In Insegnamenti di Giovanni Paolo II, XII/2, p. 176).
Du Sanctuaire de Harissa, la statue bienveillante de la Bienheureuse Vierge Marie regarde la côte méditerranéenne, si proche de la terre sur laquelle Jésus passait en «proclamant la Bonne Nouvelle du Royaume et guérissant toute maladie et toute langueur parmi le peuple» (Mt 4, 23). Non loin de là, se trouve la région où sont conservés les corps des martyrs saints Côme et Damien, qui, accueillant le mandat du Christ «d'annoncer le Royaume et de guérir les malades» (Lc 9, 2), l'accomplirent avec tant de générosité qu'ils méritèrent le titre de saints médecins anargyres: ils exerçaient en effet la médecine sans rétribution.
L'année 1999, dans le cadre de la préparation au grand Jubilé de l'An 2000, sera consacrée par l'Eglise universelle à une réflexion plus attentive sur Dieu le Père. Dans sa première lettre, l'Apôtre Jean nous rappelle que «Dieu est amour» (4, 8.16). Comment la réflexion sur ce mystère pourrait-elle ne pas raviver les vertus théologales de la charité, sous son double visaged'amourenversDieuet les frères?
2. Dans cette perspective, l'option préférentielle de l'Eglise pour les pauvres et pour ceux qui souffrent dans leur corps et leur esprit prendra, au seuil de la fin du second millénaire de l'ère chrétienne, le caractère d'un «chemin d'authentique conversion à l'Evangile». Cela ne manquera pas de susciter une recherche croissante de l'unité entre les hommes, pour construire la civilisation de l'amour (cf. Lett. ap. Tertio millennio adveniente, nn. 50-52), sous le signe de la Mère de Jésus, «exemple parfait de l'amour envers Dieu et envers le prochain» (Ibid., n. 54).
Quel lieu de la terre, pourrait-il mieux que le Liban, représenter aujourd'hui un symbole d'unité entre les chrétiens et de rencontre entre tous les hommes dans la communion de l'amour? En effet, la terre libanaise est non seulement un lieu de coexistence entre les communautés catholiques de diverses traditions et entre les diverses communautés chrétiennes, mais également le carrefour de multiples religions. Comme tel, elle peut tout à fait servir de laboratoire pour «construire ensemble un avenir de convivialité et de collaboration, en vue du développement humain et moral» des peuples (Exhort. apos. post-synodale Une espérance nouvelle pour le Liban, n. 93).
La Journée mondiale du Malade, qui atteindra son point culminant précisément au Liban, appelle l'Eglise universelle à s'interroger sur son service à l'égard de cette condition qui, mettant en lumière plus qu'aucune autre les limites et la fragilité des créatures humaines, sollicite également leur solidarité réciproque. Cette Journée devient ainsi un moment privilégié de référence au Père et de rappel nécessaire du commandement primordial de l'amour, de l'observance duquel nous seront tous appelés à rendre compte (cf. Mt 25, 31-46). Le modèle auquel s'inspirer est indiqué par Jésus lui-même dans la figure du Bon Samaritain, parabole-clé pour la pleine compréhension du commandement de l'amour envers le prochain (cf. Lc 10, 25-37).
3. La prochaine Journée mondiale du Malade doit ainsi s'inscrire dans le cadre d'une sensibilité particulière pour le devoir de la charité, que la rencontre de réflexion, d'étude et de prière au Sanctuaire de Notre-Dame de Harissa — but de pèlerinage de toutes les communautés libanaises chrétiennes des diverses Eglises et également de pieux musulmans — ne manquera pas de souligner. C'est ainsi que prendra davantage d'acuité le besoin d'unité à travers cet «½cuménisme des ½uvres» qui, grâce à l'attention aux malades, aux personnes souffrantes, aux exclus, aux pauvres et à ceux qui manquent de tout, est la plus urgente, et dans le même temps la moins compliquée des voies ½cuméniques, comme l'expérience le démontre désormais. Sur cette voie, il sera non seulement possible de rechercher la «pleine unité» entre ceux qui professent la confession chrétienne, mais également de s'ouvrir au dialogue interreligieux dans un lieu comme le Liban, où des croyances religieuses diverses «ont en commun un certain nombre de valeurs humaines et spirituelles incontestables», qui peuvent pousser, «au-delà des divergences importantes entre les religions» à discerner tout d'abord ce qui les unit (Exhort. apos. Une espérance nouvelle pour le Liban, nn. 13-14).
4. Aucune requête ne s'élève des c½urs humains avec une imploration aussi intense que la requête de la santé. Il ne faut donc pas s'étonner si la solidarité humaine, à tous les niveaux, peut et doit se développer avec une urgence prioritaire dans le cadre de la santé. Il est donc urgent «de réaliser une étude sérieuse et profonde de l'organisation des services de la santé dans ses institutions, avec le souci d'en faire des lieux de témoignage toujours plus grand de l'amour envers les hommes» (Ibid., n. 102).
En ce qui la concerne, la réponse attendue par celui qui souffre doit être modulée en relation avec les conditions du destinataire, qui désire avant toute chose le don d'un partage plein de sollicitude, d'un amour solidaire, d'un dévouement généreux jusqu'à l'héroïsme.
Quelacontemplation du mystère de la paternité de Dieu se transforme en raison d'espérance pour les malades etenécoledesollicitude attentive pour ceux qui en assument l'assistance.
5. Aux malades, de tout âge et de toute condition, aux victimes de handicaps en tout genre, de catastrophes et de tragédies, mon invitation est de s'abandonner entre les bras paternels du Père. Nous savons que la vie nous a été donnée en don par le Père, comme une expression très haute de son amour et qu'elle continue à être son don en toute circonstance. Tous nos choix les plus responsables, dont le but peut parfois nous sembler obscur et incertain en raison de nos limites, doivent être guidés par cette conviction. L'invitation suivante du Psalmiste repose sur cette conviction: «Décharge sur Yahvé ton fardeau et lui te subviendra, il ne peut laisser à jamais chanceler le juste» (Ps 54, 23).
En commentant ces paroles, saint Augustin écrivait: «De quoi te préoccuperas-tu? Pourquoi t'agiteras-tu? Celui qui t'a créé prend soin de toi. Celui qui a eu soin de toi avant que tu n'existes, ne s'occupera-t-il pas de toi, à présent que tu es ce qu'il a voulu que tu sois? Car désormais tu es fidèle, tu marches déjà sur la voie de la justice. Celui qui fait que le soleil se lève sur les bons et les méchants, et qui fait pleuvoir sur les justes et les injustes, n'aura-t-il donc pas soin de toi? Pourra-t-il te négliger, t'abandonner, te laisser seul, toi qui es déjà juste et qui vis dans la foi? Au contraire, il t'avantage, il t'aide, il te donne ce dont tu as besoin, il te protège des adversités. En te faisant des dons, il te console, afin que tu persévères, en te les enlevant, il te corrige afin que tu ne périsses pas; le Seigneur a soin de toi, sois tranquille. Celui qui t'a fait te soutient; ne tombe pas de la main de ton Créateur; si tu tombes de la main de ton Créateur tu te briseras; La bonne volonté t'aide à demeurer entre les mains de celui qui t'a créé [...] Abandonne-toi à Lui, ne crois pas qu'il y ait le vide, comme si tu devais tomber, ne t'imagine pas une chose de ce genre. Il a dit: “Je remplis le ciel et la terre”. Il ne t'abandonnera jamais; ne l'abandonne pas toi non plus, ne t'abandonne pas toi-même» (Enarr. in Psalmos 39, 26, 27: CCL 38, 445).
6. Aux agents du monde de la santé — médecins, pharmaciens, infirmiers, aumôniers, religieux et religieuses administrateurs et volontaires —, appelés par vocation et profession à être les gardiens et les serviteurs de la vie humaine, je montre encore une fois l'exemple du Christ: envoyé par le Père en tant que preuve suprême de son amour infini (cf. Jn 3, 16), il a enseigné à l'homme «à faire du bien par la souffrance et à faire du bien à celui qui souffre», révélant jusqu'au bout «sous ce double aspect, le sens profond de la souffrance» (Lett. apos. Salvifici doloris, n. 30).
A l'école de celui qui souffre, sachez saisir, à travers une sollicitude pleine d'amour, les raisons profondes du mystère de la souffrance. Que la douleur dont vous êtes les témoins serve de mesure à la réponse de dévouement que l'on attend de vous. Et en rendant ce service à la vie, soyez ouverts à la collaboration de tous, car «la question de la vie, de sa défense et de sa promotion n'est pas la prérogative des seuls chrétiens... Il y a assurément dans la vie une valeur sacrée et religieuse, mais en aucune manière on ne peut dire que cela n'interpelle que les croyants» (Lett. enc. Evangelium vitae, n. 101). Et puisque celui qui souffre ne demande que de l'aide, acceptez donc l'aide de tous, lors-qu'elle désire se traduire en réponse d'amour.
7. A la communauté ecclésiale s'adresse mon invitation pressante à faire de l'Année du Père, l'année de la charité réelle, de la charité des ½uvres, à travers la pleine participation de toutes les institutions ecclésiales. Saint Ignace d'Antioche écrit aux Ephésiens que la charité est la voie vers Dieu. Foi et charité sont le principe et l'objectif de la vie; la foi est le début, la charité est la fin (cf. PG V, 651). Toutes les vertus accompagnent celles-ci, pour conduire l'homme à la perfection. Pour sa part, saint Augustin enseigne: «Si tu ne peux donc pas lire une par une toutes les pages de l'Ecriture, et que tu ne peux pas dérouler tous les volumes qui contiennent la Parole de Dieu, ni comprendre tous les arcanes de l'Ecriture Sainte, aies la charité dont tout dépend. Ainsi, tu sauras non seulement tout ce que tu y as appris, mais également ce que tu n'as pas encore pu y apprendre» (Sermo 350, 2-3: PL 39, 1534).
8. Que la Vierge Marie, Notre-Dame de Harissa, à travers son exemple sublime, soit en cette Journée mondiale du Malade, aux côtés de tous ceux qui souffrent; qu'elle inspire ceux qui rendent témoignage à la foi chrétienne à travers le service aux malades; qu'elle guide chacun d'une main maternelle vers la Maison du Père de toute miséricorde. Que Marie, qui a veillé sur les douleurs déchirantes du Peuple libanais, suscite dans le monde, à travers l'espérance qui a refleuri sur cette terre, une confiance renouvelée dans le pouvoir de guérison de la charité et, comme des fils égarés, qu'elle nous rassemble tous sous son manteau. Puisse le nouveau millénaire qui va commencer inaugurer une ère de confiance renouvelée dans l'homme, créature très haute de l'amour de Dieu, qui dans l'amour seulement pourra retrouver le sens de sa propre vie et de son propre destin.
Du Vatican, 8 décembre 1998

 

 

 


2000


- le 13 janvier 2000, aux membres des Administrations de la Région du Latium, de la Commune et de la Province de Rome. ORLF 18.1.2000
     Il est important de conjuguer, dans le domaine de la santé, le progrès technique et la limitation des coûts avec l’attention fondamentale à la personne du malade.
     Que dire de la multitude de personnes âgées qui ont besoin d’une plus grande estime et reconnaissance, outre une assistance plus ponctuelle et cordiale ?

