2006
2 mars 2006 - Avec les prêtres du Diocèse de Rome
Nous savons que le Coran, selon la foi islamique, est une parole donnée oralement par Dieu, sans médiation humaine. Le Prophète n'y est pour rien. Il l'a uniquement écrite et transmise. C'est la pure parole de Dieu. Tandis que pour nous, Dieu entre en communion avec nous, il nous fait coopérer, il crée ce sujet et c'est dans ce sujet que croît et se développe sa parole.
7 mai 2006 - Homélie Messe Ordinations Sacerdotales
L'Eglise ne doit jamais se contenter de l'assemblée de ceux qu'elle a réussi à atteindre à un certain moment, et dire que les autres vont bien ainsi : les musulmans, les hindouistes et ainsi de suite. L'Eglise ne peut pas se retirer commodément dans les limites de son propre domaine. Elle est chargée de la sollicitude universelle, elle doit se préoccuper pour tous et de tous. Nous devons "traduire", d'une manière générale, cette grande tâche dans nos missions respectives. …Nous devons aussi toujours à nouveau - comme dit le Seigneur - sortir "par les chemins et le long des clôtures" (Lc 14, 23) pour porter l'invitation de Dieu à son banquet également aux hommes qui jusqu'à présent n'en ont pas entendu parler, ou qui n'ont pas été touchés intérieurement par lui.
23 juillet 2006 - Méditation dans l'église de la paroisse de Rhêmes-Saint Georges
(cf. Ep 2, 13-18): le Christ est notre paix. Il a réconcilié les uns et les autres, les juifs et les païens, les unissant dans son Corps. Il a dépassé l'inimitié dans son Corps, sur la Croix. Par sa mort, il a surmonté l'inimitié et nous a tous unis dans sa paix.
Mais nous sommes frappés, plus encore que par la beauté de cette vision, par le contraste avec la réalité que nous vivons et que nous voyons. Et nous ne pouvons, dans un premier temps, que dire au Seigneur: « Mais Seigneur, que nous dit ton Apôtre: "Ils sont réconciliés"? ». Nous voyons, en réalité, qu'ils ne sont pas réconciliés... C'est encore la guerre entre les chrétiens, les musulmans et les juifs; et d'autres fomentent encore la guerre et partout règne encore l'inimitié, la violence. Où se trouve l'efficacité de ton sacrifice? Où est, dans l'histoire, cette paix dont nous parle ton Apôtre ?
Nous ne pouvons pas, nous les hommes, résoudre le mystère de l'histoire, le mystère de la liberté humaine de dire « non » à la paix de Dieu. Nous ne pouvons pas résoudre tout le mystère de la relation Dieu-homme, de son action et de notre réponse. Nous devons accepter le mystère. Il existe toutefois des éléments de réponse que le Seigneur nous donne. Un premier élément - cette réconciliation du Seigneur, son sacrifice - n'est pas resté sans effet. Il y a la grande réalité de la communion de l'Eglise universelle, de tous les peuples, le réseau de la Communion eucharistique, qui transcende les frontières des cultures, des civilisations, des peuples, des époques. Il y a cette communion, ces « îlots de paix » dans le Corps du Christ. Ils existent. Et ce sont des forces de paix dans le monde. Si nous regardons l'histoire, nous pouvons voir les grands saints de la charité qui ont créé des « oasis » de cette paix de Dieu dans le monde, qui ont sans cesse rallumé sa lumière, et qui étaient également toujours capables de réconcilier et de créer la paix. On peut voir les martyrs qui ont souffert avec le Christ, qui ont donné ce témoignage de la paix, de l'amour qui fait obstacle à la violence.
