- "L'interprétation de la Sainte Écriture demeurerait incomplète si on ne se mettait pas à l'écoute de qui a véritablement vécu la Parole de Dieu, c'est-à-dire les saints.[162] De fait, «viva lectio est vita bonorum».[163] En effet, l'interprétation la plus profonde de l'Écriture vient proprement de ceux qui se sont laissés modeler par la Parole de Dieu, à travers l'écoute, la lecture et la méditation assidue.
Ce n'est certainement pas un hasard si les grandes spiritualités qui ont marqué l'histoire de l'Église sont issues d'une référence explicite à l'Écriture. Je pense par exemple à saint Antoine abbé, mu par l'écoute des paroles du Christ: «Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans les cieux. Puis viens, suis-moi» (Mt 19, 21).[164] Le cas de saint Basile le Grand n'est pas moins suggestif, lui qui, dans l'opera Moralia s'interroge: «Qu'est-ce qui est le propre de la foi? C'est la pleine et indubitable certitude de la vérité des paroles inspirées par Dieu […] Qu'est-ce qui est le propre du fidèle? De se conformer avec cette totale certitude à ce qu'expriment les paroles de l'Écriture, et ne pas oser en retrancher ou en ajouter une seule».[165] Saint Benoît, dans sa Règle, renvoie à l'Écriture en tant que «norme parfaitement droite pour la vie humaine».[166] Saint François d'Assise – écrit Tommaso de Celano – «en entendant que les disciples du Christ ne devaient posséder ni or, ni argent, ni monnaie, ni prendre de besace, ni pain, ni bâton pour la route, ni avoir de sandales, ni deux tuniques … aussitôt, exultant dans l'Esprit Saint, s'exclama: ‘cela je le veux, cela je le demande, cela je désire le faire de tout mon cœur!'».[167] Sainte Claire d'Assise reprend pleinement à son compte l'expérience de saint François: «La forme de vie de l'Ordre des Sœurs pauvres (…) est celle-ci: observer le saint Évangile de notre Seigneur Jésus-Christ».[168] Saint Dominique de Guzman aussi, «partout, se présentait comme un homme évangélique, dans ses paroles comme dans ses œuvres»[169] et il voulait que tels soient ses frères prédicateurs: «des hommes évangéliques».[170] Sainte Thérèse de Jésus, carmélite, qui dans ses écrits recourt continuellement à des images bibliques pour expliquer son expérience mystique, rappelle que Jésus lui-même lui révèle que «tout le mal du monde provient de l'absence de connaissance claire des vérités de l'Écriture Sainte».[171] Sainte Thérèse-de-l'Enfant-Jésus découvre l'Amour comme sa vocation personnelle en scrutant les Écritures, en particulier les chapitres 12 et 13 de la première Lettre aux Corinthiens;[172] c'est la même sainte qui décrit la fascination qu'exercent les Écritures: «Je n'ai qu'à jeter les yeux dans le saint Évangile, aussitôt je respire les parfums de la vie de Jésus et je sais de quel côté courir».[173] Chaque saint représente comme un rayon de lumière qui jaillit de la Parole de Dieu: de même nous pensons à saint Ignace de Loyola dans sa recherche de la vérité et dans le discernement spirituel; à saint Jean Bosco dans sa passion pour l'éducation des jeunes; à saint Jean-Marie Vianney dans sa conscience de la grandeur du sacerdoce comme don et devoir; à saint Pio de Pietrelcina en tant qu'instrument de la miséricorde divine; à saint Josemaría Escrivá dans sa prédication sur l'appel universel à la sainteté; à la bienheureuse Teresa de Calcutta, missionnaire de la charité de Dieu pour les plus délaissés, et jusqu'aux martyrs du nazisme et du communisme, représentés, d'une part, par sainte Bénédicte de la Croix (Édith Stein), moniale carmélite, et, d'autre part, par le bienheureux Aloys Stepinac, Cardinal Archevêque de Zagreb."
Benoit XVI, in Verbum Domini, du 30.9.2010, numéro 48