 


Message de Jean Paul II pour la Journée Mondiale du Malade de l’Année du Grand Jubilé de la Rédemption, 11 février 2000

DÉFENDRE LA VALEUR DE LA VIE ET PROMOUVOIR LA SANTÉ,
C’EST CRÉER UNE ÉCOLOGIE INTÉRIEURE
VÉRITABLEMENT DIGNE DE L’HOMME

11 février 2000

1. La VIII Journée mondiale du Malade, qui aura lieu à Rome le 11 février 2000, année du grand Jubilé, verra la communauté chrétienne engagée à reconsidérer la réalité de la maladie et de la souffrance dans la perspective du mystère de l'incarnation du Fils de Dieu, pour tirer d'un tel événement extraordinaire une nouvelle lumière sur ces expériences humaines fondamentales.
Au crépuscule du second millénaire de l'ère chrétienne, l'Eglise, tout en considérant avec admiration le chemin parcouru par l'humanité dans le soulagement de la souffrance et dans la promotion de la santé, se met à l'écoute des questions qui jaillissent du monde de la santé pour mieux définir sa présence dans ce contexte et pour répondre de façon adéquate aux défis urgents d'aujourd'hui.
Au cours de l'histoire, l'homme a mis à profit les ressources de l'intelligence et du coeur pour surmonter les limites inhérentes à sa condition et a remporté de grandes victoires dans la protection de la santé. Il suffit de penser à la possibilité de prolonger la vie et d'en améliorer la qualité, de soulager les souffrances et de mettre en valeur les potentialités de la personne à travers l'utilisation de médicaments à l'efficacité certaine et de technologies toujours plus sophistiquées. A ces conquêtes s'ajoutent celles à caractère social, comme la conscience généralisée du droit au traitement et sa traduction en termes juridiques dans les diverses «Chartes des droits du Malade». En outre, il ne faut pas oublier l'évolution significative réalisée dans le secteur de l'assistance, grâce à l'apparition de nouvelles applications médicales, d'un service paramédical plus qualifié et du phénomène du volontariat, qui a atteint au cours des derniers temps des niveaux de compétence significatifs.
2. Au crépuscule du second millénaire, toutefois, on ne peut pas dire que l'humanité ait fait tout ce qui est nécessaire afin de soulager le poids immense de la souffrance qui pèse sur les personnes, les familles et sur des sociétés entières.
Au contraire, il semble, en particulier au cours de ce dernier siècle, qu'au fleuve de douleur humaine, déjà important en raison de la fragilité de la nature humaine et de la blessure du péché originel, se soient ajoutées les souffrances infligées par les mauvais choix des personnes et des Etats: je pense aux guerres qui ont ensanglanté ce siècle, sans doute plus que tout autre, de l'histoire tourmentée de l'humanité; je pense aux formes de maladie largement répandues comme la toxicomanie, le SIDA, les maladies dues à la dégradation des grandes villes et de l'environnement; je pense à la recrudescence de la petite et grande criminalité et aux projets d'euthanasie.
J'ai devant les yeux non seulement les lits d'hôpitaux où gisent tant de malades, mais également les souffrances des réfugiés, des orphelins, des si nombreuses victimes des maux de la société et de la pauvreté.
Dans le même temps, avec l'éclipse de la foi, en particulier dans le monde sécularisé, s'ajoute une ultérieure et grave cause de souffrance, celle de ne plus savoir saisir le sens salvifique de la douleur et le réconfort de l'espérance eschatologique.
3. Participant aux joies et aux espérances, aux tristesses et aux angoisses des hommes de tout temps, l'Eglise a constamment accompagné et secouru l'humanité dans sa lutte contre la douleur et dans son engagement pour la promotion de la santé. Dans le même temps, l'on a tenté de dévoiler aux hommes la signification de la souffrance et les richesses de la Rédemption opérée par le Christ Sauveur. L'histoire comporte des grandes figures d'hommes et de femmes qui, guidées par le désir d'imiter le Christ à travers un amour profond pour les frères pauvres et souffrants, ont donné naissance à d'innombrables initiatives d'assistance, constellant de bienfaits les deux derniers millénaires.
Aux côtés des Pères de l'Eglise et des fondateurs des Instituts religieux, comment ne pas penser avec admiration et émerveillement aux innombrables personnes qui, dans le silence et l'humilité, ont consacré leur vie à leur prochain malade, atteignant parfois des sommets d'héroïsme? (cf. Vita consecrata, n. 83). L'expérience quotidienne montre que l'Eglise, inspirée par l'Evangile de la charité, continue à contribuer, à travers de nombreuses oeuvres, hôpitaux, structures médicales et organisations de volontaires, au soin de la santé et des malades, en portant une attention particulière aux personnes les plus en difficulté, dans toutes les parties du monde, quelle que soit ou qu'ait été la cause, volontaire ou non, de leur souffrance.
Il s'agit d'une présence qui doit être soutenue et promue au profit du bien précieux de la santé humaine et avec un regard attentif à toutes les inégalités et les contradictions qui demeurent dans le monde de la santé.
4. En effet, au cours des siècles, à côté des lumières n'ont pas manqué des zones d'ombre, qui ont assombri et assombrissent encore le cadre, sous tant d'autres aspects splendides, de la promotion de la santé. Je pense en particulier aux graves inégalités sociales dans l'accès aux ressources médicales, telles qu'elles se présentent aujourd'hui encore dans de vastes régions de la planète, surtout dans les pays du sud du monde.
Cette répartition inégale et injuste concerne de façon de plus en plus dramatique les droits fondamentaux de la personne: des populations entières n'ont pas même la possibilité d'avoir accès aux médicaments de première et urgente nécessité, tandis qu'ailleurs, l'on tombe dans l'abus et le gaspillage de médicaments coûteux. Et que dire du nombre infini de frères et soeurs qui, manquant du nécessaire pour se nourrir, sont victimes de toutes sortes de maladie? Pour ne pas parler des si nombreuses guerres qui ensanglantent l'humanité, semant, outre les morts, des traumatismes physiques et psychologiques de toute sorte.
5. Face à ces scénarios, il faut reconnaître que, malheureusement, dans de nombreux cas, le progrès économique, scientifique et technique n'a pas été accompagné par un véritable progrès centré sur la personne et sur la dignité inviolable de tout être humain. Les conquêtes remportées dans le domaine de la génétique, fondamentales pour la santé, et, en particulier pour la protection de la vie naissante, deviennent elles-mêmes l'occasion de sélections inadmissibles, de manipulations insensées, d'intérêts contraires au développement authentique, entraînant des résultats souvent bouleversants.
On enregistre, d'une part, des efforts considérables pour prolonger la vie et même pour la procréer de façon artificielle; mais l'on ne permet pas, d'autre part, de naître à celui qui a déjà été conçu et l'on accélère la mort de celui que l'on ne considère plus utile. Et encore: tandis que l'on valorise à juste titre la santé en multipliant les initiatives visant à la promouvoir, arrivant parfois à une sorte de culte du corps et à la recherche hédoniste de l'efficacité physique, l'on est dans le même temps réduit à considérer la vie comme une simple marchandise de consommation, donnant lieu à de nouvelles formes d'exclusion pour les personnes handicapées, les personnes âgées et les malades en phase terminale.
Toutes ces contradictions et situations paradoxales sont dues au manque d'harmonisation entre, d'une part, la logique du bien-être et de la recherche du progrès technique et, d'autre part, la logique des valeurs éthiques fondées sur la dignité de chaque être humain.
6. A la veille du nouveau millénaire, il est souhaitable que dans le monde de la souffrance et de la santé également, l'on promeuve «une purification de la mémoire» qui conduise à «reconnaître les fautes commises par ceux qui ont porté et portent le nom de chrétien» (Incarnationis mysterium, n. 11; cf. également Tertio millennio adveniente, n. 33, 37 et 51). La communauté ecclésiale est appelée à répondre, dans ce domaine également, à l'invitation à la conversion liée à la célébration de l'Année Sainte.
Le processus de conversion et de renouveau sera facilité en tournant son regard continuellement vers Celui qui, «incarné dans le sein de Marie, il y a vingt siècles, continue à s'offrir à l'humanité comme source de vie divine» (Tertio millennio adveniente, n. 55).
Le mystère de l'Incarnation implique que la vie soit considérée comme don de Dieu à conserver avec responsabilité et à utiliser pour le bien: la santé est donc un attribut positif de la vie, qu'il faut poursuivre en vue du bien de la personne et du prochain. Toutefois, la santé est un bien «avant-dernier» dans la hiérarchie des valeurs, qui doit être cultivé et considéré dans l'optique du bien total, et donc également spirituel, de la personne.
7. C'est en particulier vers le Christ souffrant et ressuscité que se tourne notre regard en cette circonstance. En assumant la condition humaine, le Fils de Dieu a accepté de la vivre sous tous ses aspects, y compris la douleur et la mort, en accomplissant dans sa personne les paroles prononcées lors de la dernière Cène: «Nul n'a plus grand amour que celui-ci: donner sa vie pour ses amis» (Jn 15, 13). En célébrant l'Eucharistie, les chrétiens annoncent et réalisent le sacrifice du Christ, «dont la meurtrissure [nous] a guéris» (1 P 2, 25) et, s'unissant à Lui, «conservent dans leurs propres souffrances une parcelle tout à fait particulière du trésor infini de la Rédemption du monde, et peuvent partager ce trésor avec les autres» (Salvifici doloris, n. 27).
L'imitation de Jésus, Serviteur souffrant, a conduit de grands saints et de simples croyants à faire de la maladie et de la douleur une source de purification et de salut pour eux et pour les autres. Que de grandes perspectives de sanctification personnelle et de coopération au salut du monde le chemin tracé par le Christ et par tant de ses disciples ouvre-t-il à ses frères et soeurs malades! Il s'agit d'un parcours difficile, car l'homme ne trouve pas seul le sens de la souffrance et de la mort, mais d'un parcours toujours possible avec l'aide de Jésus, Maître et Guide intérieur (cf. Salvifici doloris, nn. 26-27).
De même que la résurrection a transformé la plaie du Christ en source de guérison et de salut, ainsi, pour chaque malade, la lumière du Christ ressuscité est la confirmation que la voie de la fidélité à Dieu dans le don de soi jusqu'à la Croix peut vaincre et est capable de transformer la maladie même en source de joie et de résurrection. N'est-ce pas là l'annonce qui retentit au coeur de chaque célébration eucharistique lorsque l'Assemblée proclame: «Nous annonçons ta mort, Seigneur, nous proclamons ta résurrection, dans l'attente de ta venue»? Les malades, envoyés eux aussi comme ouvriers à la vigne du Seigneur (cf. Christifideles laici, n. 53), peuvent offrir à travers leur exemple une contribution précieuse à l'évangélisation d'une culture qui tend à occulter l'expérience de la souffrance, s'empêchant d'en saisir le sens profond avec ses encouragements intrinsèques à une croissance humaine et chrétienne.
8. Le Jubilé nous invite également à contempler le visage de Jésus, divin Samaritain des âmes et du corps. En suivant l'exemple de son divin Fondateur, l'Eglise «a transcrit, de siècle en siècle, dans l'immense multitude des personnes malades et souffrantes, la parabole du Bon Samaritain, en révélant et en communiquant l'amour de guérison et de consolation du Christ. Cela s'est fait par le moyen du témoignage de la vie religieuse consacrée au service des malades et par l'engagement infatigable de toutes les personnes qui s'occupent des services de la santé» (Christifideles laici, n. 53). Cet engagement ne jaillit pas de conjonctures sociales particulières, et ne doit pas être compris comme un acte facultatif ou occasionnel, mais constitue une réponse incontournable au commandement du Christ: «Chemin faisant, proclamez que le Royaume des cieux est tout proche. Guérissez les malades, ressuscitez les morts, purifiez les lépreux, expulsez les démons» (Mt 10, 7-8).
C'est dans l'Eucharistie que le service rendu à l'homme souffrant dans l'âme et dans le corps prend tout son sens, trouvant en elle non seulement sa source, mais également la norme. Ce n'est pas par hasard si Jésus a lié étroitement l'Eucharistie au service (Jn 13, 2-16), en demandant aux disciples de perpétuer en sa mémoire non seulement la «fractio panis», mais également le service du «lavement des pieds».
9. L'exemple du Christ, Bon Samaritain, doit inspirer l'attitude du croyant, le poussant à devenir le «prochain» de ses frères et surs qui souffrent à travers le respect, la compréhension, l'acceptation, la tendresse, la compassion, la gratuité. Il s'agit de lutter contre l'indifférence qui conduit les individus et les groupes à se renfermer de façon égoïste sur eux-mêmes. Dans ce but, «la famille, l'école et les autres institutions de formation - ne serait-ce que pour des raisons humanitaires - doivent oeuvrer avec persévérance à l'éveil et à l'affinement de cette sensibilité envers le prochain et sa souffrance» (Salvifici doloris, n. 29). Chez celui qui croit, cette sensibilité humaine est contenue dans l'agape, c'est-à-dire dans l'amour surnaturel, qui conduit à aimer son prochain par amour de Dieu. En effet, l'Eglise, guidée par la foi, en entourant de soins affectueux ceux qui sont touchés par la souffrance humaine, reconnaît en eux l'image de son Fondateur, pauvre et souffrant, et se prodigue pour atténuer ses souffrances, en mémoire de ses paroles: «J'étais malade, et vous m'avez visité» (Mt 25, 36).
L'exemple de Jésus, Bon Samaritain, ne pousse pas seulement à assister le malade, mais à faire tout le possible pour le réinsérer dans la société. Pour le Christ, en effet, guérir est en même temps réintégrer: de même que la maladie exclut de la communauté, ainsi, la guérison doit conduire l'homme à retrouver sa place dans la famille, dans l'Eglise et dans la société.
A tous ceux qui sont engagés, de par leur profession ou volontairement, dans le monde de la santé, j'adresse une invitation chaleureuse à fixer le regard sur le divin Samaritain, afin que leur service puisse devenir une préfiguration du salut définitif et une annonce des cieux nouveaux et de la terre nouvelle «où la justice habitera» (2 P 3, 13).
10. Jésus n'a pas seulement soigné et guéri les malades, mais il a également été un promoteur inlassable de la santé à travers sa présence salvifique, l'enseignement et l'action. Son amour pour l'homme se traduisait par des rapports empreints d'humanité, qui le conduisaient à comprendre, à faire preuve de compassion, à apporter le réconfort en unissant harmonieusement tendresse et force. Il s'émouvait face à la beauté de la nature il était sensible à la souffrance des hommes, il combattait le mal et l'injustice. Il affrontait les aspects négatifs de l'expérience avec courage et sans en ignorer le poids, et communiquait la certitude d'un monde nouveau. En Lui, la condition humaine montrait le visage racheté et les aspirations humaines les plus profondes trouvaient leur réalisation.
Il veut communiquer cette plénitude harmonieuse de vie aux hommes d'aujourd'hui. Son action salvifique vise non seulement à atténuer l'indigence de l'homme, victime de ses limites et de ses erreurs, mais à soutenir l'effort vers la réalisation complète de soi. Il ouvre à l'homme la perspective de la vie divine elle-même: «Je suis venu pour qu'ils aient la vie et qu'ils l'aient en abondance» (Jn 10, 10).
Appelée à poursuivre la mission de Jésus, l'Eglise doit devenir le promoteur d'une vie ordonnée et pleine pour tous.
11. Dans le cadre de la promotion de la santé et d'une qualité de vie entendue comme il se doit, deux devoirs méritent de la part du chrétien une attention particulière.
Avant tout la défense de la vie. Dans le monde contemporain, de nombreux hommes et femmes se battent pour une meilleure qualité de la vie dans le respect de la vie elle-même, et réfléchissent sur l'éthique de la vie pour dissiper la confusion des valeurs, parfois présente dans la culture moderne. Comme je le rappelais dans l'Encyclique Evangelium vitae, «la reprise de la réflexion éthique au sujet de la vie est particulièrement significative; la création et le développement constant de la bioéthique favorisent la réflexion et le dialogue entre croyants et non-croyants, de même qu'entre croyants de religions différentes sur les problèmes éthiques fondamentaux qui concernent la vie de l'homme» (n. 27). Toutefois, à côté de ceux-ci ne manquent pas ceux qui, malheureusement, contribuent à la formation d'une culture de la mort préoccupante avec la diffusion d'une mentalité teintée d'égoïsme et de matérialisme hédoniste et avec l'appui social et légal de la suppression de la vie.
A l'origine de cette culture, il y a souvent une attitude prométhéenne de l'homme, qui croit pouvoir «s'ériger en maître de la vie et de la mort, parce qu'il en décide, tandis qu'en réalité il est vaincu et écrasé par une mort irrémédiablement fermée à toute perspective de sens et à toute espérance» (Evangelium vitae, n. 15). Lorsque la science et l'art médical risquent d'égarer leur dimension éthique originelle, les professionnels du monde de la santé eux-mêmes «peuvent parfois être fortement tentés de se transformer en agents de manipulation de la vie ou même en artisans de mort» (ibid., n. 89).
12. Dans ce contexte, les croyants sont appelés à développer un regard de foi sur la valeur sublime et mystérieuse de la vie, même lorsque celle-ci se présente comme fragile et vulnérable. «Ce regard ne se laisse pas aller à manquer de confiance devant celui qui est malade, souffrant, marginalisé ou au seuil de la mort; mais il se laisse interpeller par toutes ces situations, pour aller à la recherche d'un sens et, en ces occasions, il est disposé à percevoir dans le visage de toute personne une invitation à la rencontre, au dialogue, à la solidarité» (ibid., n. 83).
Il s'agit d'un devoir qui concerne particulièrement le personnel de la santé: médecins, pharmaciens, infirmiers et infirmières, aumôniers, religieux et religieuses, administrateurs et bénévoles, qui, en vertu de leur profession, sont appelés à titre particulier à être les gardiens de la vie humaine. Mais il s'agit d'un devoir qui appelle également tout autre être humain, à commencer par les parents de la personne malade. Ceux-ci savent que «la demande qui monte du cur de l'homme dans sa suprême confrontation avec la souffrance de la mort, spécialement quand il est tenté de se renfermer dans le désespoir et presque de s'y anéantir, est surtout une demande d'accompagnement, de solidarité et de soutien dans l'épreuve. C'est un appel à l'aide pour continuer d'espérer, lorsque tous les espoirs humains disparaissent» (ibid., n. 67).
13. Le second devoir auquel les chrétiens ne peuvent se soustraire, concerne la promotion d'une santé digne de l'homme. Dans notre société, il existe le risque de faire de la santé une idole à laquelle l'on soumet tout autre valeur. La vision chrétienne de l'homme contraste avec une notion de santé réduite à une pure vitalité exubérante, satisfaite par son efficacité physique et absolument étrangère à toute considération positive de la souffrance. Cette vision, en négligeant les dimensions spirituelles et sociales de la personne, finit par porter préjudice au véritable bien. Précisément parce que la santé ne se limite pas à la perfection biologique, la vie vécue dans la souffrance offre également des espaces de croissance et d'autoréalisation et ouvre la voie à la découverte de valeurs nouvelles.
Cette vision de la santé, fondée sur une anthropologie qui respecte la personne dans son intégralité, loin de s'identifier avec la simple absence de maladie, se présente comme une tension vers une harmonie plus parfaite et un équilibre sain au niveau physique, psychique, spirituel et social. Dans cette perspective, la personne elle-même est appelée à mobiliser toutes ses énergies disponibles pour réaliser sa vocation et le bien d'autrui.
14. Ce modèle de santé engage l'Eglise et la société à créer une écologie digne de l'homme. En effet, l'environnement est lié à la santé de l'homme et des populations: il constitue «la maison» de l'être humain et l'ensemble des ressources confiées à son soin et à sa gestion, «le jardin à préserver et le champs à cultiver». A l'écologie externe de la personne, pourtant, doit correspondre une écologie intérieure et morale, la seule qui soit adaptée à un juste concept de la santé.
Considérée dans son intégralité, la santé de l'homme devient, ainsi, un attribut de la vie, une ressource pour le service au prochain et une ouverture à l'accueil du salut.
15. En l'année de grâce du Jubilé, - «année de la rémission des péchés et des peines dues aux péchés, année de la réconciliation entre les adversaires, année de multiples conversions et de pénitence sacramentelle et extra-sacramentelle» - (Tertio millennio adveniente, n. 14), j'invite les pasteurs, les prêtres, les religieux et les religieuses, les fidèles et les hommes de bonne volonté à relever avec courage les défis qui se présentent dans le monde de la souffrance et de la santé.
Que le Congrès eucharistique international, qui sera célébré à Rome en l'An 2000, devienne le centre idéal d'où irradient prières et initiatives aptes à rendre vive et opérante la présence du divin Samaritain dans le monde de la santé.
Je souhaite de tout coeur que, grâce à la contribution des frères et soeurs de toutes les Eglises chrétiennes, la célébration du Jubilé de l'An 2000 puisse marquer le développement d'une collaboration oecuménique dans le service plein d'amour aux malades, afin de témoigner de façon compréhensible à tous de la recherche de l'unité sur les voies concrètes de la charité.
J'adresse un appel spécifique aux Organismes internationaux politiques, sociaux et médicaux, afin que dans chaque partie du monde, ils deviennent les promoteurs convaincus de projets concrets pour la lutte contre ce qui porte atteinte à la dignité et à la santé de la personne.
Sur notre chemin de participation active aux expériences de nos frères et soeurs malades, que nous accompagne la Vierge Marie, qui, sous la croix (cf. Jn 19, 25), a partagé les souffrances du Fils et, devenue experte en souffrance, a exercé sa protection constante et bienveillante sur ceux qui vivent dans le corps et dans l'esprit les limites et les blessures de la condition humaine.
A Elle, Santé des malades et Reine de la paix, je confie les malades et tous ceux qui leur sont proches, afin qu'à travers une intercession maternelle, elle les aide à devenir les promoteurs de la civilisation de l'amour.
Avec ces souhaits, je donne à tous une Bénédiction apostolique particulière.
De Castel Gandolfo, le 6 août 1999, Transfiguration du Seigneur