31 août 2006 - Avec les prêtres du Diocèse d'Albano
Oui ! Naturellement nous avons de l'espoir : l'Eglise est vivante ! Nous avons derrière nous deux mille ans d'histoire de l'Eglise, avec tant de souffrances et aussi avec de nombreux échecs: pensons à l'Eglise en Asie mineure, la grande et florissante Eglise de l'Afrique du Nord, qui a disparu avec l'invasion musulmane. Des parties de l'Eglise peuvent donc réellement disparaître, comme dit saint Jean dans l'Apocalypse, ou le Seigneur à travers saint Jean: « Je vais venir à toi et je déplacerai ton chandelier, si tu ne te convertis pas » (2, 5). Mais, d'autre part, nous voyons comment malgré tant de crises l'Eglise est re-née avec une nouvelle jeunesse, avec une nouvelle fraîcheur
23 septembre 2006 - Aux Évêques du Tchad en Visite Ad Limina
Je me réjouis de savoir que dans votre pays les relations entre chrétiens et musulmans sont généralement bonnes, grâce notamment à la recherche d'une meilleure connaissance mutuelle. Je vous encourage donc à poursuivre les collaborations dans un esprit de dialogue sincère et de respect réciproque, afin d'aider chacun à mener une vie conforme à la dignité reçue de Dieu, avec le souci d'une authentique solidarité et d'un développement harmonieux de la société.
25 septembre 2006 - Intégralité du Discours du Pape Benoit XVI aux Ambassadeurs des pays à majorité musulmane, accrédités près le Saint Siège
Monsieur le Cardinal,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Chers amis musulmans,
Je suis heureux de vous accueillir pour cette rencontre que j'ai souhaitée afin de consolider les liens d'amitié et de solidarité entre le Saint-Siège et les communautés musulmanes du monde. Je remercie Monsieur le Cardinal Paul Poupard, Président du Conseil pontifical pour le Dialogue interreligieux, pour les paroles qu'il vient de m'adresser, ainsi que vous tous qui avez répondu à mon invitation.
Les circonstances qui ont suscité notre rencontre sont bien connues. J'ai déjà eu l'occasion de m'y arrêter au cours de la semaine écoulée. Dans ce contexte particulier, je voudrais aujourd'hui redire toute l'estime et le profond respect que je porte aux croyants musulmans, rappelant les propos du Concile Vatican II qui sont pour l'Église catholique la Magna Charta du dialogue islamo-chrétien : «L'Église regarde aussi avec estime les musulmans, qui adorent le Dieu unique, vivant et subsistant, miséricordieux et tout-puissant, créateur du ciel et de la terre, qui a parlé aux hommes et aux décrets duquel, même s'ils sont cachés, ils s'efforcent de se soumettre de toute leur âme, comme s'est soumis à Dieu Abraham, à qui la foi islamique se réfère volontiers» (Déclaration Nostra aetate, n. 3). Me situant résolument dans cette perspective, dès le début de mon pontificat, j'ai eu l'occasion d'exprimer mon souhait de continuer d'établir des ponts d'amitié avec les adhérents de toutes les religions, manifestant particulièrement mon appréciation de la croissance du dialogue entre musulmans et chrétiens (cf. Discours aux représentants des Églises et Communautés chrétiennes, et aux autres traditions religieuses, 25 avril 2005). Comme je l'ai souligné à Cologne, l'an dernier, «le dialogue interreligieux et interculturel entre chrétiens et musulmans ne peut se réduire à un choix passager. Il est en effet une nécessité vitale, dont dépend en grande partie notre avenir» (Discours aux représentants de Communautés musulmanes, 20 août 2005). Dans un monde marqué par le relativisme et excluant trop souvent la transcendance de l'universalité de la raison, nous avons impérativement besoin d'un dialogue authentique entre les religions et entre les cultures, capable de nous aider à surmonter ensemble toutes les tensions, dans un esprit de collaboration fructueuse. Poursuivant l'œuvre entreprise par mon prédécesseur, le Pape Jean-Paul II, je souhaite donc vivement que les relations confiantes qui se sont développées entre chrétiens et musulmans depuis de nombreuses années, non seulement se poursuivent, mais se développent dans un esprit de dialogue sincère et respectueux, fondé sur une connaissance réciproque toujours plus vraie qui, avec joie, reconnaît les valeurs religieuses que nous avons en commun et qui, avec loyauté, respecte les différences.
