En cette époque qui est la nôtre, les sciences expérimentales ont transformé la vision du monde et la compréhension que l’homme a de lui-même. Les multiples découvertes, les technologies innovatrices qui se succèdent à un rythme rapide, sont autant de motifs d’orgueil justifié, mais souvent, elles ne sont pas dénuées d’aspects inquiétants. En effet, sur la toile de fond de l’optimisme diffus du savoir scientifique se projette l’ombre d’une crise de la pensée. Riche de moyens, mais pas autant de fins, l’homme de notre temps vit souvent conditionné par le réductionnisme et le relativisme, qui conduisent à perdre la signification des choses ; presque aveuglé par l’efficacité technique, il oublie l’horizon fondamental de la question du sens, privant ainsi de son importance la dimension transcendante. Sur cette toile de fonds, la pensée devient faible et fait place à un appauvrissement éthique accru, qui obscurcit les références et les normes de valeurs. Ce qui a été une racine européenne féconde de culture et de progrès semble oubliée. En elle, la recherche de l’absolu — le quaerere Deum — comprenait l’exigence d’approfondir les sciences profanes, le monde du savoir tout entier (cf. Discours au Collège des Bernardins de Paris, 12 septembre 2008). En effet, la recherche scientifique et la question du sens, bien qu'ayant chacune une physionomie épistémologique et méthodologique spécifique, jaillissent d'une unique source, le Logos qui préside à l'œuvre de la création et qui guide l'intelligence de l'histoire. Une mentalité fondamentalement technopratique engendre un déséquilibre dangereux entre ce qui est techniquement possible et ce qui est moralement bon, avec des conséquences imprévisibles.
Benoit XVI - 3 mai 2012 - Université du Sacré-Coeur