 

 

 


2001

Message de Jean Paul II pour la  IXème Journée Mondiale du Malade, 11 février 2001
     1. Enrichie par la grâce du grand Jubilé et par la contemplation du mystère du Verbe incarné dans lequel la douleur humaine trouve sa "référence suprême et la plus certaine" (Salvifici doloris, n. 31), la communauté chrétienne s'apprête à vivre, le 11 février 2001, la IX Journée mondiale du Malade. La cathédrale de Sydney, en Australie, est le lieu désigné pour célébrer un événement si significatif. Le choix du continent australien, avec sa richesse culturelle et ethnique, met en lumière le lien étroit de la communion ecclésiale:  celle-ci dépasse les distances, favorisant la rencontre entre des identités culturelles diverses, fécondées par l'unique annonce libératrice du salut.

La cathédrale de Sydney est consacrée à la Vierge Marie, Mère de l'Eglise. Cela souligne la dimension mariale de la Journée mondiale du Malade qui, depuis neuf ans désormais, se renouvelle le jour de la fête de Notre-Dame de Lourdes. Marie, en tant que Mère aimante, fera ressentir, une fois de plus, sa protection non seulement à l'égard des malades du continent australien, mais également à l'égard de ceux du monde entier, ainsi que de ceux qui mettent leur compétence professionnelle et souvent, toute leur existence, à leur service.

La Journée sera en outre, comme par le passé, une occasion de prière et de soutien pour les innombrables instituts consacrés au soin des personnes qui souffrent. Elle sera un motif d'encouragement pour tant de prêtres, religieux, religieuses et laïcs croyants, qui au nom de l'Eglise, s'efforcent de répondre aux attentes des personnes malades, en privilégiant les plus faibles, et en luttant pour que la culture de la mort soit vaincue et que triomphe partout la culture de la vie (cf. Evangelium vitae, n. 100). Ayant partagé moi aussi à plusieurs reprises, au cours de ces années, l'expérience de la maladie, j'ai compris toujours plus clairement sa valeur pour mon ministère pétrinien et pour la vie même de l'Eglise. En exprimant ma solidarité affectueuse à ceux qui souffrent, je les invite à contempler avec foi le mystère du Christ, crucifié et ressuscité, pour arriver à découvrir dans leur vie douloureuse le dessein bienveillant de Dieu. Ce n'est qu'en regardant Jésus, "homme de douleur, familier de la souffrance" (Is 53, 3), qu'il est possible de trouver la sérénité et la confiance.

2. En cette Journée mondiale du Malade, qui a pour thème La nouvelle évangélisation et la dignité de l'homme qui souffre, l'Eglise entend mettre l'accent sur la nécessité d'évangéliser de façon renouvelée ce domaine de l'expérience humaine, pour favoriser son orientation vers le bien-être intégral de la personne et le progrès de toutes les personnes dans toutes les parties du monde.

Le traitement efficace des diverses pathologies, l'engagement en vue d'autres recherches et l'investissement de ressources adaptées constituent des objectifs louables, poursuivis avec succès dans diverses parties de la planète. Tout en applaudissant les efforts accomplis, on ne peut toutefois ignorer que tous les hommes ne jouissent pas des mêmes possibilités. J'adresse donc un appel pressant afin que l'on se prodigue pour favoriser le développement nécessaire des services médicaux dans les divers pays, encore nombreux, qui se trouvent dans l'impossibilité d'offrir à leurs habitants des conditions de vie décentes et une protection en matière de santé. Je souhaite, en outre, que les innombrables potentiels de la médecine moderne soient placés au service effectif de l'homme et appliqués dans le plein respect de sa dignité.