Le dialogue interreligieux et interculturel est une nécessité pour bâtir ensemble le monde de paix et de fraternité ardemment souhaité par tous les hommes de bonne volonté. En ce domaine, nos contemporains attendent de nous un témoignage éloquent pour montrer à tous la valeur de la dimension religieuse de l'existence. Aussi, fidèles aux enseignements de leurs propres traditions religieuses, chrétiens et musulmans doivent-ils apprendre à travailler ensemble, comme cela arrive déjà en diverses expériences communes, pour se garder de toute forme d'intolérance et s'opposer à toute manifestation de violence; et nous, Autorités religieuses et Responsables politiques, nous devons les guider et les encourager en ce sens. En effet, «même si, au cours des siècles, de nombreuses dissensions et inimitiés sont nées entre chrétiens et musulmans, le saint Concile les exhorte tous à oublier le passé et à pratiquer sincèrement la compréhension mutuelle, ainsi qu'à protéger et à promouvoir ensemble, pour tous les hommes, la justice sociale, les biens de la morale, la paix et la liberté» (Déclaration Nostra aetate, n. 3). Les leçons du passé doivent donc nous aider à rechercher des voies de réconciliation, afin de vivre dans le respect de l'identité et de la liberté de chacun, en vue d'une collaboration fructueuse au service de l'humanité tout entière. Comme le déclarait le Pape Jean-Paul II dans son discours mémorable aux jeunes, à Casablanca au Maroc, « le respect et le dialogue requièrent la réciprocité dans tous les domaines, surtout en ce qui concerne les libertés fondamentales et plus particulièrement la liberté religieuse. Ils favorisent la paix et l'entente entre les peuples» (n. 5).
Chers amis, je suis profondément convaincu que, dans la situation que connaît le monde aujourd'hui, il est impératif que chrétiens et musulmans s'engagent ensemble pour faire face aux nombreux défis qui se présentent à l'humanité, notamment pour ce qui concerne la défense et la promotion de la dignité de l'être humain ainsi que des droits qui en découlent. Alors que grandissent les menaces contre l'homme et contre la paix, en reconnaissant le caractère central de la personne, et, en travaillant avec persévérance pour que sa vie soit toujours respectée, chrétiens et musulmans manifestent leur obéissance au Créateur, qui veut que tous vivent dans la dignité qu'il leur a donnée.
Chers amis, je souhaite de tout cœur que Dieu miséricordieux guide nos pas sur les chemins d'une compréhension réciproque toujours plus vraie. Au moment où pour les musulmans commence la démarche spirituelle du mois de Ramadan, je leur adresse à tous mes vœux cordiaux, souhaitant que le Tout-Puissant leur accorde une vie sereine et paisible. Que le Dieu de la paix vous comble de l'abondance de ses Bénédictions, ainsi que les communautés que vous représentez!
14 décembre 2006 - Au nouvel Ambassadeur de Syrie
Depuis de nombreux siècles désormais, des relations harmonieuses existent entre les communautés chrétiennes et musulmanes dans votre pays. La Syrie occupe donc une position unique pour offrir au monde un exemple de coexistence pacifique et de tolérance entre les fidèles de différentes religions. A cet égard, je vous assure du soutien du Saint-Siège pour les efforts que votre gouvernement a accomplis dans le pays et à l'étranger pour promouvoir le dialogue entre les religions et les cultures. Comme j'ai eu l'occasion de le réaffirmer récemment, "tous les hommes sont profondément solidaires et [il faut] les inviter à mettre en valeur leurs différences historiques et culturelles non pour s'affronter mais pour se respecter mutuellement" (Discours au Corps diplomatique, Ankara, 28 novembre 2006).
