Jésus Bien Aimé,
ce soir, au fond de ma cellule, sans lumière, sans fenêtre, très chaude, je pense avec une très forte nostalgie à ma vie pastorale.
Evêque pendant 8 ans dans cette résidence, à deux kilomètres de ma cellule de prison, sur la même route, sur la même plage… J’entends les vagues de l’Océan Pacifique et les cloches de la cathédrale!
Alors, je célébrais avec patène et calice dorés,
maintenant avec ton sang dans la paume de ma main.
Alors, j’allais te visiter au tabernacle,
maintenant je te porte avec moi, jour et nuit, dans ma poche.
Alors, je célébrais la Messe devant des milliers de fidèles; maintenant dans l’obscurité de la nuit, en passant la communion sous les moustiquaires.
Alors, je prêchais les Exercices spirituels aux prêtres, religieux, aux laïcs…
Maintenant, c’est un prêtre, prisonnier lui aussi, qui me prêche les Exercices de saint Ignace à travers les fentes de la cloison.
Alors, je donnais la bénédiction solennelle avec le Saint Sacrement dans la cathédrale, maintenant je fais l’adoration eucharistique chaque soir à 21 heures, en silence, chantant à voix basse le Tantum Ergo et le Salve Regina, en concluant avec cette brève prière:
« Maintenant, Seigneur, je suis content d’accepter tout de tes mains: toutes les tristesses, les souffrances, les angoisses, jusqu’à ma propre mort.
Ainsi soit-il
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prière écrite par le Cad Thuan, en captivité, le 7 octobre 1976.