Au cours de ces deux mille ans d'histoire, l'Eglise a toujours cherché à soutenir le progrès thérapeutique en vue d'une aide toujours plus qualifiée aux malades. Dans les diverses situations, elle est intervenue par tous les moyens à sa disposition pour que soient respectés les droits de la personne et que soit toujours poursuivi l'authentique bien-être de l'homme (cf. Populorum progressio, n. 34). Aujourd'hui également, le Magistère, fidèle aux principes de l'Evangile, ne cesse de proposer les critères moraux qui peuvent orienter le monde de la médecine dans l'approfondissement des aspects de la recherche encore insuffisamment éclaircis, sans porter atteinte aux exigences qui jaillissent d'un authentique humanisme.

3. Chaque jour, je me rends en esprit en pèlerinage dans les hôpitaux et les maisons de santé, où vivent des personnes de tout âge et de tous les milieux. Je voudrais en particulier m'arrêter aux côtés des malades, des parents et du personnel médical. Il s'agit de lieux  qui  constituent des sortes de sanctuaires, dans lesquels les personnes participent au mystère pascal du Christ. Même le plus distrait est amené en ce lieu à se poser des questions sur son existence et sur sa signification, sur la cause de son mal, de la souffrance et de la mort (cf. Gaudium et spes, n. 10). Voilà pourquoi il est important que ne manque jamais dans de telles structures une présence qualifiée et significative des croyants.

Comment ne pas adresser alors un appel pressant aux professionnels de la médecine et de l'assistance, afin qu'ils apprennent du Christ, médecin des âmes et des corps, à être pour leurs frères d'authentiques "bons Samaritains"? En particulier, comment ne pas souhaiter que ceux qui se consacrent à la recherche oeuvrent sans répit pour trouver les moyens adaptés pour promouvoir la santé intégrale de l'être humain et combattre les conséquences des maladies? Comment ne pas souhaiter, en outre, à ceux qui se consacrent directement au soin des malades, d'être toujours attentifs aux nécessités de ceux qui souffrent, en conjuguant dans l'exercice de leur profession compétence et humanité?

Les hôpitaux, les centres pour malades ou pour personnes âgées, et chaque maison où sont accueillies les personnes qui souffrent, constituent des milieux privilégiés de la nouvelle évangélisation, qui doit s'engager afin que résonne précisément dans ces lieux le message de l'Evangile, porteur d'espérance. Seul Jésus, le divin Samaritain, est pour chaque être humain à la recherche  de  la  paix et du salut, la réponse pleinement satisfaisante aux attentes les plus profondes. Le Christ est le Sauveur de tout homme et de tout l'homme. C'est pourquoi l'Eglise ne se lasse jamais de L'annoncer, afin que le monde de la maladie et la recherche de la santé soient vivifiés par sa lumière.

Il est donc important qu'au début du troisième millénaire chrétien, l'on apporte un élan renouvelé à l'évangélisation du monde de la santé comme lieu particulièrement indiqué pour devenir un laboratoire précieux de la civilisation de l'amour.

4. Au cours des dernières années, l'intérêt pour la recherche scientifique dans le domaine médical et pour la modernisation des structures médicales s'est progressivement accru. On ne peut que considérer avec satisfaction cette tendance, mais il faut répéter dans le même temps la nécessité que celle-ci soit toujours guidée par la préoccupation de rendre un service effectif au malade, en le soutenant de façon efficace dans la lutte contre la maladie. Dans cette perspective, on parle toujours plus d'assistance "holistique", c'est-à-dire qui prend en compte les nécessités biologiques, psychologiques, sociales et spirituelles du malade et de ceux qui l'entourent. En particulier, en ce qui concerne les médicaments, les thérapies et les interventions chirurgicales, il est nécessaire que l'expérimentation clinique ait lieu dans le respect absolu de la personne et avec une claire conscience des risques, et donc des limites, que celle-ci comporte. Dans ce domaine, les professionnels chrétiens sont appelés à témoigner de leurs convictions éthiques, en se laissant constamment illuminer par la foi.

L'Eglise apprécie l'effort de ceux qui, s'engageant avec dévouement et professionnalisme dans la recherche et l'assistance, contribuent à élever la qualité du service même qui est offert aux malades.

5. La répartition équitable des biens, voulue par le Créateur, constitue un impératif urgent également dans le domaine de la santé:  il faut que cesse pour toujours l'injustice qui dure et qui, en particulier dans les pays pauvres, prive une grande partie de la population des soins indispensables à la santé. Il s'agit d'un grave scandale, face auquel les responsables des nations ne peuvent manquer de se sentir engagés à mettre en oeuvre tous les efforts possibles, afin que l'on donne à ceux qui manquent de moyens matériels la possibilité d'accéder tout au moins aux soins médicaux de base. Promouvoir la "santé de tous" est un devoir fondamental pour chaque membre de la Communauté internationale; pour les chrétiens ensuite, il s'agit d'un engagement intimement lié au témoignage de leur foi. Ils savent qu'ils doivent proclamer de façon concrète l'Evangile de la vie, en promouvant son respect et en refusant toute forme d'attentat contre celle-ci, de l'avortement à l'euthanasie. C'est dans ce contexte que se situe également la réflexion sur l'utilisation des ressources disponibles:  leur limitation exige de fixer des critères moraux clairs visant à illuminer les décisions des patients ou de leurs tuteurs face à des traitements extraordinaires, coûteux et risqués. De toute façon, il faudra éviter de tomber dans des formes d'acharnement thérapeutique (cf. Evangelium vitae, n. 65).

Je voudrais ici rendre hommage à tous ceux, personnes et structures, et en particulier aux Instituts religieux, qui accomplissent un service généreux dans ce secteur, en répondant avec courage aux besoins urgents de personnes et de populations dans des régions ou des pays très pauvres. L'Eglise leur exprime son appréciation renouvelée pour  la  contribution  qu'ils  continuent à apporter dans ce domaine apostolique vaste et délicat. Je voudrais exhorter en particulier les membres des familles religieuses engagées dans la pastorale de la santé afin qu'ils sachent répondre avec audace aux défis du troisième millénaire, en suivant les pas de leurs Fondateurs. Face aux nouveaux drames et aux maladies qui ont remplacé les fléaux du passé, l'oeuvre de "bons Samaritains", capables d'offrir aux malades les soins nécessaires, en ne les privant pas, dans le même temps, du soutien spirituel pour vivre dans la foi leur situation difficile, est urgente.

6. J'adresse une pensée affectueuse au grand nombre de religieux et de religieuses, qui, dans les hôpitaux et les centres médicaux "de frontière", assistés par un nombre toujours croissant de laïcs, écrivent des pages merveilleuses de charité évangélique. Ils travaillent souvent au milieu de conflits et de guerres impressionnants et risquent chaque jour leur vie pour sauver celle de leurs frères. Malheureusement, nombreux sont ceux qui meurent à cause de leur service à l'Evangile de la Vie.

Je désire également rappeler les nombreuses Organisations non-gouvernementales, nées au cours de ces dernières années, pour venir en aide aux personnes les moins favorisées dans le domaine de la santé. Celles-ci peuvent compter sur la contribution de volontaires "sur le terrain" ainsi que sur la générosité d'une vaste couche de personnes qui soutiennent économiquement leur action. J'encourage chacun à poursuivre cette oeuvre de grand mérite, qui, dans de nombreuses nations, engendre une forte sensibilisation des consciences.

Je m'adresse enfin à vous, chers malades et généreux professionnels de la santé. Cette Journée mondiale du Malade se déroule quelques jours après la conclusion de l'Année jubilaire. Celle-ci constitue donc une invitation renouvelée à contempler le visage du Christ, fait homme il y a deux mille ans pour racheter l'homme. Chers frères et soeurs, proclamez et témoignez avec une disponibilité généreuse l'Evangile de la vie et de l'espérance. Annoncez que le Christ est le réconfort de ceux qui vivent dans la pauvreté et les difficultés; il est la force de ceux qui traversent des moments de fatigue et de vulnérabilité; il est le soutien de ceux qui oeuvrent passionnément afin d'assurer à tous de meilleures conditions de vie et de santé.

Je vous confie à Marie, Mère de l'Eglise, à laquelle, comme je le rappelais au début, est consacrée la cathédrale de Sydney, centre idéal de la IXe Journée mondiale du Malade. Que la Vierge de la Consolation fasse ressentir sa protection maternelle à tous ses fils dans l'épreuve; qu'elle vous aide à témoigner au monde de la tendresse de Dieu et qu'elle fasse de vous des icônes vivantes de son Fils.

Avec  ces  souhaits,  je vous donne, ainsi qu'à tous ceux qui vous sont chers, une Bénédiction apostolique particulière.

De Castel Gandolfo, le 22 août 2000. 

 

 

11 février 2001, aux malades, à Rome. ORLF 20.2.2001
     L’adhésion généreuse des personnes qui souffrent à la volonté du Seigneur constitue toujours une grande leçon de vie.
     L’Église compte beaucoup sur le soutien de ceux qui sont éprouvés par la maladie ; leur sacrifice, parfois également peu compris, accompagné d’une intense prière, apparaît mystérieusement efficace pour la diffusion de l’Évangile et pour le bien de tout le Peuple de Dieu.
     Chers frères et soeurs, je voudrais vous répéter aujourd’hui mon plus vif remerciement pour votre mission silencieuse dans l’Église. Soyez toujours profondément persuadés qu’elle imprime une force extraordinaire au chemin de toute la communauté ecclésiale.
     La douleur physique et la douleur spirituelle marquent, plus ou moins profondément, la vie de chacun et il est nécessaire que la lumière de l’Évangile illumine également cet aspect de l’existence humaine.
     Chers amis qui êtes des malades, c’est vous qui comprenez en particulier combien la Croix est paradoxale, car il vous est donné de ressentir le mystère de la douleur dans votre chair même. Lorsqu’en raison d’une maladie grave les forces viennent à manquer, les projets, longtemps cultivés dans son coeur, s’éloignent. A la souffrance physique s’ajoute souvent la souffrance spirituelle, due à un sens de solitude qui tenaille les personnes. Dans la société d’aujourd’hui, une certaine culture considère la personne malade comme un obstacle encombrant, ne reconnaissant pas la contribution précieuse qu’elle apporte à la communauté au plan spirituel. Il est nécessaire et urgent de redécouvrir la valeur de la Croix partagée avec le Christ.
     A Lourdes, le 11 février 1858, la Madone dit à Bernadette : « Je ne te promets pas que tu seras heureuse en ce monde, mais dans l’autre ». Au cours d’une autre apparition, elle l’invita à tourner le regard vers le ciel. Écoutons à nouveau, comme si elles nous étaient adressées, ces exhortations de la Mère céleste : elles constituent des invitations à savoir évaluer d’une juste manière les réalités terrestres, en sachant que nous sommes destinés à une existence éternelle. Elles constituent un soutien pour supporter avec patience les contrariétés, les douleurs et les maladies, dans la perspective du Paradis. Penser au Paradis est parfois apparu à certains comme une fuite de la vie quotidienne concrète; au contraire, la lumière de la foi fait mieux comprendre, et donc accepter de façon plus consciente, la dure expérience de la souffrance. Sainte Bernadette elle-même, durement éprouvée par le mal physique, s’exclama un jour : « Croix de mon Sauveur, Croix Sainte, Croix digne d’adoration, en vous seule je place ma force, mon espérance et ma joie. Vous êtes l’arbre de la Vie, l’échelle mystérieuse qui unit la terre au Ciel et l’autel sur lequel je veux me sacrifier, en mourant pour Jésus ».
     Puissent les paroles de la Vierge à Lourdes retentir comme un réconfort intérieur pour vous, frères et soeurs qui souffrez, à qui je renouvelle l’expression de ma solidarité fraternelle. Dans la maladie vous pourrez être pour de nombreuses personnes, si vous accueillez la volonté divine, une parole d’espérance et même de joie, car vous dites à l’homme de notre temps, souvent inquiet et incapable de donner un sens à la douleur, que Dieu ne nous a pas abandonnés. En vivant avec foi votre situation, vous témoignez que Dieu est proche. Vous proclamez que cette proximité tendre et aimante du Seigneur fait qu’il n’existe pas une saison de la vie qui ne vaille la peine d’être vécue. La maladie et la mort ne sont pas des réalités à fuir ou à censurer, comme étant inutiles, mais elles constituent toutes les deux les étapes d’un chemin.