14 décembre 2006 - Au nouvel Ambassadeur du Kirghiastan
Monsieur l'Ambassadeur, les membres de l'Eglise catholique dans votre pays sont très peu nombreux. Bénéficiant de relations amicales avec les communautés musulmanes et orthodoxes, ils ont le désir de pouvoir assister de façon impartiale toutes les populations du Kirghizstan. Leur activité caritative s'étend déjà de l'enseignement à l'Université aux visites dans les prisons et à l'assistance des personnes handicapées. Cela forme une partie de l'engagement d'amour pratique et concret de l'Eglise à l'égard de tout être humain et en particulier des pauvres. En apportant ces services, elle ne recherche ni le pouvoir ni les privilèges, mais uniquement la liberté d'exprimer sa croyance dans "le lien inséparable entre l'amour de Dieu et l'amour du prochain" (Deus caritas est, n. 16) à travers les œuvres de bien, de justice et de paix. Je suis certain que lorsque de nouveaux besoins sociaux et spirituels apparaîtront dans votre pays, la communauté catholique y répondra de façon généreuse et sage.
2007
19 janvier 2007 - Au nouvel Ambassadeur de Turquie près le Saint-Siège
Au cours de mon voyage mémorable, j'ai manifesté à maintes reprises le respect de l'Église catholique pour l'Islam, et l'estime du Pape et des fidèles pour les croyants musulmans, notamment lors de ma visite à la Mosquée bleue d'Istanbul…
Permettez-moi, Monsieur l'Ambassadeur, de saluer par votre intermédiaire les communautés catholiques de Turquie que j'ai eu la joie de visiter, en particulier à Éphèse et à Istanbul. Aux évêques, aux prêtres et à tous les fidèles, je redis l'affection du Successeur de Pierre et ses encouragements pour que l'Église catholique qui est en Turquie continue de témoigner humblement et fidèlement de l'amour de Dieu à travers le dialogue avec tous, particulièrement les croyants musulmans, et à travers son engagement au service du bien commun
22 janvier 2007 - Au nouvel Ambassadeur du Montenegro
En réfléchissant, sur les siècles passés, lorsque le message évangélique du salut parvint sur les terres du Monténégro, embrassant à la fois la tradition orientale et occidentale, votre Patrie, Monsieur l'Ambassadeur, s'est toujours caractérisée comme un lieu privilégié de la rencontre œcuménique que nous appelons tous de nos vœux. Et la rencontre entre chrétiens et musulmans a elle aussi trouvé au Monténégro des réalisations convaincantes.
Il faut poursuivre cette voie, sur laquelle l'Eglise souhaite que tous convergent dans la tâche d'unir leurs efforts au service de la noblesse originelle de l'être humain. L'Eglise voit en effet en cela une part significative de sa mission au service de l'homme dans l'intégralité de ses pensées, de ses actions, de sa capacité de projet, dans le respect des traditions qui forment l'identité d'une terre. Je suis certain que, dans le cadre européen, le Monténégro ne manquera pas d'apporter sa contribution active autant dans le domaine civil que politique, social, culturel et religieux.
28 janvier 2007 - Angelus
Avec une sagesse clairvoyante, saint Thomas d'Aquin réussit à instaurer une confrontation fructueuse avec la pensée arabe et juive de son temps, au point d'être considéré un maître toujours actuel de dialogue avec d'autres cultures et religions. Il sut présenter cette admirable synthèse chrétienne entre raison et foi qui pour la civilisation occidentale représente un patrimoine précieux où l'on peut puiser aujourd'hui également pour dialoguer de manière efficace avec les grandes traditions culturelles et religieuses de l'Est et du Sud du monde.
1er février 2007 - Aux membres fondateurs de la Fondation pour la Recherche et le Dialogue interreligieux et interculturels
Comme je l'ai rappelé à plusieurs reprises, à la suite de la Déclaration conciliaire Nostra aetate et de mon cher prédécesseur, le Pape Jean-Paul II, nous sommes appelés, Juifs, Chrétiens et Musulmans, à reconnaître et à développer les liens qui nous unissent. C'est bien là l'idée qui nous a conduits à créer cette Fondation, dont le but est de rechercher «le message le plus essentiel et le plus authentique que les trois religions monothéistes, à savoir judaïsme, christianisme et islam, peuvent adresser au monde du XXIe siècle», afin de donner une nouvelle impulsion au dialogue interreligieux et interculturel, par la recherche commune et par la mise en lumière et la diffusion de ce qui, dans nos patrimoines spirituels respectifs, contribue à renforcer les liens fraternels entre nos communautés de croyants.