 

 

 

16 février 2001, aux Servantes de Marie Ministre des Malades, audience pour le 175ème anniversaire de leur fondation. ORLF 27.3.2001
     L’attention aux malades à domicile et gratuitement, possède un écho neuf à notre époque, où l’on cherche très souvent à occulter dans la vie quotidienne la réalité de la maladie ou de la mort. A travers ce service vous proclamez de façon très éloquente que la maladie n’est pas un poids insupportable pour l’être humain, et qu’elle ne prive pas le patient de sa pleine dignité de personne. Au contraire, elle peut se transformer en une expérience qui enrichit le malade et toute sa famille. De cette façon, en tendant la main à la personne qui souffre, votre mission se transforme également en une aide pour soutenir la force d’âme des proches et en un soutien subtil à la cohésion dans les foyers domestiques où personne ne doit se sentir un poids.

 

 

- le 4 juin 2001, lors d’une rencontre avec des enfants malades. ORLF 12.6.2001
     Avec vous, je désire rendre grâce à Dieu pour tout bien. Il arrive qu’il soit difficile pour celui qui souffre de se rendre compte que dans la maladie s’accomplit également un grand bien, que ce soit en lui ou dans les coeurs de tous ceux qui lui sont proches.

 

 


2002

 

 


Message de Jean Paul II pour la Xème Journée Mondiale du Malade, 11 février 2002
1. Depuis quelques années, le 11 février, date à laquelle l'Eglise commémore l'apparition de la Madone à Lourdes, est associé de façon opportune à un événement important:  la célébration de la Journée mondiale du Malade. L'année 2002 marque la dixième célébration de ce genre, qui aura lieu dans le célèbre centre de pèlerinage marial du sud de l'Inde, le Sanctuaire de la "Madone du Salut" à Vailankanny, connu sous le nom de "Lourdes de l'Orient" (Angelus, 31 juillet 1988, cf. ORLF n. 31 du 2 août 1988). Sûrs de l'aide de la Mère Divine à l'égard de leurs besoins, avec une profonde dévotion et confiance, des millions de personnes se rendent vers ce sanctuaire situé sur les rives du Golfe du Bengale, dans le calme environnant des palmeraies.Vailankanny attire non seulement les pèlerins chrétiens, mais aussi de nombreux fidèles d'autres religions, en particulier les hindous, qui voient dans la Madone du Salut la Mère bienveillante et compatissante de l'humanité qui souffre. Dans un pays à la religiosité si antique et profonde tel que l'Inde, ce sanctuaire dédié à la Mère de Dieu est véritablement un point de rencontre pour les membres de différentes religions, et un exemple exceptionnel d'harmonie et d'échange interreligieux.

La Journée mondiale du Malade commencera par un moment d'intense prière pour tous ceux qui souffrent, qui sont infirmes. De cette façon, nous exprimerons notre solidarité envers ceux qui souffrent, une solidarité qui naît de notre conscience de la nature mystérieuse de la souffrance et de sa place dans le projet d'amour de Dieu pour chaque personne. La Journée se poursuivra par une réflexion et une étude approfondies sur la réponse chrétienne au monde de la souffrance humaine, qui semble croître de jour en jour, en particulier en raison des catastrophes naturelles et des choix hasardeux opérés par certaines personnes et certaines sociétés. En examinant à nouveau le rôle et la mission des structures médicales, des hôpitaux et du personnel de santé chrétiens, cette réflexion soulignera et réaffirmera les authentiques valeurs chrétiennes qui devraient les inspirer. Marcher sur les traces de Jésus, le Divin Thaumaturge, qui est venu "pour qu'ils aient la vie et qu'ils l'aient surabondante" (Jn 10, 10) - thème de la réflexion de la Journée - implique une prise de position sans ambiguïté en faveur de la culture de la vie et un engagement total en défense de la vie, de sa conception à sa mort naturelle.
2. Chercher des moyens nouveaux et efficaces de soulager la douleur est une quête juste, mais la souffre demeure toutefois un élément fondamental de la vie humaine. D'une certaine façon, elle est aussi profonde que l'homme lui-même et touche jusqu'à son essence (cf. Salvifici doloris, n. 3). La recherche et les traitements médicaux n'expliquent ni ne vainquent entièrement la souffrance. Dans sa profondeur et sous ses multiples formes, elle doit être considérée dans une perspective qui transcende son aspect purement physique. Les différentes religions de l'humanité ont toujours cherché à répondre à la question du sens de la souffrance, et elles reconnaissent le besoin de faire preuve de compassion et de bonté envers tous ceux qui souffrent.

C'est pourquoi les convictions religieuses ont donné naissance à des pratiques médicales visant à traiter et à soigner les maladies, et l'histoire des diverses religions témoigne de formes organisées d'assistance médicale remontant à des temps très anciens.

Bien que l'Eglise considère que les interprétations non-chrétiennes de la souffrance possèdent de nombreux éléments valides et nobles, sa compréhension de ce grand mystère humain est unique. Afin de découvrir le sens fondamental et définitif de la souffrance, "nous devons tourner nos regards vers la révélation de l'amour divin, source ultime du sens de tout ce qui existe" (Salvifici doloris, n. 13). La réponse à la question de la signification de la souffrance a été "donnée par Dieu à l'homme dans la Croix de Jésus-Christ" (ibid., n. 13). La souffrance, séquelle du péché originel, revêt un sens nouveau; elle devient participation à l'oeuvre salvifique de Jésus-Christ (cf. Catéchisme de l'Eglise catholique, n. 1521). A travers la souffrance sur la Croix, le Christ a vaincu le mal et nous a permis également de le surmonter. Nos souffrances acquièrent un sens et une valeur lorsqu'elles sont unies aux siennes. En tant que Dieu et homme, le Christ a assumé les souffrances de l'humanité et en lui, la souffrance humaine elle-même acquiert une signification rédemptrice. Dans cette union entre l'humain et le divin, la souffrance produit le bien et remporte la victoire sur le mal. En exprimant ma profonde solidarité avec tous ceux qui souffrent, je prie sincèrement pour que la célébration de la Journée mondiale du Malade représente pour eux un moment providentiel qui ouvre un nouvel horizon de signification pour leur vie.

La foi nous enseigne à rechercher la signification ultime de la souffrance dans la Passion, la Mort et la Résurrection du Christ. La réponse chrétienne à la douleur et à la souffrance n'est jamais la passivité. Poussée par la charité chrétienne, qui trouve son expression suprême dans la vie et dans l'oeuvre de Jésus qui "a passé en faisant le bien" (Ac 10, 38), l'Eglise va à la rencontre des malades et de ceux qui souffrent, leur apportant réconfort et espérance. Il ne s'agit pas d'un simple exercice de bienfaisance, mais d'un geste motivé par la compassion et la sollicitude, qui conduit à l'assistance et au service dévoué. Cela comporte en ultime analyse le don généreux de soi aux autres, et en particulier à ceux qui souffrent (cf. Salvifici doloris, n. 29). La parabole évangélique du Bon Samaritain explique bien les très nobles sentiments et la réponse d'une personne confrontée à un autre être humain qui souffre et qui est dans le besoin. Un Bon Samaritain est quelqu'un qui s'arrête pour répondre aux besoins de tous ceux qui souffrent.
3. Je pense ici aux innombrables hommes et femmes, partout dans le monde, qui sont engagés dans le domaine de la santé, tels que les directeurs de centres de soins médicaux, les aumôniers, les médecins, les chercheurs, les infirmières, les pharmaciens, le personnel paramédical et les volontaires. Comme je l'ai mentionné dans mon Exhortation post-synodale Ecclesia in Asia, en de nombreuses occasions, lors de mes visites aux Eglises dans les différentes parties du monde, j'ai été profondément ému par l'extraordinaire témoignage chrétien de divers groupes de personnes travaillant de le domaine de la santé, en particulier de ceux qui travaillent auprès des handicapés et des malades en phase terminale, ainsi que ceux qui se battent contre la diffusion des nouvelles maladies comme le SIDA (n. 36). A travers la célébration de la Journée mondiale du Malade, l'Eglise exprime sa gratitude et sa reconnaissance pour le service désintéressé des nombreux prêtres, religieux et laïcs engagés dans le secteur de la santé, qui s'occupent généreusement des malades, des personnes qui souffrent et des mourants, puisant force et inspiration dans leur foi dans le Seigneur Jésus et dans l'image évangélique du Bon Samaritain. Le commandement du Seigneur lors de la dernière Cène:  "Vous ferez cela en mémoire de moi", outre au partage du pain, se réfère également au corps donné et au sang versé par le Christ pour nous (cf. Lc 22, 19-20), en d'autres termes, au don de soi aux autres. Une expression particulièrement significative de ce don de soi se trouve dans le service aux malades et aux personnes qui souffrent. C'est pourquoi ceux qui se consacrent à ce service trouveront toujours dans l'Eucharistie une source inépuisable de force et un encouragement à une générosité toujours nouvelle.
4. Dans son approche des malades et des personnes qui souffrent, l'Eglise est guidée par une vision précise et complète de la personne humaine, "créée à l'image de Dieu et dotée par Dieu de dignité et de droits humains inaliénables" (Ecclesia in Asia, n. 33). Par conséquent, l'Eglise insiste sur le principe que tout ce qui est technologiquement faisable n'est pas moralement admissible. Les progrès remarquables accomplis récemment dans le domaine de la science et des techniques médicales nous confère à tous une immense responsabilité en ce qui concerne le don de la vie qui vient de Dieu et qui demeure toujours un don, à toutes ses étapes et dans toutes ses conditions. Nous devons être vigilants face à toute violation et suppression possibles de la vie. "Nous sommes [...] les gardiens de la vie, et non ses propriétaires [...] Dès le moment de la conception, la vie humaine implique l'action créatrice de Dieu et elle a pour toujours un lien spécial avec le Créateur, source de la vie et son terme unique" (Ecclesia in Asia, n. 35).

Solidement ancrées dans la charité, les institutions médicales chrétiennes poursuivent la mission de Jésus de prendre soin des faibles et des malades. En tant que lieux où la culture de la vie est affirmée et assurée, je suis certain qu'elles continueront à répondre aux attentes que chaque membre souffrant de l'humanité a placées en elles. Je prie pour que Marie, Santé des Malades, continue d'accorder sa protection bienveillante à tous ceux qui sont blessés dans leur corps et leur esprit, et intercède pour ceux qui prennent soin d'eux. Puisse-t-elle nous aider à unir nos souffrances à celles de son Fils tandis que nous nous acheminons avec une joyeuse espérance vers le salut de la Maison du Père.

De Castel Gandolfo, le 6 août 2001.

 

 

 

 

11 février 2002, discours à l’issue de la Messe à Saint Pierre de Rome. ORLF 19.2.2002
     « Afin qu’ils aient la vie et qu’ils l’aient en abondance » (Jn 10,19). Ces paroles invitent à une prise de position claire en faveur de la vie et à un engagement sincère en vue de sa défense, de sa conception jusqu’à sa fin naturelle. La vie humaine est un don de Dieu et en tant que tel, elle doit être toujours vécue, même dans les situations les plus critiques. A cet égard, il est éloquent d’entendre le témoignage de nombreuses personnes, dont certaines sont présentes ici ce soir, qui, bien qu’étant depuis des années clouées au lit par la maladie, sont sereines car elles savent combien la contribution de leur souffrance et de leur prière est précieuse pour l’Église.
     Il est juste de lutter contre la maladie, car la santé est un don de Dieu. Il est important dans le même temps de savoir lire le dessein de Dieu lorsque la souffrance frappe à la porte de notre vie. La clé de lecture de ce mystère pour nous, croyants, est la Croix du christ. L Verbe incarné a répondu à notre faiblesse en l’assumant pleinement sur lui, au Golgotha. Depuis lors, la souffrance a acquis un sens qui la rend particulièrement précieuse. Depuis lors, la douleur, dans chacune de ses manifestations, revêt une signification nouvelle et particulière, car elle devient partie intégrante de l’oeuvre salvifique du Rédempteur (Cf Catéchisme de l’Église Catholique, 1521). Ce n’est que si elles sont unies aux nôtres que nos peines acquièrent toute leur signification et leur valeur. Illuminées par la foi, elles deviennent une source d’espérance et de salut.
     La Journée Mondiale du Malade nous rappelle également qu’à côté de chaque personne souffrante, il doit y avoir un frère ou une soeur animés par la charité. Comme le bon Samaritain, dont Jésus parle dans la célèbre parabole évangélique, chaque croyant est appelé à offrir de l’amour à celui qui se trouve dans l’épreuve. Il ne faut jamais « passer outre  » ! Au contraire, il faut s’arrêter, se pencher sur l’homme effondré et accablé, en soulageant son fardeau et ses difficultés. C’est ainsi qu’est proclamé l’Évangile du réconfort et de la charité. Tel est le témoignage que les hommes de notre temps attendent de tous les chrétiens.

le 2 mai 2002, au Conseil Pontifical pour la Pastorale des Services de la Santé. ORLF 14.5.2002
     Sur la base de la Lettre apostolique Novo Millennio Ineunte, votre Assemblée s’est donné pour objectif de réfléchir sur la meilleure façon de montrer le Visage du Christ souffrant et glorieux, illuminant par l’Évangile le monde de la santé, de la souffrance et de la maladie, sanctifiant le malade et les agents de la santé et promouvant la coordination de la pastorale de la santé dans l’Église.
     En ce temps pascal, nous contemplons le Visage glorieux de Jésus, après avoir médité, en particulier au cours de la Semaine Sainte, sur son Visage souffrant. Ce sont deux dimensions dans lesquelles se trouve le noyau de l’Évangile et du ministère pastoral de l’Église.
     Dans la Lettre apostolique Novo Millennio Ineunte, j’ai écrit que Jésus « au moment où il s’identifie avec notre péché, « abandonné » par le Père (...) « s’abandonne » entre les mains de son Père ». De cette façon, il vit « en même temps l’union profonde avec son Père, qui est par nature source de joie et de béatitude, et l’agonie jusqu’au cri de l’abandon » (NMI,26).
     Dans le Visage souffrant du Vendredi Saint est cachée la vie de Dieu offerte pour le salut du monde. A travers le Crucifié, notre contemplation doit s’ouvrir au Ressuscité. Réconfortée par cette expérience, l’Église est toujours prête à reprendre son chemin pour annoncer le Christ au monde.
     Votre Assemblée plénière actuelle attire l’attention sur des programmes qui visent à illuminer grâce à la lumière du Visage souffrant et glorieux du Christ tout l’univers de la santé. Il est essentiel d’approfondir la réflexion sur les thèmes liés à la santé, à la maladie et à la souffrance dans cette perspective, en se laissant guider par un conception de la personne humaine et de son destin fidèle au plan salvifique de  Dieu.   
     Les nouvelles frontières ouvertes par le progrès de la science de la vie, et les applications qui en découlent, ont placé un pouvoir et une responsabilité immense entre les mains de l’homme. Si la culture de la mort prévaut, si, dans le domaine de la médecine et de la recherche biomédicale, les hommes se laissent conditionner par des choix égoïstes ou par des ambitions prométhéennes, il sera inévitable que la dignité humaine et la vie elle-même ne soient dangereusement menacées. Si, en revanche, le travail dans cet important secteur de la santé est marqué par la culture de la vie, guidée par une conscience droite, l’homme trouvera des réponses toujours valables à ses attentes les plus profondes.
     Votre Conseil Pontifical ne manquera pas d’apporter sa contribution à une nouvelle évangélisation de la souffrance, que le Christ assume et transfigure dans le triomphe de la Résurrection. A cet égard, la vie de prière et le recours aux Sacrements sont essentiels, et en leur absence le chemin spirituel non seulement des malades, mais également de ceux qui les assistent, devient difficile.
     Les domaines de la santé et de la souffrance se trouvent aujourd’hui confrontés à des problèmes complexes et nouveaux, qui exigent un engagement commun de la part de tous. Le petit nombre de religieuses engagées dans ce domaine, le délicat ministère des aumôniers dans les hôpitaux, la difficulté à organiser au niveau des Églises locales une pastorale adaptée et incisive de la santé et l’approche avec le personnel de la santé, qui n’est pas toujours en harmonie avec les orientations chrétiennes, constituent un ensemble de thèmes aux aspects problématiques qui n’échappent certainement pas à votre réflexion attentive.
     Fidèle à sa mission, votre dicastère continuera de manifester la sollicitude pastorale de l’Église pour les malades ; elle aidera tous ceux qui prennent soin des personnes souffrantes, en particulier de ceux qui travaillent dans les hôpitaux, à avoir toujours une attitude de respect pour la vie et la dignité de l’être humain. Pour poursuivre de tels objectifs, la collaboration généreuse avec les Organisations internationales de la santé s’avère utile.
     Que le Seigneur, Bon Samaritain de l’humanité qui souffre, vous assiste toujours. Que la Très Sainte Vierge, Santé des Malades, vous soutienne dans votre service, et soit votre modèle dans l’accueil et dans l’amour.

 

 

 

 

2003

 


Message du Pape Jean Paul II, pour la XIème Journée Mondiale du Malade, 11 février 2003
1. «Et nous, nous avons contemplé et nous attestons que le Père a envoyé son Fils comme Sauveur du monde... Nous avons reconnu l’amour que Dieu a pour nous et nous y avons cru» (1Jn 4, 14.16).
Ces paroles de l’Apôtre Jean synthétisent bien aussi les finalités de la Pastorale de la santé, à travers laquelle l’Église, reconnaissant la présence du Seigneur dans les frères qui souffrent, s’attache à leur porter la bonne nouvelle de l’Évangile et à offrir à chacun d’eux des signes crédibles d’amour.
C'est le context de la XIe Journée mondiale du Malade, qui se tiendra le 11 février 2003 à Washington D.C., aux États-Unis, dans la basilique de l’Immaculée Conception, sanctuaire national. Le lieu et le jour qui ont été choisis invitent les croyants à tourner leur regard vers la Mère du Seigneur. En se confiant à elle, l’Église se sent poussée à témoigner de la charité, de manière renouvelée, pour être une icône vivante du Christ, Bon Samaritain, dans toutes les situations de souffrance physique et morale du monde d’aujourd’hui.
Les interrogations pressantes sur la souffrance et sur la mort, dramatiquement présentes dans le c½ur de chaque homme malgré les tentatives faites continuellement par une mentalité sécularisée pour les occulter ou les ignorer, attendent des réponses pertinentes. Le chrétien, en particulier lorsqu’il est en présence d’expériences humaines tragiques, est appelé à témoigner de la vérité réconfortante du Christ ressuscité, qui prend sur lui les plaies et les maux de l’humanité, y compris la mort, et qui les convertit en occasions de grâce et de vie. Cette annonce et ce témoignage doivent être communiqués à tous, en tout point de la terre.
2. Grâce à la célébration de la prochaine Journée mondiale du malade, puisse l’Évangile de la vie et de l’amour retentir avec vigueur, spécialement en Amérique, où vivent plus de la moitié des catholiques ! «En Amérique, comme en d’autres parties du monde, un modèle de société où dominent les puissants, excluant et même éliminant les faibles, semble aujourd’hui se profiler: je pense ici aux enfants non nés, victimes sans défense de l’avortement; aux personnes âgées et aux malades incurables, parfois objet d’euthanasie; et à tant d’autres êtres humains mis en marge par la société de consommation et par le matérialisme. Et je ne puis oublier le recours non nécessaire à la peine de mort [...]. Un tel modèle de société porte l’empreinte de la culture de mort et est donc opposé au message évangélique» (Exhortation apostolique post-synodale Ecclesia in America, n. 63). Face à cette préoccupante réalité, comment ne pas placer, parmi les priorités pastorales, la défense de la culture de la vie ? Les catholiques qui travaillent dans le domaine médical et sanitaire ont la tâche urgente de faire leur possible pour défendre la vie lorsqu’elle est dans un plus grave danger, en agissant avec une conscience correctement formée, selon la doctrine de l’Église.
Les nombreux Centres de santé, à travers lesquels l’Église catholique offre un authentique témoignage de foi, d’espérance et de charité, participent de manière encourageante à la réalisation de cette noble fin. Jusqu’à présent, ils ont pu compter sur un nombre significatif de religieux et de religieuses pour garantir un service professionnel et pastoral de qualité. Je souhaite qu’une nouvelle floraison des vocations puisse permettre aux Instituts religieux de poursuivre leur ½uvre méritoire et même de l’intensifier par l’apport de nombreux bénévoles laïcs, pour le bien de l’humanité souffrante sur le Continent américain.
3. Ce domaine privilégié d’apostolat concerne toutes les Églises particulières. Il faut donc que chaque Conférence épiscopale s’emploie, notamment par des organismes appropriés, à promouvoir, à orienter et à coordonner la Pastorale de la santé, pour susciter chez le peuple de Dieu tout entier l’attention et la disponibilité à l’égard du monde si varié de la souffrance
Pour que ce témoignage d’amour soit toujours plus crédible, les agents de la Pastorale de la santé doivent agir en pleine communion entre eux et avec leurs Pasteurs. Cela est particulièrement urgent dans les hôpitaux catholiques, appelés, dans leur organisation, à refléter toujours mieux les critères évangéliques, tout en répondant aux nécessités modernes, comme le rappellent de manière insistante les directives sociales et morales du Magistère. Cela exige de la part des hôpitaux catholiques une action unitaire qui doit toucher tous les secteurs, y compris le secteur économique et structurel.
Puissent les hôpitaux catholiques être des centres de vie et d’espérance, où s’accroissent, en même temps que les aumôneries, les comités d’éthique, la formation du personnel infirmier laïc, l’humanisation des soins donnés aux malades, l’attention envers leurs familles et une sensibilité particulière à l’égard des pauvres et des marginaux ! Puisse le travail professionnel donner lieu à un authentique témoignage de charité, en tenant compte du fait que la vie est un don de Dieu, dont l’homme n’est que l’administrateur et le garant !
4. Une telle vérité doit être continuellement rappelée face au progrès des sciences et des techniques médicales, destinées aux soins et à une meilleure qualité de l’existence humaine. Le postulat fondamental reste en effet que la vie doit être protégée et défendue depuis sa conception jusqu’à sa fin naturelle.
Comme je l’ai rappelé dans la Lettre apostolique Novo millennio ineunte, «le service de l’homme nous impose de crier, à temps et à contretemps, que ceux qui tirent profit des nouvelles potentialités de la science, spécialement dans le domaine des biotechnologies, ne peuvent jamais se dispenser de respecter les exigences fondamentales de l’éthique, alors qu’ils font parfois appel à une solidarité discutable qui finit par créer des discriminations entre vie et vie, au mépris de la dignité propre à tout être humain» (n. 51).
Ouverte au progrès scientifique et technologique authentique, l’Église apprécie l’effort et le sacrifice de ceux qui, avec dévouement et compétence professionnelle, contribuent à élever la qualité du service offert aux malades, dans le respect de leur inviolable dignité. Tout acte thérapeutique, toute expérimentation, toute transplantation, doit tenir compte de cette vérité fondamentale. Il n’est donc jamais permis de tuer un être humain pour en guérir un autre. Et si, dans la phase terminale de la vie, on peut encourager les soins palliatifs en évitant l’acharnement thérapeutique, aucune action ou omission qui, par nature et dans les intentions de son auteur, viserait à procurer la mort, ne sera jamais licite.
5. Je souhaite vivement que la XIe Journée mondiale du Malade suscite dans les diocèses et dans les communautés paroissiales un engagement renouvelé pour la Pastorale de la santé. Une attention particulière doit être accordée aux malades qui demeurent à domicile, étant donné qu’on a tendance à écourter les séjours en hôpital, et que les malades sont souvent confiés à leurs familles. Dans les pays où les centres de soins font défaut, même les malades en phase terminale sont laissés à domicile. Les curés et tous les agents de Pastorale doivent veiller à ce que ne manque jamais aux malades la présence réconfortante du Seigneur à travers la Parole de Dieu et les Sacrements.
Le programme de formation des prêtres, des religieux et des religieuses réservera une place à la Pastorale de la santé, car c’est dans les soins aux malades plus qu’ailleurs que l’amour est crédible et qu’un témoignage d’espérance en la résurrection est donné.
6. Chers aumôniers, chers religieux et religieuses, médecins, infirmiers et infirmières, pharmaciens, personnel technique et administratif, assistants sociaux et bénévoles, la Journée mondiale du malade vous offre une occasion propice pour vous engager à être des disciples toujours plus généreux du Christ bon Samaritain. En ayant conscience de votre identité, découvrez chez ceux qui souffrent le Visage douloureux et glorieux du Seigneur ! Soyez prêts à porter assistance et à redonner espérance, en particulier aux personnes frappées par des maladies nouvelles, tel le Sida, ou par celles qui sévissent encore, comme la tuberculose, la malaria, la lèpre !
À vous, chers Frères et S½urs qui souffrez dans votre corps ou dans votre esprit, je souhaite de grand c½ur que vous sachiez reconnaître et accueillir le Seigneur qui vous appelle à être des témoins de l’Évangile de la souffrance, en regardant avec confiance et amour le Visage du Christ crucifié (cf. Novo millennio ineunte, n. 16), et en unissant vos souffrances aux siennes.
Je vous confie tous à la Vierge Immaculée, Notre-Dame de Guadalupe, Patronne de l’Amérique et Salut des Malades. Puisse-t-elle écouter l’invocation qui s’élève du monde de la souffrance, sécher les larmes de ceux qui sont dans la souffrance, être proche de ceux qui vivent leur maladie dans la solitude et, par sa maternelle intercession, aider les croyants qui ½uvrent dans le domaine de la santé à devenir des témoins crédibles de l’amour du Christ !
À chacun va mon affectueuse Bénédiction !
Du Vatican, le 2 février 2003.