Nos traditions religieuses respectives insistent toutes sur le caractère sacré de la vie et sur la dignité de la personne humaine. Nous le croyons, Dieu bénira nos initiatives si elles concourent au bien de tous ses enfants et si elles leur donnent de se respecter les uns les autres, dans une fraternité aux dimensions du monde. Avec tous les hommes de bonne volonté, nous aspirons à la paix. C'est pourquoi je le redis avec insistance: la recherche et le dialogue interreligieux et interculturels ne sont pas une option, mais une nécessité vitale pour notre temps.
18 mai 2007 - Aux évêques du Mali en visite Ad Limina
Je voudrais exprimer ma satisfaction de savoir que les fidèles catholiques du Mali entretiennent des relations cordiales avec leurs compatriotes musulmans. Aussi est-il primordial qu'une juste attention soit portée à leur approfondissement, pour favoriser l'amitié et une collaboration fructueuse entre chrétiens et musulmans. Pour cela, il est légitime que l'identité propre de chaque communauté puisse s'exprimer visiblement, dans le respect mutuel, reconnaissant la diversité religieuse de la communauté nationale et favorisant une coexistence paisible, à tous les échelons de la société. Il est alors possible de cheminer ensemble, dans un engagement commun pour la justice, la concorde et la paix.
17 juin 2007, avec les jeunes, à Assise ; à l'occasion du 8ème centenaire de la conversion de Saint François.
C'est à l'enseigne de la prière qu'il faut voir également l'engagement de François pour la paix. Cet aspect de sa vie est d'une grande actualité dans un monde qui a tant besoin de paix et qui ne réussit pas à en trouver le chemin. François fut un homme de paix et un artisan de paix. Il le montra également par la douceur avec laquelle il se plaça, sans jamais toutefois taire sa foi, face aux hommes d'autres confessions, comme le démontre sa rencontre avec le Sultan (cf. 1 Cel I, 20, 57: FF 422).
24 juillet 2007 - Avec les prêtres du diocèse de Belluno
Il n'existe plus de monde uniforme. En particulier en Occident, où sont présents tous les autres continents, toutes les autres religions, les autres façons de vivre la vie humaine. Nous vivons une rencontre permanente, qui ressemble peut-être à l'Eglise antique, où existait la même situation. Les chrétiens représentaient une très petite minorité, un grain de sénevé qui commençait à croître, entouré par des religions et des conditions de vie très différentes. Nous devons donc réapprendre ce que les chrétiens des premières générations ont vécu. Saint Pierre, dans sa première Lettre, au troisième chapitre, a dit: "Vous devez toujours être prêts à rendre compte de l'espérance qui est en vous". Il a ainsi formulé pour l'homme normal de l'époque, pour le chrétien normal, la nécessité de conjuguer annonce et dialogue. Il n'a pas dit formellement: "Annoncez à chacun l'Evangile". Il a dit: "Vous devez être capables, prêts à rendre compte de l'espérance qui est en vous". Il me semble que cela est la synthèse nécessaire entre dialogue et annonce. Le premier point est qu'en nous-mêmes doit toujours être présente la raison de notre espérance. Nous devons être des personnes qui vivent la foi et qui pensent la foi, qui la connaissent intérieurement. Ainsi, en nous-mêmes, la foi devient raison, devient raisonnable. La méditation de l'Evangile, et donc l'annonce, l'homélie, la catéchèse, pour rendre les personnes capables de penser la foi, constituent déjà des éléments fondamentaux de cette combinaison entre dialogue et annonce. Nous devons nous-mêmes penser la foi, vivre la foi et, en tant que prêtres, trouver différentes façons de la rendre présente, de manière à ce que nos catholiques chrétiens puissent avoir la conviction, la promptitude et la capacité de rendre compte de leur foi. Cette annonce, que la foi transmet dans la conscience d'aujourd'hui, doit revêtir de multiples formes. Sans