 

 

 


2004

 

 

11 février 2004 – Message du Pape Jean Paul II pour la Journée Mondiale du Malade
A mon vénéré Frère
Javier Card. LOZANO BARRAGAN
Président du Conseil pontifical pour la Pastorale des Services de la Santé
1. La Journée mondiale du Malade, événement qui se déroule chaque année dans un continent différent, revêt cette fois une signification particulière. En effet, elle sera célébrée à Lourdes, en France, localité où la Vierge apparut le 11 février 1858 et qui est devenue depuis le but de nombreux pèlerinages. Dans cette région montagneuse, la Vierge a voulu manifester son amour maternel de manière toute spéciale aux personnes qui souffrent et aux malades. Depuis lors, elle continue à se rendre présente avec une sollicitude constante.
Ce sanctuaire a été choisi parce que l'année 2004 marque le 150 anniversaire de la proclamation du dogme de l'Immaculée Conception. En effet, ce fut le 8 décembre 1854 que mon prédécesseur d'heureuse mémoire, le Bienheureux Pie IX, par la Bulle Ineffabilis Deus, déclara "que la doctrine, qui tient que la bienheureuse Vierge Marie a été, au premier instant de sa conception, par une grâce et une faveur singulière du Dieu tout-puissant, en vue des mérites de Jésus Christ, Sauveur du genre humain, préservée intacte de toute souillure du péché originel, est une doctrine révélée par Dieu" (DS 2803; FC 397). A Lourdes, s'exprimant dans le dialecte du lieu, Marie déclara:  "Que soy era Immaculada Councepciou".
2. Par ces mots, la Vierge ne voulait-elle pas exprimer également le lien qui l'unit à la santé et à la vie? Si, par la faute originelle, la mort est entrée dans le monde, par les mérites de Jésus Christ, Dieu a préservé Marie de toute trace du péché, et le salut et la vie sont venus jusqu'à nous (cf. Rm 5, 12-21).
Le dogme de l'Immaculée Conception nous introduit au c½ur du mystère de la Création et de la Rédemption (cf. Ep 1, 4-12; 3, 9-11). Dieu a voulu donner à la créature humaine la vie en abondance (cf. Jn 10, 10), mettant toutefois comme condition à son initiative une réponse libre et pleine d'amour. En refusant ce don par la désobéissance qui mena au péché, l'homme a tragiquement interrompu le dialogue vital avec son Créateur. Au "oui" de Dieu, source de la plénitude de la vie, s'est opposé le "non" de l'homme, motivé par l'autosuffisance orgueilleuse, annonciatrice de mort (cf. Rm 5, 19).
Toute l'humanité fut lourdement entraînée dans ce refus de Dieu. Seule Marie de Nazareth, en prévision des mérites du Christ, fut conçue indemne de la faute originelle et entièrement ouverte au dessein divin, afin que le Père céleste puisse réaliser en elle le projet qu'il avait pour les hommes.
L'Immaculée Conception annonce la relation harmonieuse entre le "oui" de Dieu et le "oui" que Marie prononcera dans un abandon total, lorsque l'ange lui apportera l'annonce céleste (cf. Lc 1, 38). Son "oui", au nom de l'humanité, ouvre à nouveau au monde les portes du Paradis, grâce à l'incarnation du Verbe de Dieu dans son sein, oeuvre de l'Esprit Saint (cf. Lc 1, 35). Le projet originel de la création est ainsi restauré et affermi dans le Christ, et, dans ce projet, la Vierge Marie trouve, elle aussi, sa place.
3. Là se trouve la clé de voûte de l'histoire:  avec l'Immaculée Conception de Marie a commencé la grande oeuvre de la Rédemption, qui s'est achevée dans le sang précieux du Christ. En Lui, toute personne est appelée à se réaliser en plénitude jusqu'à la perfection de la sainteté (cf. Col 1, 28).
L'Immaculée Conception est donc l'aube prometteuse du jour radieux du Christ, qui, par sa mort et sa résurrection, rétablira l'harmonie complète entre Dieu et l'humanité. Si Jésus est la source de la vie qui triomphe de la mort, Marie est la mère attentive qui va au-devant des attentes de ses enfants, leur obtenant la santé de l'âme et du corps. Tel est le message que le sanctuaire de Lourdes propose constamment à ceux qui viennent prier et aux pèlerins. Tel est également le sens des guérisons corporelles et spirituelles que l'on constate à la grotte de Massabielle.
Depuis le jour de l'apparition à Bernadette Soubirous, Marie a "guéri" en  ce  lieu souffrances et maladies, redonnant aussi la santé du corps à nombre de ses enfants. Elle a cependant  opéré  des  prodiges  plus  surprenants encore dans le coeur  des croyants, les ouvrant à la rencontre avec son fils Jésus, réponse authentique aux attentes les plus profondes du coeur humain. L'Esprit Saint, qui la couvrit de son ombre au moment de l'Incarnation du Verbe, transforme le coeur de nombreux malades qui ont recours à elle. Même s'ils n'obtiennent pas le don de la santé corporelle, ils peuvent toujours recevoir un autre don bien plus important:  la conversion du coeur, source de paix et de joie intérieures. Ce don transforme leur existence et les rend apôtres de la Croix du Christ, qui est signe d'espérance, même au milieu des épreuves les plus dures et les plus difficiles.
4. Dans la Lettre apostolique Salvifici doloris, je soulignais que la souffrance appartient à la situation historique de l'homme, qui doit apprendre à l'accepter et à la surmonter (cf. n. 2). Mais comment pourrait-il y parvenir, si ce n'est grâce à la Croix du Christ?
Dans la mort et la résurrection du Rédempteur, la souffrance humaine trouve son sens le plus profond et sa valeur salvifique. Tout le poids des vicissitudes et des souffrances de l'humanité est condensé dans le mystère d'un Dieu qui, assumant notre nature humaine, s'est anéanti jusqu'à se faire "péché pour nous" (2 Co 5, 21). Sur le Golgotha, Il s'est chargé des fautes de tous les hommes et, dans la solitude de l'abandon, Il a crié vers son Père:  "Pourquoi m'as-tu abandonné?" (Mt 27, 46).
Du paradoxe de la Croix jaillit la réponse à nos questions les plus angoissantes. Le Christ souffre pour nous:  Il a pris sur Lui la souffrance de tous les hommes et Il l'en délivre. Le Christ souffre avec nous, nous offrant la possibilité de partager avec Lui nos souffrances. La souffrance humaine, unie à celle du Christ, devient moyen de salut. Voilà pourquoi le croyant peut dire avec saint Paul:  "En ce moment, je trouve ma joie dans les souffrances que j'endure pour vous, et je complète en ma chair ce qui manque aux épreuves du Christ pour son Corps, qui est l'Eglise" (Col 1, 24). La souffrance, acceptée avec foi, devient la porte d'entrée dans le mystère de la souffrance rédemptrice du Seigneur. Une souffrance qui n'enlève plus ni la paix ni le bonheur, car elle est éclairée par la lumière éclatante de la résurrection.
5. Au pied de la Croix, Marie souffre en silence; elle participe de manière toute spéciale aux souffrances de son Fils; établie Mère de l'humanité, elle est prête à intercéder pour que chacun obtienne le salut (cf. Jean-Paul II, Lettre apostolique Salvifici doloris, 25 [11 février 1984]).
A Lourdes, il n'est pas difficile de comprendre cette participation singulière de la Vierge à la mission salvifique du Christ. Le prodige de l'Immaculée  Conception  rappelle aux croyants une vérité fondamentale:  il est possible d'obtenir le salut à condition de participer docilement au projet du Père, qui a voulu racheter le monde par la mort et la résurrection de son Fils unique. Par le Baptême, le croyant est inséré dans ce dessein salvifique et il est libéré de la faute originelle. La maladie et la mort, tout en demeurant présentes dans notre existence terrestre, perdent toutefois leur sens négatif. A la lumière de la foi, la mort du corps, vaincue par la mort du Christ (cf. Rm 6, 4), devient le passage obligé vers la plénitude de la vie immortelle.
6. Notre temps a réalisé de grands progrès dans la connaissance scientifique de la vie, don fondamental de Dieu, dont nous sommes les gestionnaires. La vie doit être accueillie, respectée et défendue depuis son commencement jusqu'à son terme naturel. En même temps, la famille doit être protégée, car elle est le berceau de toute vie naissante.
Désormais, on parle couramment "d'ingénierie génétique", faisant référence aux possibilités extraordinaires d'intervention sur les sources mêmes de la vie que la science offre aujourd'hui. Tout progrès authentique en ce domaine ne peut qu'être encouragé, à condition qu'il respecte toujours les droits et la dignité de la personne dès sa conception. Personne, en effet, ne peut s'arroger la faculté de détruire ou de manipuler sans discrimination la vie de l'être humain. Le devoir spécifique des personnes qui travaillent dans le domaine de la Pastorale de la Santé consiste à sensibiliser tous ceux qui exercent une activité dans ce secteur délicat, afin qu'ils se sentent engagés à être toujours au service de la vie.
A l'occasion de la Journée mondiale du Malade, je désire remercier toutes les personnes qui travaillent dans la Pastorale de la Santé, spécialement les Evêques qui, dans les différentes Conférences épiscopales, suivent ce secteur d'activité, les aumôniers, les curés de paroisse et les autres prêtres engagés dans ce domaine, les Congrégations et les Ordres religieux, les bénévoles et tous ceux qui, face aux souffrances, à la douleur et à la mort, ne se lassent pas d'offrir un témoignage cohérent de la mort et de la résurrection du Seigneur.
Ma reconnaissance s'étend aussi à toutes les personnes qui travaillent dans le domaine de la santé, au personnel médical et paramédical, aux chercheurs, spécialement à ceux qui se consacrent à la mise au point de nouveaux médicaments et à ceux qui s'occupent de la production de médicaments accessibles également aux moins nantis.
Je les confie tous à la Vierge très sainte, vénérée dans son Immaculée Conception en ce sanctuaire de Lourdes. Puisse-t-elle aider tous les chrétiens à témoigner que la seule réponse authentique à la douleur, à la souffrance et à la mort, c'est le Christ, notre Seigneur, mort et ressuscité pour nous.
Dans ces sentiments, je vous accorde bien volontiers à vous, Frère vénéré, et à tous ceux qui participent à la célébration de la Journée du Malade, une Bénédiction apostolique particulière.
Du Vatican, le 1 décembre 2003
IOANNES PAULUS II

 

 

 


11 février 2004 – Au terme de l’Audience Générale
     Aujourd’hui, nous nous rendons spirituellement en pèlerinage à Lourdes, en ce lieu spécial, qui est bien connu pour les multiples guérisons et aussi pour la force spirituelle que reçoivent ceux qui souffrent afin de pouvoir porter la croix quotidienne. Nous nous arrêtons au milieu des hommes souffrants et nous nous rendons compte que le Christ souffre pour tous, plus encore, que le Christ souffre avec nous. Si nous unissons nos souffrances à la sienne, elles deviennent moyen de Salut.
     Dans ce contexte je désire rappeler que chaque être humain, même celui qui est marqué par la maladie et la souffrance, est un don pour l’Eglise et pour l’humanité. Personne n’a le droit de supprimer cet être à cause de la souffrance. Celle-ci est un rappel, afin que chaque personne souffrante trouve près d’elle des personnes prêtes à un soutien patient, à une aide bienveillante. La souffrance est toujours un appel à pratiquer l’amour miséricordieux.