aucun doute, les homélies et les catéchèses en sont deux formes principales, mais il y a ensuite tant d'autres façons de se rencontrer - séminaires de la foi, mouvements laïcs, etc. - où l'on parle de la foi et où l'on apprend la foi. Tout cela nous rend tout d'abord capables de vivre réellement en étant le prochain des non-chrétiens - en majorité, ce sont ici des chrétiens orthodoxes, des protestants, mais également des fidèles d'autres religions, musulmans et autres. Le premier point est de vivre avec eux, en reconnaissant en eux le prochain, notre prochain. Vivre donc à la première personne l'amour du prochain comme expression de notre foi. Je pense que cela constitue déjà un témoignage très fort et également une forme d'annonce: vivre réellement avec ces autres personnes l'amour du prochain, reconnaître en ceux-ci, en eux, notre prochain, de sorte qu'ils puissent voir: cet "amour du prochain" est pour moi. Si tout cela a lieu, nous pourrons plus facilement présenter la source de notre comportement, c'est-à-dire le fait que l'amour du prochain est l'expression de notre foi. Ainsi, dans le dialogue, on ne peut pas immédiatement passer aux grands mystères de la foi, bien que les musulmans aient déjà une certaine connaissance du Christ, qui nie sa divinité, mais qui reconnaît en Lui au moins un grand prophète. Ils éprouvent de l'amour pour la Vierge. Il existe donc des éléments communs dans la foi, qui constituent des points de départ pour le dialogue. Un élément pratique et réalisable, nécessaire, est surtout de rechercher l'entente fondamentale sur les valeurs de la vie. Ici aussi, nous possédons un trésor commun, car elles proviennent de la religion d'Abraham, réinterprétée, revécue de manières qui sont à étudier, auxquelles nous devons enfin répondre. Mais la grande expérience substantielle, celle des Dix Commandements, est présente et cela me semble un point à approfondir. Passer aux grands mystères me semble un niveau difficile, qui ne se réalise pas dans les grandes rencontres. La semence doit peut-être entrer dans les coeurs, de sorte que la réponse de la foi à travers des dialogues plus spécifiques puisse mûrir ici et là. Mais ce que nous pouvons et devons faire est de rechercher le consensus sur des valeurs fondamentales, exprimées dans les Dix Commandements, résumées dans l'amour du prochain et dans l'amour de Dieu, et ainsi interprétables dans les divers domaines de la vie. Nous nous trouvons tous au moins sur un chemin commun vers le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob, le Dieu qui est finalement le Dieu au visage humain, le Dieu présent en Jésus Christ. Mais si ce dernier pas est plutôt à accomplir lors de rencontres intimes, personnelles ou en petits groupes, le chemin vers ce Dieu, dont proviennent ces valeurs qui rendent possible la vie commune, me paraît également réalisable lors de rencontres plus importantes. Il me semble donc que se réalise ici une forme d'annonce humble, patiente, qui attend, mais qui rend également déjà concrète notre vie selon la conscience illuminée par Dieu.
20 septembre 2007 - Aux Evêques du Bénin, en Visite Ad Limina.
Je voudrais vous dire ma satisfaction de constater que, d'une manière générale, les relations entre chrétiens et musulmans se déroulent dans une atmosphère de compréhension réciproque. Aussi, pour éviter de voir se développer quelque forme d'intolérance et pour prévenir toute violence, convient-il d'encourager un dialogue sincère, fondé sur une connaissance réciproque toujours plus vraie, notamment par des relations humaines respectueuses, par une entente sur les valeurs de la vie et par une coopération mutuelle en tout ce qui promeut le bien-être commun. Un tel dialogue exige aussi de préparer des personnes compétentes pour aider à connaître et à comprendre les valeurs religieuses que nous avons en commun et à respecter loyalement les différences.