 

 

 


2005

 

11 février 2005 – Message de Jean Paul II pour la Journée Mondiale du Malade - Le Christ, espérance pour l'Afrique
1. En 2005, à dix ans de distance, l'Afrique accueillera à nouveau les célébrations principales de la Journée mondiale du Malade, qui se tiendront au Sanctuaire de Marie, Reine des Apôtres, à Yaoundé, au Cameroun. Ce choix sera l'occasion de manifester une solidarité concrète aux populations de ce Continent, éprouvées par de graves carences dans le domaine de la santé. Un pas supplémentaire sera ainsi accompli dans la réalisation de l'engagement que les chrétiens d'Afrique adoptèrent, il y a dix ans, au cours de la III Journée mondiale du Malade, de devenir les "bons Samaritains" de leurs frères et soeurs en difficulté.
Dans l'Exhortation apostolique post-synodale Ecclesia in Africa, en effet, en reprenant les observations de nombreux Pères synodaux, j'ai écrit que "l'Afrique actuelle peut être comparée à l'homme qui descendait de Jérusalem à Jéricho; il tomba entre les mains de brigands qui le dépouillèrent, le rouèrent de coups et s'en allèrent, le laissant à demi mort (cf. Lc 10, 30-37)". Et j'ajoutais que "l'Afrique est un continent où d'innombrables êtres humains - hommes et femmes, enfants et jeunes - sont étendus, en quelque sorte, sur le bord de la route, malades, blessés, impotents, marginalisés et abandonnés. Ils ont un extrême besoin de bons Samaritains qui leur viennent en aide" (n. 41:  AAS 88 [1996], 27).
2. La Journée mondiale du Malade a également pour but d'encourager la réflexion sur la notion de santé, qui, dans son acception la plus complète, évoque également une situation d'harmonie de l'être humain avec lui-même et avec le monde qui l'entoure. Or, c'est précisément cette vision que l'Afrique exprime de façon très riche dans sa tradition culturelle, comme en témoignent les nombreuses manifestations artistiques, tant civiles que religieuses, emplies d'esprit d'allégresse, de rythme et de musique.
Malheureusement, cette harmonie est fortement troublée aujourd'hui. De nombreuses maladies dévastent le continent, et, parmi elles, le fléau du SIDA, "qui sème la douleur et la mort dans de nombreuses parties d'Afrique" (ibid., n. 116). Les conflits et les guerres, qui tourmentent de nombreuses régions africaines, rendent plus difficiles les interventions visant à prévenir et à guérir ces maladies. Dans les camps de personnes déplacées et de réfugiés se trouvent des personnes privées même des  moyens  de  subsistance  indispensables  à la survie.
J'exhorte tous ceux qui en ont la possibilité à ne pas cesser de s'investir totalement pour mettre un terme à de telles tragédies (cf. ibid. n. 117). Je rappelle ensuite aux responsables du commerce des armes ce que j'ai écrit dans ce document:  "Ceux qui alimentent les guerres en Afrique par le trafic d'armes sont complices de crimes odieux contre l'humanité" (ibid., n. 118).
3. Quant au drame du SIDA, j'ai déjà eu l'occasion de souligner en d'autres circonstances qu'il se présente également comme une "pathologie de l'esprit". Pour le combattre de façon responsable, il faut accroître la prévention à travers l'éducation au respect de la valeur sacrée de la vie et la formation à la pratique correcte de la sexualité. En effet, si un grand nombre d'infections ont lieu à la suite de contamination par le sang, en particulier au cours de la grossesse - infections qui doivent être combattues par tous les moyens possibles - bien plus nombreuses sont celles qui ont lieu par voie sexuelle, et qui peuvent être évitées en particulier à travers une conduite responsable et l'observation de la vertu de la chasteté.
Les Evêques participant au Synode pour l'Afrique de 1994 susmentionné, en faisant référence au rôle que des comportements sexuels irresponsables jouent dans la diffusion de la maladie, ont formulé une recommandation que je voudrais reproposer ici:  "L'affection, la joie, le bonheur et la paix apportés par  le Mariage chrétien et la fidélité, ainsi que la sécurité que donne la chasteté, doivent être continuellement présentés aux fidèles, spécialement aux jeunes" (Exhort. apost. post-synodale Ecclesia in Africa, n. 116).
4. Tous doivent se sentir concernés par la lutte contre le SIDA. Il revient aux gouvernants et aux Autorités civiles de fournir, toujours sur ce thème, des informations claires et correctes au service des citoyens, ainsi que de consacrer des ressources suffisantes à l'éducation des jeunes et aux soins de santé. J'encourage les Organismes internationaux à promouvoir, dans ce domaine, des initiatives inspirées par la sagesse et la solidarité, visant toujours à défendre la dignité humaine et à protéger le droit inviolable à la vie.
Une véritable reconnaissance va aux industries pharmaceutiques, qui s'engagent à contenir les coûts des médicaments utiles dans le traitement du SIDA. Certes, des ressources économiques sont nécessaires pour la recherche scientifique dans le domaine médical, et des ressources supplémentaires sont encore nécessaires pour commercialiser les médicaments issus de la recherche, mais face à une situation d'urgence comme celle du SIDA, la protection de la vie humaine doit passer avant toute autre considération.
Aux agents de la pastorale, je demande "d'apporter aux frères et soeurs atteints du SIDA tout le réconfort possible, du point de vue matériel comme du point de vue moral et spirituel. Aux hommes de science et aux responsables politiques, je demande instamment que, animés par l'amour et le respect dus à toute personne humaine, il ne lésinent pas sur les moyens susceptibles de mettre fin à ce fléau" (Exhort. apost. Ecclesia in Africa, n. 116).
Je voudrais rappeler en particulier les nombreux agents de la santé, les assistants religieux et les volontaires qui, en bons Samaritains, consacrent leur vie aux victimes du SIDA et prennent soin de leurs familles. A cet égard, il faut souligner le service précieux que prêtent des milliers d'institutions médicales catholiques en secourant, parfois de façon héroïque, ceux qui sont frappés en Afrique par toutes sortes de maladie, en particulier le SIDA, la malaria et la tuberculose.
Au cours des dernières années, j'ai pu constater que mes appels en faveur des victimes du SIDA n'ont pas été vains. J'ai noté avec satisfaction que divers pays et Institutions ont soutenu, en coordonnant leurs efforts, des campagnes concrètes de prévention et de traitement des malades.
5. Je m'adresse à présent en particulier à vous, chers frères Evêques des Conférences épiscopales des autres continents, afin que vous vous unissiez généreusement aux Pasteurs de l'Afrique pour faire face de façon efficace à cette situation d'urgence, ainsi qu'à d'autres. Le Conseil pontifical pour la Pastorale des Services de la Santé ne manquera pas d'offrir, comme il l'a fait par le passé, sa contribution en vue de coordonner et de promouvoir cette coopération, en sollicitant la contribution concrète de chaque Conférence épiscopale.
L'attention de l'Eglise aux problèmes de l'Afrique n'est pas motivée uniquement par des raisons de compassion philanthropique envers l'homme dans le besoin, mais elle est encouragée également par l'adhésion au Christ Rédempteur, dont elle reconnaît le visage dans les traits de toute personne qui souffre. C'est donc la foi qui la pousse à s'engager à fond pour soigner les malades, comme elle l'a toujours fait au cours de l'histoire. C'est l'espérance qui la rend capable de persévérer dans cette mission, en dépit des obstacles en tous genres qu'elle rencontre. C'est enfin la charité qui lui suggère l'approche adaptée aux diverses situations, en lui permettant de reconnaître les particularités de chacun et d'y répondre.
Avec cette attitude de profond partage, l'Eglise va à la rencontre des blessés de la vie, pour leur offrir l'amour du Christ à travers les nombreuses formes d'aide que l'"imagination de la charité" (Lettre apost. Novo millennio ineunte, n. 50) leur suggère pour leur porter secours. Elle répète à chacun:  Courage, Dieu ne t'a pas oublié. Le Christ souffre avec toi. Et toi, en offrant tes souffrances, tu peux collaborer avec Lui à la rédemption du monde.
6. La célébration annuelle de la Journée mondiale du Malade offre à tous la possibilité de mieux comprendre l'importance de la pastorale de la santé. A notre époque, marquée par une culture empreinte de sécularisme, on est parfois tenté de ne pas valoriser pleinement ce domaine pastoral. On pense que les domaines dans lesquels se joue le destin de l'homme sont tout autres. Au contraire, c'est précisément au moment de la maladie qu'apparaît avec le plus d'urgence le besoin de trouver des réponses adéquates aux questions ultimes concernant la vie de l'homme:  les questions sur le sens de la douleur, de la souffrance et de la mort elle-même, considérée non seulement comme une énigme à laquelle il est difficile de se mesurer, mais comme un mystère dans lequel le Christ incorpore à lui notre existence, en l'ouvrant à une naissance nouvelle et définitive pour la vie qui ne finira plus.
Dans le Christ réside l'espérance de la véritable et pleine santé, le salut qu'Il apporte est la véritable réponse aux interrogations ultimes de l'homme. Il n'existe pas de contradiction entre la santé terrestre et le salut éternel, étant donné que le Seigneur est mort pour le salut intégral de l'homme et de tous les hommes (cf. 1 P 1, 2-5; Liturgie du Vendredi Saint, Adoration de la Croix). Le salut constitue le contenu final de la Nouvelle Alliance.
Lors de la prochaine Journée mondiale du Malade, nous voulons donc proclamer l'espérance de la santé totale pour l'Afrique et pour toute l'humanité, en nous engageant à oeuvrer avec une plus grande détermination au service de cette grande cause.
7. Dans la page évangélique des Béatitudes, le Seigneur proclame:  "Heureux  les affligés, car ils seront consolés" (Mt 5, 5). La contradiction qui semble exister entre la souffrance et la joie est surmontée grâce à l'action réconfortante de l'Esprit Saint. En nous configurant au mystère du Christ crucifié et ressuscité, l'Esprit nous ouvre dès à présent à la joie qui atteindra sa plénitude dans la rencontre bienheureuse avec le Rédempteur. En réalité, l'être humain n'aspire pas à un bien-être uniquement physique ou spirituel, mais à une "santé" qui s'exprime à travers une harmonie totale avec Dieu, avec soi-même et avec l'humanité. On ne parvient à cet objectif qu'à travers le mystère de la passion, de la mort et de la résurrection du Christ.
La Très Sainte Vierge Marie nous offre une anticipation éloquente de cette réalité eschatologique, en particulier à travers les mystères de son Immaculée Conception et de son Assomption au Ciel. En Elle, conçue sans l'ombre d'un péché, la disponibilité à la volonté divine et au service des hommes est totale, et par conséquent l'est également l'harmonie profonde d'où jaillit la joie.
C'est pourquoi nous nous adressons à juste titre à Elle, en l'invoquant comme "Cause de notre joie". La joie que la Vierge nous donne est une joie qui demeure même dans les épreuves. Toutefois, en pensant à l'Afrique, dotée d'immenses ressources humaines, culturelles et religieuses, mais frappée également par d'indicibles souffrances, naît spontanément sur nos lèvres une prière implorante: 
Marie, Vierge Immaculée,
Femme de la douleur
et de l'espérance,
sois bienveillante
envers chaque personne qui souffre,
et obtiens pour chacune
la plénitude de la vie.
Tourne ton regard maternel
en particulier sur ceux qui,
en Afrique,
sont dans des situations
de besoin extrême,
car ils sont frappés par le SIDA
ou par d'autres maladies mortelles.
Regarde les mères
qui pleurent leurs enfants,
Regarde les grands-parents
privés de ressources suffisantes,
pour aider leurs petits-enfants
devenus orphelins.
Serre-les tous
contre ton coeur de Mère.
Reine de l'Afrique
et du monde entier,
Très Sainte Vierge, prie pour nous!
Du Vatican, le 8 septembre 2004
JEAN-PAUL II


 

publié le : 20 octobre 2024

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